Violences et terreur en Guinée: le message de Womé…
Le 16 septembre dernier, les habitants de la localité de Womé ont tué à coup de pierres et bâtons, huit membres d’une mission d’information et de prévention du virus ébola. Après l’émotion, l’horreur et la stupeur, cette tuerie sanglante de Womé est un message à l’endroit de Kôrô Alpha qui a jugé nécessaire de ne pas y mettre les pieds ! Certes, justice doit être rendue aux victimes qui compte parmi elles, le sous-préfet de Womé, trois journalistes, le directeur adjoint de l’hôpital régional de N’zérékoré de cette tragédie. Mais à y voir de très près, il s’agit en réalité d’un message codé à l’intention de Kôrô Alpha, le Mansa de toute la Guinée. Décryptage…
Primo, cette tuerie de womé traduit la faillite de la communication gouvernementale pour sensibiliser les populations sur les dangers liés au virus Ébola. Un des membres de cette mission funeste à Womé raconte : « Les manifestants soupçonnaient l'équipe d'être venue les tuer parce que, selon eux, Ebola n'est qu'une invention des Blancs pour tuer les Noirs » ! Les habitants de Womé sont-ils des sauvages ? Non ! Seule certitude, les « leçons » des intellos dont l’arrogance et le mépris envers les réalités culturelles locales, ne sont pas les bienvenues du côté des autochtones. Un habitant de N’zérékoré originaire de Womé raconte au micro de RFI : « depuis des siècles que nos parents vivent dans ce village, ils ont toujours mangé de viande de brousse, notamment les chauves-souris. Alors pourquoi on veut nous l’interdire ? » A côté de la peur du virus ébola, c’est également ce sentiment de stigmatisation à l’égard de certains compatriotes originaires la région forestière (où la viande de brousse est très prisée, mais qui constitue un vecteur de transmission du virus) qui enclenche le cercle infernal des violences. Kôrô, attention danger !
Secundo, la tuerie de womé illustre une triste évidence concernant la forêt: « loin des yeux, loin du cœur » dit-on. Très éloignée de la capitale Conakry, la région forestière ne figure pas parmi les priorités du gouvernement de Kôrô Alpha. D’ailleurs ses prédécesseurs n’ont pas fait mieux pour cette région fertile et riche mais qui manque de tout. Ce sentiment d’abandon est un fardeau pour ces populations qui ont connu les pires atrocités depuis les années 90. Tenez, qui a payé les conséquences directes et indirectes des guerres fratricides au Libéria, en Sierra-Léone et en Côte d’Ivoire ? C’est la forêt ! A-t-on oublié les conflits inter-ethniques entre koniankés et Guerzés (des centaines de morts, notamment à Koulé en juillet 2013) ? Qu’en-est-il des massacres de Zogota en août 2012 lorsque des forces de l’ordre ont tiré sur de paisibles populations dans leur sommeil ? A chacune de ces violences, le gouvernement guinéen utilise la même recette : indexer des groupes rebelles étrangers et envoyer des cadres ressortissants de la région pour éteindre l’incendie. Kôrô, attention danger !
Tertio, la tuerie de womé vient confirmer une triste réalité: les guinéens ne croient plus en leur justice à cause de l’impunité et le sentiment d’insécurité grandissante dans le pays. Tenez, la semaine dernière, Amadou Oury Diallo membre actif de l’union des forces démocratiques de guinée (UFDG) de Cellou Dalein Diallo a été froidement abattu à son domicile à Conakry. Pendant ce temps, c’est un autre député de ce même parti, Aboubacar Soumah qui aurait été attaqué par des inconnus en armes. Au final, les guinéens se replient massivement vers leurs communautés pour mieux se protéger à défaut d’avoir un Etat fort et impartial capable d’assurer leur sécurité commune. D’ailleurs, les notables de la basse guinée ont exprimé leur « soutien » au député Aboubacar Soumah. Pour Amadou Oury Diallo, l’UFDG et la mouvance présidentielle ont déjà enclenché une « guerre des communiqués » aux conséquences imprévisibles. Kôrô, attention danger !
En définitive, la tuerie de Womé qui s’ajoute à notre longue liste de massacres non élucidés, est un signal pour Kôrô Alpha. Les guinéens sont divisés, à bout de nerf et surtout en colère contre les élites qui ne pensent qu’à leurs intérêts égoïstes.Aujourd'hui, les Guinéens en ont marre des promesses futiles, des discours ethnocentristes et le sentiment d’une justice à deux vitesses. Dans ce contexte, la faim et la colère sont des ingrédients explosifs qui risquent de balayer nos apprentis sorciers du gouvernement de Kôrô et nos opposants-opposés. Autant agir maintenant avant qu’il ne soit trop tard. Kôrô Alpha qui a un appétit irrationnel pour les mondanités et les conférences internationales, est de plus en plus isolé par rapport aux réalités quotidiennes de ses compatriotes. Présent à New-York cette semaine pour l'assemblée générale ordinaire de l'ONU, Kôrô Alpha va tendre la main pour demander de l’aider face au virus ébola qui tue dans son pays (plus de 500 morts). Pourtant en quatre années de gouvernance, Kôrô Alpha a sans doute négligé sa politique intérieure. Il suffit d'approcher les guinéens pour comprendre que les promesses d’une « Guinée émergente » en 2040 de Kôrô Alpha, on s’en fout !!! Ce qui compte pour nos compatriotes, c’est l’amélioration de leur quotidien, une justice équitable, une sécurité renforcée, une santé pour tous et de la nourriture accessible à tous ! Et il n’est jamais trop tard pour agir. Car aux promesses stériles, les guinéens risquent de répondre par la violence. Pendant ce temps, nos opposants-opposés multiplient les critiques et n’offrent aucune alternative fiable aux yeux de leurs compatriotes. D’ailleurs, Kôrô Alpha et nos opposants-opposés ont tous les yeux rivés sur la présidentielle de 2015 pour espérer une nouvelle fois, berner leurs compatriotes. Mais ceci est une autre histoire. A la semaine prochaine.
Amadou Diallo
Pour Africaguinee.com
damadou13@yahoo.fr
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