CONAKRY- Qu’est-ce qui explique la récurrence des violences en Guinée ? Quelles solutions faudrait-il pour palier à ce phénomène ? L’universitaire Dr Bano Barry lève un coin du voile de ce fléau qui gangrène la société guinéenne et propose des pistes de solutions, a constaté Africaguinee.com.
De l’analyse du phénomène en Guinée…
’Première des choses, il n’y a pas une société au monde dans laquelle il n’y a pas de violences. Si les guinéens souhaitent vivre dans une société où il n’y a pas du tout et jamais de violences, il faudrait qu’on retourne dans la communauté primitive. On dit souvent que la naissance de l’Etat est liée au fait qu’il y a des gens dont le comportement est déviant. Qu’il y ait donc de la violence n’est pas un problème. Ce qui pourrait être un problème, c’est l’intensité, la récurrence de ces violences et l’incapacité de découvrir les auteurs de ces violences, les causes de ces violences et de pouvoir prendre des dispositions afin de rétablir l’ordre mais aussi de rétablir le droit, la justice. Voilà ce qui est un problème.’’
Des risques de soulèvement populaire ?
’Ce n’est pas les violences qui pourraient conduire à des soulèvements populaires, mais il est évident que ces violences qui ne trouvent pas de solution, dont on n’arrive pas à circonscrire les causes, dont on n’arrive pas à trouver les auteurs, sont un problème de stabilité politique. Un pays qui n’a pas de stabilité politique et dans lequel il y a régulièrement de manifestations violentes, est un pays qui n’attire pas les investisseurs, c’est un pays qui décourage même les nationaux qui veulent y rester. Cela est extrêmement préjudiciable à la fois aux activités économiques mais aussi pour toutes activités sociales éducatives et autres.
Des pistes de solutions…
D’abord, il faut faire la typologie des violences, parce que tous les cas de violences ne produisent pas la même cause. Il y a certaines violences qui sont liées à la gestion des autorités locales. Ces violences sont relativement faciles à régler. Il s’agit simplement de s’assurer que ceux qui sont dans le commandement local, préfectoral, non seulement soit formés, mais soient aussi conscients de leur responsabilité. Et en cas de faute, il faut qu’ils soient sanctionnés. Ce problème là peut se résoudre de cette façon.
Il y a d’autres violences qui sont liées en réalité à une situation économique très défavorable. Il y a par exemple dans certaines zones où il y a énormément de potentialité et de possibilité économique, et en même temps une concurrence qui n’est pas suffisamment bien réglée et régentée entre les différents acteurs. Cela conduit souvent à des tensions, à des conflits. Ces conflits aussi sont relativement faciles à régler parce qu’il s’agit simplement de prendre des dispositions pour s’assurer que dans un régime libéral, la compétition se fait selon les normes.
Il y a d’autres types de conflits qui résultent par exemple du banditisme. Quand les bandits assassinent par exemple des personnes, et après, les populations se révoltent. Pour résoudre cette question, ce n’est pas parce qu’on va supprimer les bandits, non, on ne peut pas le faire. Il y aura toujours de bandits. Dans chaque génération, vous avez à la fois des gens qui sont présidentiables, des gens qui sont ministrables et des gens qui seront des bandits. Le problème n’est pas là. Le problème, c’est la capacité des forces de l’ordre à découvrir ces bandits, à les mettre dans un lieu sûr qu’on appelle prison, de s’assurer qu’ils aillent dans un tribunal devant les juges et qu’ils soient condamnés, qu’ils restent en prison le temps nécessaire pour purger leur peine. Cela est lié à ce phénomène.
D’autres types de violences apparaissent dans les villes et préfectures, qui résultent du comportement des forces de l’ordre. Lorsqu’elles agissent violemment contre des citoyens innocents avec un excès de zèle, cela conduit souvent à des révoltes. La solution est connue ! Il faut d’abord reformer les forces de sécurité et de défense de façon générale. Et pour cela, il ne signifie pas seulement de changer le dispositif, il s’agit de s’assurer que ce qui vont au sein des forces de défense et de sécurité sont les meilleurs parmi les enfants de la Guinée. Qu’il y ait des enquêtes de moralité au moment des recrutements, que l’on assure la formation à la fois intellectuelle, mais aussi en matière de droit et qu’il y ait des mécanismes de sanction. C'est-à-dire que pour une raison ou pour une autre, lorsque les forces de sécurité violentent des citoyens de gauche à droite, il faudrait que l’autorité sévisse en les déshabillant, en les envoyant devant les tribunaux adaptés à leur condition et en les condamnant lourdement pour que plus jamais, quelqu’un qui porte une tenue croit que le fait de porter une tenue lui donne l’autorité nécessaire de transformer les guinées à des petits poulets.
Propos recueillis par Diallo Boubacar 1 pour Africaguinee.com
Tel : (00224) 664 935 132
Créé le 24 décembre 2013 19:23