Saloum Cissé parle : »Ce n’est pas la rue qui donne le pouvoir… »(interview)
CONAKRY-Saloum Cissé, le Secrétaire Général du RPG (Rassemblement du Peuple de Guinée) vient de briser le silence sur l’actualité sociopolitique du pays. Dans cette interview, nous avons évoqué avec lui les manifestations qui secouent la Haute Guinée, la convention nationale du RPG, la reprise du dialogue, mais aussi de la reprise des manifestations par le FNDC. Lisez plutôt !!!
AFRICAGUINEE.COM : Comment expliquez-vous les manifestations qui secouent la Haute Guinée depuis quelques mois ?
SALOUM CISSE : Comme je ne suis pas sur place, je ne peux que faire un jugement superficiel en fonction des différentes déclarations que je vois à la télé. Mais je ne peux pas donner les détails ou des jugements de valeur sur ça. Mon problème, c’est que les jeunes réclament le courant, mais le courant ne se donne pas du tic au tac. C’est un processus. Ce qui est important, c’est que le processus soit entamé pour qu’ils soient convaincus que l’objectif est là et la volonté de faire est là.
Ces manifestations ne traduisent-elles l’échec de la gouvernance du Président Alpha Condé surtout dans ses bastions ?
Non il ne faut pas voir le problème comme ça. Il faut donner la priorité. Après 50 ans d’indépendance, s’il y avait le courant, est-ce que ce problème se serait posé aujourd’hui? S’il y avait des acquis très importants, on n’en serait pas là. S’il y a des problèmes qui ne se posent pas dans certains pays environnants, c’est parce qu’il y a eu des acquis. Mais si le manque à gagner est de trop, on ne peut faire que des priorités. Tout ce qui est prioritaire, c’est ce qu’on peut faire. Alors, moi je pense que les gens doivent être patients parce qu’honnêtement, ce problème de courant le président l’a en la tête. Concrètement nous voyons son action sur le terrain. Ce n’est pas de la théorie, c’est de la pratique. Mais il ne peut pas tout faire en même temps, ce n’est pas possible. C’est un processus. Ce processus il l’a entamé et il est en très bonne voie.
Ces contestations interviennent à quelques mois de l’élection présidentielle. Ne craignez-vous pas une mauvaise surprise ?
Je ne le pense pas. Parce que les journalistes ont tout fait pour que les jeunes fassent des déclarations de diffamation, les jeunes disent non. Leurs revendications, c’est pour qu’on ait le courant, ce n’est pas autre chose. Donc cela se comprend très bien, mais ce sont des jeunes responsables, ils sont mûrs. On ne peut pas détourner leur esprit du tic au tac. Ce n’est pas possible parce qu’eux-mêmes sont conscients de l’effort qui est fourni au niveau des différents barrages qui sont en train de se faire. Mais le Président ne peut pas tout faire en même temps, ce n’est pas possible. Sinon on a beaucoup des barrages potentiels en Guinée, mais on ne peut qu’entamer la priorité des priorités. Et ce qui est en très bonne voie.
On a entendu certains manifestants scandé ‘’A bas le 3ème mandat’’. N’est-ce un sentiment de rejet ?
Moi en tout cas je n’ai pas vu quelqu’un qui a dit ‘’A bas le 3ème mandat’’ et je n’ai pas entendu ça non plus. De toutes les façons quand quelqu’un est en colère, tout ce qu’il dit ça relève de l’énervement. Mais l’objectif qu’il veut vraiment atteindre si demain ou après-demain le gouvernement arrive à lancer ce programme-là à bon escient, moi je crois qu’il n’y aura pas de problème.
Le RPG-arc-en-ciel organise sa convention nationale le 5 août prochain. Où en êtes-vous dans les préparatifs ?
Les principaux pieds de cette convention, ce sont les conventions régionales. Vous avez vu les résultats de ces conventions régionales déjà. Tout le monde converge vers la candidature du Pr Alpha Condé. Il n’y a pas une seule région qui dit le contraire. Donc les choses sont facilitées. La direction nationale ne fera qu’entériner les vœux des militants et responsables du parti.
Au lendemain de la réélection du Président Alpha Condé en 2015, vous disiez être favorable à un 3ème mandat pour le RPG mais pas pour le Président Alpha Condé. Cette position a-t-elle évolué ou bien est-elle toujours intacte ?
La position a évolué parce que premièrement nous sommes déjà au niveau de la 4ème république. Mieux encore c’est la base qui vient de donner le ton et l’orientation générale du parti. Donc la direction nationale ne peut que se plier à ce que la base entérine. Voilà. Sinon lorsqu’on était au niveau de la 3ème république, on disait deux mandats et moi je n’ai fait qu’interpréter la loi. Je n’ai pas donné une position spécifique. Mais les gens ne savent pas lire entre les lignes.
Comment vous réagissez à face à la reprise des manifestations du FNDC qui exige désormais le « départ » du Président Alpha Condé ?
On ne dit pas à un homme d’Etat rationnellement élu ôte-toi de là pour que je m’y mette. Ça ne se fait pas, il y a un processus. S’ils veulent, ils n’ont qu’à aller aux élections, s’ils gagnent, il n’y a pas de problème. Mais dire que le président Alpha Condé ne doit pas se présenter, de quoi ils sont forts ? Qu’est-ce qui l’interdit ? Mais le débat est sur le palier. Ce qui est sûr, c’est que la manière dont ils veulent vraiment agir, ce n’est pas la rue qui donne le pouvoir. C’est quand tu es un bon exemple que les gens vont te suivre. Mais nous savons tous le parcours de ceux qui sont sur l’échiquier national guinéen. Ils ont géré le pays, nous savons comment ils ont géré le pays, les fortunes qu’ils ont accumulées nous connaissons. Nous ne sommes pas étrangers. Alors les gens n’ont qu’à aller avec une certaine efficience correcte. C’est très important en politique.
Croyez à un dialogue entre le pouvoir et l’opposition avant la présidentielle ?
Tout ça dépend de la maturité politique de l’opposition. Quand je vois la classe politique à l’heure actuelle, cette opposition par rapport à la classe politique au temps de Bâ Mamadou et Siradiou, c’est très différent. Cette grande différence se situe au niveau de la manière de voir les problèmes quand ils sont posés. Donc moi je pense que s’ils veulent aller aux élections, ils n’ont qu’à venir aux élections dans la paix pour que ce pays-là ne connaisse pas de tournure douloureuse comme dans d’autres pays. Moi je pense que nous devrions tous avoir le souci de la paix dans ce pays-là.
L’opposition exige la dissolution de la constitution et de l’Assemblée Nationale. Qu’en dites-vous ?
C’est des faux problèmes ça.
La CEDEAO, l’UA et les Nations Unies ont entamé des démarches pour relancer le dialogue. Pensez-vous qu’elles vont aboutir ?
Je ne suis pas informé de ces démarches. Sinon j’appartenais au parlement panafricain. Donc s’il y avait des démarches j’allais être informé de ces démarches. Mais jusque-là je ne suis pas informé de celles-ci.
Certains leaders politiques comme Bah Oury préconise une nouvelle transition politique. Que répondez-vous ?
On parle de transition que si vraiment le pays est en ébullition d’une certaine manière. Mais moi je pense que les élections sont passées dans de bonnes conditions et l’Assemblée fonctionne dans des bonnes conditions. Donc, moi je ne vois pas pourquoi on parle de transition. La transition dans quoi et pourquoi ? C’est ça l’énigme que je me pose.
Quel est votre dernier message ?
Moi mon problème c’est que nous devrions voir la Guinée en face. Les calculs politiques doivent être des calculs rationnels, des calculs qui peuvent faire avancer la société guinéenne. Tout calcul politique qui peut reculer ce pays-là de 10 ans, de 20 ans ou de 30 ans, mais je crois que l’opposition doit prendre conscience et se mettre à l’écart de ces calculs-là. Parce que de toutes les façons il y a des lois qui régissent le pays. Il faut que ces lois-là soient respectées de part et d’autre pour que nous puissions avancer. Parce que ce n’est pas le vouloir journalier de quelqu’un que nous devrions faire marcher. Nous devrions rester derrière nos principes, respecter nos principes et les appliquer rationnellement pour que le pays soit tiré de l’ornière.
Interview réalisée par Diallo Boubacar 1
Pour Africaguinee.com
Tel : (00224) 655 311 112
Créé le 24 juillet 2020 12:42Nous vous proposons aussi
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