Said Oumar Koulibaly, DG de la GUILAB : « Pourquoi les réseaux téléphoniques et l’internet seront perturbés… »
CONAKRY- Pourquoi les réseaux téléphoniques et la connexion internet vont connaître des perturbations cette semaine en Guinée ? Après les réactions tout azimut de certains citoyens, le Directeur Général de la « Guinéenne de Large Bande » est revenu à la charge pour apporter des prévisions. Africaguinee.com a rencontré ce jeudi 19 mars 2020 M. Said Oumar KOULIBALY, le Directeur Général de la GUILAB.
AFRICAGUINEE.COM : La Guinée va connaître les 21 et 22 mars prochains des perturbations de au niveau de tous les réseaux téléphoniques. Expliquez-nous pourquoi ces interruptions.
SAID OUMAR KOULIBALY : Merci d’être venu chez nous pour s’enquérir de cette situation qui fait un peu débat sur la toile ; Mais je comprends les consommateurs, je comprends la population par rapport à cette inquiétude. Parce qu’aujourd’hui force est de constater que la communication surtout via internet est devenue, non pas seulement que nécessité mais vitale. Donc, quand on parle d’interruption de connexion pendant une certaine période, ça peut susciter des inquiétudes voire même des interrogations. Encore si ça coïncide à une période extrêmement importante de notre vie démocratique, ça peut encore nous interpeller deux fois plus. Mais il faut comprendre que ça c’est une activité qui a été prévue depuis l’année dernière. La Guinée est membre d’un consortium qui est ACE (Africa Coast to Europe), nous sommes plusieurs pays. Chaque année nous avons des réunions techniques et nous regardons un peu l’évolution du trafic et la dégradation du câble sous-marin. Il a été constaté ces dernières années sur certains segments, un besoin d’augmentation de capacité dû à la congestion et qui est aussi d’une certaine manière lié à une demande croissante des populations en termes de données et de bandes passantes. Donc il a été prévu l’année dernière qu’il y ait des travaux sur le câble sous-marin sur certains segments au premier trimestre 2020. Donc la date du 17 au 22 était déjà programmée depuis plusieurs moments par le consortium, les travaux seront effectués par Alcatel Submarine Network et ça débutera le 17. Ça déjà débuté et ça va se terminer le 22.
Donc tous les réseaux seront complètement coupés ?
Au fait, les travaux se font en trois étapes. La première étape consiste à un changement des TRB-D et les TRB-C, ce sont en quelque sorte les transpondeurs. Ces transpondeurs, l’un est d’une capacité de 10 giga bit et l’autre 100 giga bit. Cette première phase ne nécessite pas d’interruption sur le trafic, donc du 17 au 20 mars. La seconde phase qui nécessite l’activation ou l’intervention sur la SLTE c’est un équipement qui est appelé l’autoroute des données, donc à cette phase il y aura une interruption le 21 mars de 1h du matin à 13h. Et après la troisième phase qui consiste à faire le backup des données d’AC n’aura pas d’impact sur le trafic. En trois phases, la première il n’y aura pas d’impact, la deuxième phase il y aura un impact pendant un laps de temps et la troisième il n’y aura pas d’impact.
Concrètement qu’est-ce que vous appelez impact ?
Tous les trafics qui passeront par le câble sous-marin ACE seront interrompus y compris voix et données. Donc l’internet sera coupé systématiquement de 1h du matin à 13h ; Si les travaux sont terminés à 13h parce qu’il faut être prudent c’est la technique. Si les travaux ne sont pas terminés à 13h nous continuerons le lendemain jusqu’à 9h mais c’est une activité qui se fait à distance, ça ne se fait au sein de GUILAB, ce n’est pas seulement GUILAB qui sera impacté. Tout le trafic sera interrompu, y compris la réception des appels à l'international. Je précise que les appels locaux et l'envoi des messages fonctionneront normalement. C'est le trafic à l'international qui sera impacté par ces travaux.
Est-ce qu’il y a des trafics qui ne passent pas par le câble sous-marin ?
A chaque opérateur de vous dire exactement comment il gère ses activités. Moi aujourd’hui j’ai des clients, je fais tout possible, parce qu’il faut que les gens comprennent que je ne peux pas et en aucun cas interrompre volontairement, sous aucun prétexte le trafic. Nous sommes membre d’un consortium, nous sommes une entreprise parapublique mais qui s’est engagée dans une logique de certification ISO 9001. C’est-à-dire la certification des qualités par rapport aux activités que nous menons et nous sommes monitorés permanemment. Donc en aucun cas s’il y a une interruption qui n’est pas motivée, non seulement ça aura un impact sur les activités, et ça aura un impact sur l’entreprise au sein du consortium.
Concrètement la Guinée sera coupée du monde pendant cette période ?
Absolument ! Mais c’est pendant un laps de temps. Les travaux se passent la nuit et c’est le week-end, il y a moins d’activités économiques. Généralement les travaux de maintenance sur le câble sous-marin se font la nuit.
Sauf que cette date coïncide à la période des élections ?
Je comprends ! C’est pourquoi je dis la vie est une coïncidence en soi. Ta joie coïncide au malheur de quelqu’un d’autre. Moi je ne pouvais pas deviner une date quand je faisais ces courriers que le 22 qu’on pouvait avoir une élection en Guinée. Il y a dix (10) jours, qui pouvait deviner qu’il y aurait une élection en Guinée ? Personne. C’est une coïncidence, je l’accepte. Mais le plus important c’est de rassurer les populations et leur faire comprendre ce qui est prévu. Parce que l’objectif derrière ces activités techniques est aussi de satisfaire les besoins des citoyens qui sont aujourd’hui très demandant des capacités et qui sont aussi très regardants en ce qui concerne la qualité de service. Donc pour faire des omelettes, il faut casser des œufs.
Vous avez dit qu’il n’y pas que la Guinée qui est concernée, sauf que les autres pays ont des solutions alternatives…
Certains oui mais d’autres non. J’ai reçu un appel d’un journaliste de la Sierra Léone qui était aussi anxieux bien qu’ils n’ont pas d’élections. Mais il ne comprenait pas pourquoi leur pays allait être coupé pendant un certain temps. Je lui ai expliqué qu’il n’y pas que la Sierra Léone qui est impactée. La Guinée, la Mauritanie, la Gambie, le Libéria seront tous impactés. Parce que nous sommes des pays qui n’avons qu’un seul câble sous-marin. Des pays qui n’ont pas qu’un seul câble sous-marin peuvent basculer leurs capacités sur le second câble ; Mais pour l’instant nous n’avons qu’un seul câble sous-marin, nous sommes en train de tout mettre en œuvre avec l’appui du Ministère et du Chef de l’Etat pour faire atterrir un second câble sous-marin.
Pour le moment il n’y a aucune pièce de rechange ?
Pour le moment non. C’est comme si vous avez une seule route qui vous mène d’un point A à un point B et que vous devez faire des travaux sur cette route. Si vous n’avez pas de route secondaire vous arrêtez tout le trafic et quand vous finissez vous réactivez le trafic.
C’est quand même une situation un peu exceptionnelle que la Guinée soit coupée du monde pendant plusieurs heures…
Je peux comprendre que ce soit exceptionnel. Mais pendant des situations de période de maintenance il arrive qu’il y ait des interruptions.
Que répondez-vous à ceux qui estiment que c’est une volonté manifeste des autorités de brouiller un peu les réseaux en prélude au double scrutin législatif et référendaire prévu le 22 mars prochain?
Ceci dénote de l’ignorance des gens qui ne comprennent pas réellement les enjeux et la problématique liés à la gestion du câble sous-marin. Mais je peux les comprendre, c’est pourquoi je me prête à cet exercice d’éclaircissement pour rassurer nos populations. Nous sommes une entreprise parapublique où l’Etat guinéen est actionnaire qu’il y a d’autres actionnaires privés, nous sommes membre d’un consortium, nous nous sommes inscrits dans une logique de certification. Nous sommes certifiés ISO 9001. En aucun cas, sous aucun prétexte nous nous ne pouvons volontairement interrompre le trafic aux guinéens. Non seulement ce n’est pas bon le pays, ce n’est pas bon pour l’image de notre entreprise et ce n’est pas bon pour personne. C’est l’ensemble des opérateurs de téléphonie et fournisseurs d’accès à internet qui sont concernés.
Interview réalisée par SOUARE Mamadou
Pour Africaguinee.com
Tél. : (00224) 655 311 111
Créé le 19 mars 2020 17:07Nous vous proposons aussi
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