Projets Filets Sociaux Productifs : Entretien avec Ibrahima Kourouma, Consultant, Expert en transferts monétaires…

Ibrahima Kourouma

CONAKRY- A quoi sert réellement le projet filets sociaux ? Comment fonctionne-t-il ? Quels bénéfices les personnes démunies tirent-elles de ce projet ? Ibrahima Kourouma, consultant du Projet de Filets Sociaux Productifs et en même temps expert en transfert monétaire apporte quelques réponses. 


Implanté en Guinée depuis plusieurs années, le projet filets sociaux productifs est une initiative du Gouvernement guinéen pour venir en aide aux populations les plus pauvres et les plus vulnérables dans le milieu rural. Dans cet entretien accordé à notre rédaction, monsieur Kourouma parle du projet et de son impact dans la lutte contre la pauvreté en Guinée. 

 

AFRICAGUINEE.COM : Pouvez-vous nous faire une brève présentation du projet Filets Sociaux en Guinée ?  

IBRAHIMA KOUROUMA :Les filets sociaux comme leur nom l’indique, sont à l’image d’un filet du pêcheur. On lance le filet, il s’étend sur une grande surface et puis se résorbe au fonds pour ramasser plus de poissons ! Donc c’est un aspect élargi de la protection sociale, un instrument de la protection sociale qui va vers les personnes les plus pauvres, les plus vulnérables qui ne peuvent pas elles-mêmes contribuer à leur propre protection du fait de leur pauvreté extrême.

Par exemple quand vous prenez un fonctionnaire qui travaille, il contribue à sa propre protection sociale à travers un prélèvement sur son salaire qui est versé à la CNSS et quand cette personne prend sa retraite (elle n’est plus active) elle reçoit cette cotisation sous forme de pensions. Mais un cultivateur qui ne peut plus cultiver, lui n’as pas de pension. Alors que lui aussi c’est un citoyen qui a droit à la protection de l’Etat. Donc les filets sociaux c’est cette partie de la protection qui concerne les pauvres personnes qui ne peuvent pas elles-mêmes contribuer à leur propre protection.

Dans la protection sociale, il y a la partie contributive, c'est-à-dire ceux qui contribuent à leur propre protection sociale. Dans ce lot, il y a les salariés. Tous les salariés quand ils travaillent, ils sont assurés à la caisse nationale de la sécurité sociale. Quand les jours sombres arrivent, le travailleur récupère ce qu’il a mis de côté. Mais ceux qui n’ont pas cette chance et qui constituent l’écrasante majorité de la population guinéenne ont droit à la protection sociale de l’Etat à travers les programmes de filets sociaux.

Aussi il ne s’agit pas simplement d’apporter la protection sociale à ces individus mais il faut leur permettre de se reconstruire, d’être capable d’entreprendre une activité économique, c’est le but des filets sociaux productifs.

Vous êtes en charge des transferts monétaires, comment se fait le choix des bénéficiaires ? Quels sont les critères de choix ?

Au fait, les transferts monétaires constituent une composante du projet. C’est de transférer directement les ressources financières aux ménages-là. Mais la sélection des ménages se fait sur la base des critères et des conditions définis. C’est l’Etat guinéen qui définit quels sont les critères qui peuvent être appliqués à des personnes pour que ces personnes bénéficient ces services du projet. Ça veut dire que l’Etat définit un ensemble de conditions définissant le statut de pauvreté extrême et de vulnérabilité (à travers des études statistiques).

Le projet de filets sociaux sur cette base engage un processus de ciblage combinant les facteurs de pauvreté en s’appuyant sur les communautés auxquelles appartiennent ces ménages ; c’est à dire que le ciblage est d’abord communautaire ensuite les résultats issus de ce ciblage communautaire sont corrigés par un Proxy Mean Test (PMT) qui vient confirmer ou infirmer ces données.

En fonction de l’enveloppe financière disponible, un quota de ménages bénéficiaires est présélectionné par la communauté et la sélection définitive est faite après corrections avec l’application du (PMT). 

Actuellement au projet, nous mettons en œuvre de programmes de transferts monétaires, à savoir :

Ø  Le programme pilote de transferts monétaires conditionnels (TMC) est mis en œuvre dans seize (16) Sous-Préfectures dans les préfectures de Télimélé, Mali, Siguiri et Kérouané pour encourager les inscriptions et les fréquentations scolaires des enfants de 7 à 14 ans d’une part, et d’autre part booster la fréquentation des structures sanitaires pour les enfants de zéro à six (6) ans au sein des ménages bénéficiaires. Ce programme bénéficie à plus de 2 000 ménages actuellement et après sept (7) transferts un montant de plus de trois milliards de GNF ont été payés à ces ménages ;

Ø  Le programme de transferts monétaires avec des conditions souples (TMCS) pour la reconstruction post EBOLA : c’est un programme spécial pour aider à la reconstruction socio-économique des ménages pauvres vivants dans les zones qui ont été durement affectées par l’épidémie Ebola. Ce programme bénéficie actuellement à 7 000 ménages bénéficiaires et après cinq (5) transferts ce sont près de 30 milliards de GNF qui ont été payés à ces ménages ; il est mis en œuvre dans 15 préfectures.

Le Projet de Filets Sociaux Productifs n’est pas à sa première année, faites-nous le bilan à mi-parcours de ce programme de transfert monétaire ?

Le bilan est largement positif à mi-parcours des deux (2) programmes de transferts monétaires actuellement mis en œuvre ; en plus des transferts directs de ressources financières aux ménages bénéficiaires, un paquet de mesures d’accompagnement est mis en œuvre à leur intention sous forme de formation et de renforcement de capacités pour qu’à la fin du projet ces ménages soient capables de se prendre en charge socialement et économiquement. Ces formations englobent tout ce qui est lié aux pratiques familiales essentielles (santé, éducation familiale et parentale) et pratiques de la vie socio-économique locale (l’éducation financière, exercice des activités génératrices de revenus, les notions de groupements et d’associations, etc.).

Cela va permettre in fine de pérenniser les actions du projet et surtout de casser définitivement le cycle infernal de transmission intergénérationnelle de la pauvreté au sein des ménages et de leurs communautés.

Vous êtes souvent en contact avec les personnes bénéficiaires quelle est votre perception réelle, est-ce que vous avez l’impression que ce projet a permis de changer leur vie ?

Les transferts monétaires couplés aux mesures d’accompagnement ont sensiblement amélioré la vie quotidienne des ménages bénéficiaires élargis aux non bénéficiaires dans leurs districts. Pour preuve à la date d’aujourd’hui, plus de 349 groupements ont été constitués et fonctionnels avec un dépôt de plus de plus de neuf cent millions de GNF dans leurs comptes au Crédit Rural de Guinée.

Enfin nous allons poursuivre les transferts monétaires en destination de ces groupements constitués sous formes d’allocations financières pour servir de fonds de roulement et une autre partie sous forme d’achat d’équipements et de petits outillages de production.

Ces équipements seront fournis au niveau local pour aussi renforcer les producteurs et fournisseurs locaux de ces équipements et matériels de production.

 

Entretien réalisé par Oumar Bady Diallo 

Pour Africaguinee.com 

Tél. : (00224) 655 311 112

Créé le 7 août 2018 14:07

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