Privation, traîtrise, exactions : Des migrants guinéens racontent leur calvaire..
KANKAN-Ils viennent de l’Algérie, de la Libye, de la Tunisie du Maroc et ont vécu le cauchemar de leur vie. Ces jeunes guinéens qui ont quitté leur pays dans le but de gagner les côtes européennes via la méditerranée pour mener une meilleure vie ont vécu la plus grande désillusion. Ils sont arrivés à Kankan par voie terrestre dans la nuit du Samedi 17 Mars 2018. Notre correspondant dans la région les a rencontré. Ils racontent leur clavaire.
Abdoulaye Diallo, a fait un (1) an en Libye et six (6) mois en Algérie où il a été emprisonné. Ses parents ont été contraints de payer des rançons pour sa libération. « Pour venir en Libye, il faut passer par des correspondants. La plus part d'entre eux sont des malhonnêtes. Une fois que tu viens on t'amène dans une maison à l'intérieur d'une cour fermée. On te dit d'appeler tes parents pour qu'on t'envoie de l'argent. J’ai fait un an de prison en Libye. Mes parents ne savaient pas. C'est dans des chambres noires qu'on nous garde. Ils ont des guides libyens qui se chargent d'envoyer les migrants en mer pour la traversée avant de se retourner avec l'argent payé. Moi on m'avait demandé une somme de 600 000 FCFA », explique Abdoulaye Diallo.
Ce rescapé de l’enfer libyen raconte que leur effectif a atteint 150 personnes en prison. Harassés par les tortures, ils ont pu offenser la porte de la prison et fuir de la Libye pour l'Algérie après deux jours de marche sans manger ni boire. « Nous avons fui la Libye pour l'Algérie, on a fait deux jours de marche, sans eau, sans manger. Arrivées dans un village algérien tellement qu'ils avaient pitiés de nous, c'est des tomates qu'on a mélangé avec du sel dans des bols pour nous donner. On s’est partagé ça. Mais les habitants eux-mêmes ont eu peur de nous », explique Abdoulaye Diallo.
Dans le groupe de migrants qui vient de regagner la Guinée, il y a des blessés, d'autres sont devenus fous. Thierno Mamadou Mouctar Sylla témoigne avoir fait la Libye et aussi l'Algérie. Son calvaire a commencé au cours de la route où il a été victime d'une attaque en plein désert entre la Libye et le Niger. « Sur la route, nous avons été attaqués par des inconnus, ils nous ont retirées nos téléphones, l'argent et tout », se remémore-t-il.
Mouctar Sylla poursuit en révélant qu’il a été trompé par un guinéen : « C'est un jeune guinéen qui s’appelle Touré qui est basé en Libye qui m'avait dit qu'il allait m'aider pour que je rentre en Italie mais il m'a trompé. Arrivé en Libye, il m’a laissé, il a fui avec l'argent qu'on m'a transféré. C'est 225 000 dinars soit près de dix millions de francs guinéens. Après, j'ai été arrêté détenu », se souvient-il.
Le jeune Sylla est maçon de profession. Il a économisé ses revenus pendant des années avant de pouvoir se lancer en aventure. En quittant la Guinée, il s’est caché de ses parents. Mais aujourd’hui, il considère la Guinée comme un eldorado.
« La Guinée est mieux qu’ailleurs s'il y a un bon Président, un bon gouvernement (…) j’ai fait l’Algérie, le Maroc, la Tunisie, la Libye, j'ai vu tout là-bas. C'est le soleil il n’y a pas d’eau, il n’y a pas de forêts. Ici en Guinée, il y a la forêt, il y a tout. On a souffert pour chercher, on n’a pas eu donc nous avons jugé nécessaire de revenir définitivement au bercail », confie Mouctar avant de déconseiller les jeunes guinéens à se lancer dans une aventure vers Libye où on maltraite des gens.
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Mamadou Djouma Bah, a vécu pendant cinq ans en Algérie. Il raconte sa mésaventure. « Mon histoire est longue. En cours de route du retour, on a subi assez de souffrances. Certains sont venus de la Lybie, l'Algérie, le Maroc. On nous a regroupé dans les bases de l'OIM à Agadès et Arlite pour nous ramener ensemble », expliquet-il.
A l’en croire, un processus de nettoyage est lancé en Algérie pour rapatrier tous les noirs. « Quand on voit un noir, on te demande comment tu es venu ? D'où tu viens ? Par quelle voie ? Parce qu’ils ne savent pas comment les noirs entrent dans leur pays. C'est pourquoi ils ont organisé un processus de nettoyage des noirs dans leur pays. Les algériens sont en train de faire un nettoyage général. Pour les migrants en provenance de l'Algérie, on les regroupe pour les jeter en désert. Il y a un lieu qu'on appelle Giralda où on regroupe les noirs. De là, on prend tout le monde on envoie à Tamanrasset, la dernière ville entre l'Algérie et le Niger. A partir de là, on jette tout le monde au désert appelé "ASSAMAKA". C'est entre l'Algérie et le Niger. Et là il faut beaucoup marcher avant d'arriver à la base de l'OIM », raconte Mamadou Djouma Bah.
Ces migrants qui viennent de regagner le pays, bénéficient d’une aide symbolique de la part de l’organisation internationale pour les migrations (OIM). Avant leur départ ce dimanche pour leur ville d’origine, chacun d’entre eux a reçu une somme de 500 000 GNF, plus un téléphone. Ils bénéficieront d'un appui technique et financier de la part de l'OIM dans les prochains mois.
De Kankan, Amadou Oury Souaré
Correspondant régional d'Africaguinee.com
Tel : (+224) 656 44 26 28
Créé le 20 mars 2018 08:05
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