Pêche et consommation en Guinée : Explications avec Ali Saadi, PDG de “SONIT“

Ali Saadi, PDG de Sonit pêche

CONAKRY- Pourquoi le prix du poisson est cher en Guinée? Y-a-t-il des difficultutés majeures dans le secteur de la pêche? Ces questions et bien d’autres ont été abordées avec Ali Saadi, Président Directeur Général de la société “SONIT“ qui évolue dans le secteur de la pêche et du commerce de poissons congelés. Dans cet entretien, M. Saadi aborde également la question relative à la situation de la communauté libanaise vivant en Guinée dont il en est le président d’honneur. Entretien exclusif !


AFRICAGUINEE.COM: M. Ali Saadi bonjour!

ALI SAADI: Oui bonjour M. SOUARE!

-Quelles sont les difficultés que vous rencontrez vous opérateurs dans le secteur de la pêche ?

Nous évoluons dans ce secteur depuis 23 ans. Nous avons fait des investissements importants dans ce secteur, il n’y a pas d’activité sans difficulté mais le nôtre a énormément de difficulté par le fait que tous les ans nous constatons des augmentations des coûts de licence, des augmentations du prix du gasoil, certaines règles qui freinent des investissements dans le secteur de la pêche et nous sommes en pourparlers avec les responsables concernés pour essayer d’améliorer les conditions, pour encourager le secteur privé à s’intéresser d’avantage au secteur de la pêche.

-Selon vous qu’est-ce qui cause la hausse du prix du poisson sur le marché ?

Il ya plusieurs éléments qui occasionnent la hausse du prix du poisson. Il n'y a pas longtemps j’ai précisé que le coût de la licence est très élevé par rapport aux pays de la sous région. On peut envisager des augmentations du coût de 10 ou 15% par an, mais lorsqu’on multiplie par 5 ça devient insupportable et incontestablement ça aura un impact négatif sur le prix du poisson.

-Certains évoquent aussi le manque de bateaux de pêche. Les armateurs craignent d’être arraisonnés…

La rareté de la présence des bateaux de pêche en Guinée est due au fait que les licences de pêche sont chères. Les arraisonnements sur les bateaux qui fraudent sont justifiés. Il y a eu des décrets et aussi le plan d’aménagement de la pêche de la part du gouvernement qui réglementent les activités du secteur de la pêche, nous pensons que les autorités guinéennes ont bien fait de prendre des mesures pour sanctionner tous les bateaux qui font la fraude et qui font une pêche illicite. Ces mesures arrangent tous les opérateurs honnêtes. D’autres difficultés existent, c’est que la commission nationale des arraisonnements n’applique pas strictement les règles.

Par exemple, le décret  N°006 du 6 janvier 2014 portant sur l’instauration d’un régime de surveillance par satellite, précise dans son article 2 que tout armateur a la possibilité de formuler ses observations sur les conclusions de l’autorité chargée du suivi de la surveillance.

Or la commission, lorsqu’elle constate qu’un bateau est supposé être dans une zone interdite, elle arraisonne le bateau pour le faire venir au port, elle se réunit sans convoquer l’armateur, elle prend des décisions et elle les notifie à l’armateur.

C’est seulement après tout cela que l’armateur se met à se défendre ou à s’expliquer pour se défendre.

Cette procédure, à mon avis, est irrégulière, elle n’encourage pas les armateurs à venir opérer dans nos eaux.

Ensuite l’article 3 du même décret précise “ qu’une copie du rapport final d’observation ou du rapport de détection est transmise à l’exploitant dès que possible et en tout état de cause au plus tard, dans les quinze jours ouvrables qui suivent la fin de la finalisation du rapport“.

Si je comprends bien l’interprétation de cet article, cela veut dire que c’est après réception du dit rapport que la sentence est prononcée et que le navire doit être arraisonné après cette sentence. Voilà encore une irrégularité dans le comportement de la commission nationale d’arraisonnement.

Par ailleurs, s’agissant des amendes à infliger sur les bateaux dont les infractions sont confirmées, le décret N° 016 du 17 janvier 2014 prévoit dans une des infractions, une amende allant de 600 millions de francs guinéens à 1 milliard.

Je ne ferai pas de commentaires si le montant est élevé ou pas, cependant dans la plupart des cas, elle frappe très haut en fixant le maximum, à savoir, un milliard sans tenir compte de la bonne foi de l’exploitant ou même des circonstances difficiles dans lesquelles le bateau opère.

A mon avis, la commission nationale d’arraisonnement doit toujours être ouverte pour des compromis tout en restant sous le plafond des règles en vigueur.

Je pense que le rôle de la commission nationale d’arraisonnement ne se limite pas à la maison d’obliger les exploitants à respecter les règles, mais aussi de lier un climat de confiance pour que les bateaux ne quittent pas nos eaux.

-A votre avis, pourquoi la commission nationale d’arraisonnement a un tel comportement ?

A mon avis elle veut toujours plaire à sa hiérarchie, son souci c’est de démontrer aux autorités compétentes qu’ils infligent le maximum d’amendes prévues dans le décret, en abandonnant les compétences.

Un autre exemple, s’agissant des règles applicables aux opérations de transbordement, le décret N° 008/PRG du 7 janvier 2014 prévoit dans son article 3 que tout transbordement donne lieu au paiement d’une redevance de 50 Euros par tonne transbordée.

A mon avis, c’est énorme comme redevance. Il este évident que nous devrons éviter les exportations tant que le marché guinéen a besoin du poisson.

Mais s’il s’avère que le marché est saturé, nous avons intérêt à encourager l’exportation parce qu’elle génère le rapatriement des devises. C’est pourquoi j’estime que 10 dollars de redevance pour le transbordement du filet est correct.

En revanche, l’article 1 du même décret qui prévoit une autorisation au préalable délivrée par le ministère de la pêche pour tout transbordement est bien justifiée et je l’approuve à 100%.

Outre toutes ces difficultés, il ya un grand problème pour délimiter les larges de la base à partir de laquelle l’exploitant doit identifier sa zone de pêche.

-Comment toutes ces mesures ont été prises alors que vous qui êtes dans le secteur privé vous les considérez comme mauvaises. N’avez-vous pas assisté à la rédaction de ces règles ?

Si, la CONAPEG,(confédération nationale de la pêche de Guinée) a assisté aux débats pour la rédaction du plan d’aménagement de la pêche, mais ses avis n’ont pas été retenus.

-On vous accuse aussi d’exporter la plupart des poissons obtenus sur les eaux guinéennes. Ne pensez-vous pas que cela aussi contribue à hausser le prix du poisson dans les différents marchés ?

Toute exportation est soumise à une autorisation, et le ministère de la pêche ne donne jamais une autorisation d’exploitation si le marché guinéen a besoin du poisson. La hausse des prix est due aux raisons évoquées ci-haut.

-Est-ce que vous avez une idée de l’apport du secteur de la pêche sur l’économie guinéenne ?

Le secteur de la pêche est très vital et apporte beaucoup à la Guinée. Un des aspects les plus positifs du secteur de la pêche c’est qu’on ne dérange pas le gouvernement pour les devises. Aujourd’hui le poisson qui est sur le marché ne nécessite pas le déblocage des devises.  Deuxièmement, le gouvernement a le souci d’aider la pêche artisanale. Il a apporté une aide à la pêche artisanale, mais cette aide n’est pas encore suffisante. Mais malgré cela, les pêcheurs artisanaux font beaucoup de choses pour ravitailler les populations en poisson. Nous pensons que notre apport pour la Guinée est important.

-Outre vos activités dans le secteur de la pêche, vous êtes aussi le président d’honneur de la communauté libanaise vivant en Guinée. Parlez nous un peu de cette autre fonction que vous occupez…

La mission réelle c’est d’organiser la vie de la communauté libanaise, d’encourager les citoyens libanais qui sont ici ou ailleurs à investir en Guinée, consolider nos relations avec nos frères et sœurs guinéens et créer la confiance entre les autorités guinéennes et la communauté libanaise. Voilà notre mission essentielle. Et les fruits de cette mission sont visibles. Constatez que depuis l’arrivée au pouvoir du président Alpha Condé trois grands projets ont été réalisés par les libanais. Le premier est une usine de ciment, le second est un moulin et les troisième est le grand marché de bonfi. Tous ces trois projets ont coûté un investissement de 150 millions de dollars.

S’ajoutent à ces projets, les opérations immobilières réalisées par les libanais, d’autres petites et moyennes usines qui leurs appartiennent et qui créent beaucoup d’emplois.

Moi je suis guinéen, je suis né ici, j’ai grandi ici, j’ai fait mes études ici, je parle une langue nationale parfaitement. Donc c’est tout à fait normal que je sois bien intégré dans la société guinéenne et c’est parce que j’ai investi dans le domaine de la pêche et aussi dans l’immobilier.

-Votre dernier mot…

Je lance un message à tous les opérateurs économiques évoluant dans le secteur de la pêche d’être solidaires pour que nous donnions de bonnes idées aux autorités guinéennes afin que les décisions soient les meilleurs pour faciliter la tâche au secteur privé.

 

Interview réalisée par SOUARE Mamadou Hassimiou

Pour Africaguinee.com

Tél. : (+224) 664 93 51 31

 

 

Créé le 6 mars 2014 11:32

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