Nomination de Kassory Fofana à la présidence : Un guinéen résident en France écrit à Alpha Condé…
CONAKRY- Un guinéen vivant en France vient d’écrire au président Alpha Condé suite à la nomination de Kassory Fofana au poste de Ministre d’Etat chargé de la promotion des investissements publics et privés.
Nous vous livrons le contenu de cette lettre ouverte qui vient de parvenir à notre rédaction…
A son Excellence, Monsieur le Président de la République
Excellence
Vous venez de prendre un décret portant création du Conseil Présidentiel des partenariats publics et privés, suivi d'un autre décret nommant un ministre D’État à la présidence de la République chargé des investissements publics et des partenariats publics et privés.
Ces deux décrets traduisent très certainement votre volonté d'imprimer un nouvel élan voir l'accélération des programmes d'investissements publics en dotant notre pays d'infrastructures modernes, fiables et durables pour nos concitoyens.
Je tiens à apporter ici ma modeste contribution en vue de booster cet élan et cela en présentant les Partenariats public-privés comme un véritable outil de développent surtout quand il est question de construire pour notre pays d'importantes infrastructures en termes d'autoroutes, de chemins de fer, de ports, d'aéroports, d’hôpitaux, d'universités ou de barrages hydroélectriques ou de centrales solaires et thermiques.
Au fait, pour construire de grands ouvrages, les États interviennent de moins en moins pour laisser place aux partenariats public-privés. Et les difficultés budgétaires du secteur public ainsi que la recherche d'une efficacité accrue ont entraînés ces dernières années l'apparition de nouvelles formes de coopération institutionnelle entre public et privé. Ces contrats de partenariats public-privé constituent la nouvelle forme de contrats administratifs qui vient s'ajouter aux Conventions de Délégations de Service Public, aux Marchés publics et aux conventions d'occupation domaniale.
En France par exemple, les partenariats public-privés sont définis par l'ordonnance du 17 juin 2004 comme étant «un contrat administratif par lequel une collectivité territoriale ou un établissement local confie à un tiers, pour une durée bien déterminée en fonction de la durée d'amortissement des investissements ou des modalités de financement retenues, une mission globale ayant pour objet la conception, la construction ou la transformation, l'entretien, la maintenance, l'exploitation ou la transformation d'ouvrages, d'équipements ou de biens immatériels nécessaires au service public, ainsi qu'à tout ou partie de leur financement à l'exception de toute participation au capital.
Toutefois, le financement définitif d'un projet doit majoritairement être assuré par le titulaire du contrat, sauf pour les projets d'un montant supérieur ou égal à un seuil fixé par décret..»
En dehors de cette définition, il paraît judicieux de préciser que le recours au partenariat-public-privé requiert naturellement des conditions juridiques fondamentales.
Ces conditions tiennent particulièrement à l'urgence mais aussi à la complexité du projet ayant préalablement fait l'objet d'une évaluation préalable.
En termes d'urgence, le recours au partenariat public-privé tiens à ce que l'urgence qui s'attache à la réalisation du projet envisagé est au nombre des motifs d’intérêt général pouvant justifier la passation d'un contrat de partenariat, dès lors qu’elle résulte objectivement , dans un secteur ou une zone géographique déterminés, la nécessité de rattraper un retard particulièrement grave affectant la réalisation d'équipements collectifs . Naturellement notre pays a un immense besoin d'infrastructures ne serrai- ce que dans les secteurs de l'eau et de l'électricité. Et le nouveau ministre en charge des partenariat public-privé devrait absolument prendre contact avec des partenaires de référence ayant l'expertise et la prestance nécessaires pour accompagner notre pays à trouver des solutions performantes et durables en vue de fournir l'eau et l’électricité à tous nos concitoyens.
Quant à la condition relative à la complexité du projet, je précise qu'on est en présence d'un projet complexe lorsque la personne publique (État ou collectivité territoriale) n'est pas objectivement en mesure de définir elle-même les moyens techniques pouvant répondre à ses besoins, ou d'établir le montage juridique ou financier du projet. La complexité du projet est cependant une condition objective c'est à dire que la personne publique ne peut donc se borner à affirmer qu'elle n'est pas capable de définir les moyens aptes à satisfaire leurs besoins ou d'évaluer ce que le marché peut offrir en termes de solutions techniques et/ ou de solutions juridiques ou financières.
Le contexte économique et social dans lequel se trouve notre pays impose au gouvernement que vous présider, de se mobiliser de façon irréversible pour faire du partenariat public-privé un véritable levier de développement.
Pour réussir ce vaste chantier , le gouvernement devra répondre à des impératifs colossaux pour pouvoir mobiliser les financements privés. Ces impératifs sont entre autres :
– La mise en place d'un environnement juridique et politique stable.
A ce niveau , le conseil présidentiel en charge des partenariats publics-privés et le ministre d’état devront s’atteler à la rédaction d'un projet de loi portant sur les partenariats publics-privés avec la collaboration d'experts guinéens et de partenaires étrangers qualifiés en la matière. Cette loi sera rédigée en prenant en compte le contexte national et international des PPP.
Aussi, pour pouvoir asseoir une crédibilité nationale et internationale respectable et durable, nous devons absolument vivre dans un climat politique et institutionnel démocratique, solide et apaisé. Ce qui permettra à nos partenaires économiques et financiers d'avoir confiance en nos institutions et à nos leaders en vue d'investir leurs capitaux dans la construction de nos infrastructures ;
– La mise sur pied d'un projet rationnel, qui imprime une forte volonté d'implanter un projet suffisamment important et complexe pour justifier d'un projet de PPP ;
-la mise en place d'une équipe de gestion du projet performante, motivée, disponible et soutenue par une forte volonté politique de réaliser le projet ;
-Œuvrer pour un projet bancable qui repose soit sur des recettes générées par l'exploitation d'entreprises soit des paiements publics adossés à des contreparties crédibles ;
-Un budget public défini en amont et validé par les instances décisionnaires ;
-La personne publique (État par exemple) devra être solvable et honorer ses engagements à travers des organismes institutionnels comme un bailleur de fond surtout quand on est en face de contrats de PPP de longue durée.
-Les risques transférés à la personne privée doivent correspondre à des risques qu'elle peut maîtriser (savoir-faire expérience) ou peut encadrer (instruments de couverture, provisions, garanties) ;
-Le contrat doit être clairement rédigé et de manière équilibrée en s'appuyant sur des standards internationaux ;
-En plus, le gouvernement veillera à faire en sorte que nous ayons un cadre fiscal suffisamment adapté aux partenariats publics-privés.
Les conditions et impératifs susmentionnés constituent la clef de voûte indispensable pour pouvoir bientôt offrir à tous nos concitoyens les infrastructures nécessaires à leurs bien être.
Rêvons tous demain de construire d’hôpitaux exemplaires sur le plan national, sous régional, régional et international. De construire des universités capables de former des cadres ayant une expertise à l’échelle internationale. Nous sommes en mesure de construire en tant que château de l’Afrique de l'ouest des barrages hydroélectriques nous permettant de satisfaire notre demande intérieure et d'en revendre à nos pays voisins. Qu'attendons-nous pour trouver des partenaires fiables pour résorber nos problèmes de fourniture d'eau et d’électricité ?
Rien ne prouve que nous ne serons pas en mesure demain de construire une autoroute reliant Conakry-Kindia ou de bitumer l'ensemble de nos routes régionales et départementales. Le Sénégal vient de prouver à travers l'autoroute à péage Dakar Diamnadio construite sous forme de « PPP » que rien ne peut vaincre la volonté politique. A la fin de cette année, le gouvernement Ivoirien va pouvoir inaugurer le Pont à péage Félix Houphouet Boigny long de 6 Km en plein cœur d'Abidjan.
Tout se fera à travers une volonté politique claire, fiable et crédible à l’échelle nationale et internationale.
Pour conclure, le développement des infrastructures en République de Guinée par le biais des « PPP » ne sera donc possible qu'avec une loyale collaboration entre les secteurs public et privé, les secteurs financiers et nos partenaires au développement.
C'est en elle-même que la Guinée et ses dirigeants dans une approche « PPP » maîtrisée en adéquation avec les besoins de nos concitoyens pourra devenir dans les vingt ans à venir, une terre de nouveaux conquérants et non une seule terre de conquête et pourquoi pas un pays émergent.
Dans l'espoir que les fruits respecteront les promesses des fleurs, j'espère contribuer à cette prise de conscience par cet appel.
SOUARE Mamadou Soumayé
Titulaire d'un master 2 Professionnel Management et Audit en Secteur Public à l'institut de Préparation à l'Administration générale (IPAG), Université de Poitiers en France
(Thème de mémoire : les PPP ; un instrument de développement en France et dans les pays d'Afrique Francophone.
E-mail : mohamedsouare@hotmail.fr
Créé le 27 octobre 2014 13:26
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