M’mah Doumbouyah, citoyenne de Dar Es Salam : « Ils vont tous nous tuer avant de nous déguerpir… »

CONAKRY-Le Gouvernement a-t-il reconsidéré sa décision de déguerpir les riverains de la décharge de Dar Es Salam pendant le mois de ramadan ? Alors que le début des opérations de déguerpissement était annoncé pour ce mercredi 8 mai 2019, les agents du département de la ville ont brillé par leur absence sur le terrain, au grand bonheur des habitants, a-t-on constaté.
Cette décision du Gouvernement avait suscité une vive préoccupation chez les riverains de la décharge. Interrogé ce jeudi 9 mai 2019, le ministre de la ville et de l’aménagement du territoire, Dr Ibrahima Kourouma a précisé que pour le moment aucune date n’est fixée. « On n’a pas donné de date. Quand on sera prêt, vous serez informés », a précisé substantiellement le ministre de la ville.
Cette précision des autorités met fin aux polémiques. Les occupants de la zone proche du dépotoir de Dar Es Salam ont un nouveau sursis. Jusqu’à quand ? Nous l’ignorons et les autorités n’ont donné aucun détail. Toutefois, il faut que les occupants sont déterminés à ne pas quitter les lieux quoi qu’il arrive tant qu’ils ne sont pas indemnisés de manière conséquente. Les 20 millions de francs guinéens promis par les autorités au titre de leur indemnisation sont jugés trop dérisoires par les 200 familles concernées.
C’est le cas de cette veuve que nous avons interrogée alors qu’elle était en larmes. Sous le choc, M'mah Doumouyah ne sait plus à quel saint se vouer en ce mois de Ramadan avec cette mauvaise nouvelle.
« Depuis au temps de Sékou Touré je suis là avec mon mari et j'ai dix enfants. Mon mari est décédé il y a 14 ans. Je fais le commerce pour s'occuper de mes enfants et petits enfants. Je n'ai personne pour m'aider. Nous ne partirons pas d’ici. S’ils veulent, ils n'ont qu'à nous tuer on acceptera. Aujourd’hui, on veut nous faire pleurer, mais on est là. Que Dieu nous aide en ce mois de Ramadan », sanglote M’mah Doumouyah.
« Ce Gouvernement ne nous considère pas comme des guinéens. Mais il doit comprendre que la roue de la vie tourne. Tu peux applaudir pour une personne aujourd'hui, demain elle prend un fouet pour te frapper. Je m'adresse au Professeur Alpha Condé. Quand on est président on doit parler à sa population pour comprendre comment elle vit. Mais il sait clairement que nous n'avons pas où aller. Même les réfugiés sont plus considérés que nous. On veut nous jeter et on préfère les ordures que nous. Ils ne nous déguerpiront que lors que nos maisons seront nos cimetières parce qu'on nous aura provoqués. Où on va aller pendant ce mois de Ramadan ? Difficilement j'arrive à subvenir aux besoins de ma famille. S'ils vont nous enlever ici, on va nous tuer d'abord dans nos maisons et ils prendront certains pour les enterrer à Sékhoutoureyah. On est ici jusqu'à ce qu'on nous donne la valeur de nos maisons parce que le dédommagement dont-ils parlent, c'est du mensonge », fustige M’mahDoumouyah.
Même colère chez ce jeune homme dont le père a construit leur maison depuis 1982. « Le président Lansana conté avait dédommagé les gens, Alpha Condé veut nous enlever ici par la force alors que, nous ne sommes même pas informés. Nous n’irons nulle part parce qu'on n’a pas où aller (…) Nous sommes des guinéens nous avons des droits. On ne va pas nous mettre dehors de la sorte. On est guinéen comme eux. Le gouvernement a pris cette décision comme si nous sommes des animaux sans venir voir sur le terrain les risques d’une telle action pendant le Ramadan. S'ils veulent ils n’ont qu'à venir nous tuer. Le dédommagement des 20 millions dont ils parlent cela ne suffit même pas leur carburant. Ils veulent nous faire sortir d'ici et nos enfants vont être des bandits. Le gouvernement devrait avoir pitié de nous parce que c’est même difficile pour nous de gagner à manger en ce mois de Ramadan », s'insurge Harouna Cissé.
Affaire à suivre…
Bah Aissatou
Pour Africaguinee.com
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Créé le 10 mai 2019 16:21Nous vous proposons aussi
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