Lansana Kouyaté tranche : » Quiconque part à ces élections contre Alpha… »
CONAKRY-Alors que plusieurs formations politiques de l'opposition ont annoncé leur candidature à la prochaine élection présidentielle, l'ancien Premier Ministre Lansana Kouyaté vient de briser le silence sur cette actualité qui défraie la chronique !
Le président du PEDN (parti de l'espoir pour le développement national) soutient que quiconque ira aux élections avec ou sans Alpha Condé, avec le système mis en place, va les perdre. Joint au téléphone depuis Paris où il réside, l'opposant s'est aussi exprimé sur les consultations engagées par l'UFDG de Cellou Dalein Diallo. Exclusif!!!
AFRICAGUINEE.COM : Quelle est la position de votre formation politique par rapport à la participation ou non à l'élection présidentielle du 18 octobre?
LANSANA KOUYATE : Vous connaissez la position du PEDN depuis. Parce que le PEDN a été le premier à dire si le Président de la République dont le mandat se termine au mois de décembre 2020, est candidat, ça veut dire qu’on n’a pas été fidèle à la constitution qui a été votée. L’argumentaire consiste à dire que : ce n’est pas une constitution qui a été votée par le peuple, c’est un faux argument. Parce que c’est nous qui avons demandé à ce que la junte militaire à l’époque accepte qu’on crée un Conseil National de Transition (CNT). Ça été créé. Et c’est nous qui avons demandé à ce Conseil, étant donné que la constitution a été abrogée par la junte, il fallait préparer une constitution nouvelle. On leur a donné l’expertise nécessaire. C’était nos représentants en même temps et ils ont adopté la constitution de 2010. Ensuite, nous nous sommes retrouvés entre nous et nous avons dit que quiconque d’entre nous est élu président, six mois plus tard doit soumettre cette constitution adoptée par le CNT aux suffrages universelles du peuple.
Mais lui (Alpha Condé, ndlr) il attend 7 mois avant la date de l'élection, ce qu'on ne voit nulle parle dans le monde, il fixe les élections le 18 octobre. Qui va aller à cette élection ? Qui va aller ? Est-ce que la Guinée veut continuer dans la dictature ? C’est les guinéens qui souffrent. Je le dis à tout le monde : que personne ne compte sur personne et que la Guinée aille comme ça. Quand les autres pays seront à cheval pour galoper, la Guinée tiendra la queue, et on finira par tomber.
Donc, la position du PEDN, elle est claire et elle est simple. Personne n’ira à cette élection avec Alpha pour que cette personne l’emporte, c’est Alpha qui va l’emporter. On dit qu’il est impopulaire, c’est vrai il est impopulaire. Même s’il a 0% de popularité aujourd’hui, on ira aux urnes, il va sortir et il va dire qu’il a gagné. Est-ce que vous êtes convaincus que cette nouvelle constitution a été adoptée par 89% des guinéens ? Ce ne sont pas des élections. Il faut se dire la vérité.
Ce n’est pas seulement Alpha. A supposer si par miracle, si par extraordinaire il dit qu’il n’est pas candidat, tout candidat qu'il présentera, puisque c'est ce dernier qui assure ses arrières-gardes, il bénéficiera du système. Il s’agit de démanteler un système. Le système électoral en Guinée est un mauvais système parce qu’il ne reflète pas la réalité. Dans un pays où on envoie même des policiers dans les isoloirs pour indiquer aux gens là où il faut signer. Et ils signent. Dans beaucoup d’arrondissements ça se passe comme ça. Surtout là où il n’y a pas beaucoup d’inspecteurs c'est comme ça. C'est ça une élection ? Si les guinéens veulent s’amuser avec ça, ils n’ont qu’à s’amuser avec. Mais on ne va pas compter sur nous pour ça.
Il y a tout de même l’UFDG qui a engagé des consultations pour sa participation éventuelle à cette élection présidentielle. Comment vous voyez cette démarche ?
Ce n’est pas d’abord l’UFDG qui était le premier. Le PEDN a fini sa consultation depuis longtemps. On a demandé à toutes les fédérations de nous envoyer leur avis. Ça été fait. Nous c’est une habitude au PEDN, on n’impose rien. Mais ces résultats on les a déjà. On n’a pas publié d’abord par respect pour l’harmonie du FNDC. On a même élargi la base de notre démocratie parce que les mouvements de soutien qui ne sont pas membres d'un organe du parti, ils ont voté. Je ne me suis pas contenté de ça. Le PEDN est le seul parti politique aujourd’hui qui réunit tous les militants sur une plateforme qu’on appelle famille PEDN. J’ai passé 8h en visioconférence avec le zoom, ils étaient partout. Chacun a posé ses questions j’ai répondu. Ceux qui disaient on va aller j’ai répondu, ceux qui disaient on ne va pas aller j’ai répondu. C’est normal parce que dans un groupe le jour où tout le monde dit "oui" il faut avoir peur. Le jour aussi où tout le monde dit "non" il faut avoir peur parce qu’il y a toujours une séparation des positions. Nous, on a commencé avant l’UFDG. Donc on croit à la consultation, nous avons consulté.
Mais un responsable politique quand la majorité de tes militants te dit "oui" allons à gauche parce qu’il y a deux chemins à prendre, à gauche ou à droite. Et que vous vous dites la majorité a choisi, allons là-bas. Si vous partez là-bas, c'est que vous avez respecté la démocratie. Parce que c’est la voix de la majorité. Mais si vous allez là-bas et que vous trouviez des faucilles, des serpents, que vous trouviez toutes sortes de dangers et que vos militants sont tués ce n’est plus la faute de vos militants qui vous ont dit d'aller là-bas. C’est vous qui avez manqué de responsabilité. C’est là où il y a la différence entre responsabilité et majorité, responsabilité et démocratie.
Les américains le savent mieux que quiconque. Aux Etats-Unis dans le vote pour l’élection présidentielle, le peuple vote mais en réalité c’est les grands électeurs qui sont désignés en fonction de leur vote, c’est ce qu’on prend. C’est ce qui fait élire le Président, ce n'est pas le vote populaire. Sinon Al Gore (ancien vice-président des Etats-Unis, ndlr) a eu plus de voix quand on fait les décomptes populaires. Mais ses voix ne correspondaient pas au vote des grands électeurs. Hillary aussi c'était la même chose. Elle a remporté le vote populaire, mais ce qu'elle n'a pas remporté, c'est le vote des grands électeurs.
Comment peut-on interpréter ça ? C'est que depuis le départ, les américains ont dit si la démocratie consiste à suivre bêtement ce que les populations disent et que les responsables conscients des enjeux ne guident pas, n’orientent pas alors la démocratie ne vaut pas la peine d’être respectée. Voilà un exemple type.
Donc, si vos militants vous disent allons-y c’est vous qui devez savoir s'il faut aller ou pas. Parce que c’est pour ça que vous êtes là comme responsable, c’est vous qui devez les guider. C'est vous qui devez dire voilà les inconvénients de partir. Or, aujourd’hui quiconque part à ces élections contre Alpha et surtout le système qu’il a mis en place, il va perdre. Si lui-même un jour il déclare par extraordinaire je ne suis pas candidat mais c’est tel qui va représenter le RPG, quiconque ira contre c’est tel-là, il va échouer. C’est tout.
A suivre…
Entretien réalisé par Diallo Boubacar 1
Pour Africaguinee.com
Tél. : (00224) 655 311 112
Créé le 31 août 2020 12:11
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