Koulé: Comment le procès de Dadis et Cie est suivi…
N’ZÉRÉKORÉ- C’est un procès historique dont l’écho retentit au-delà des frontières guinéennes. Celui des auteurs présumés du massacre du 28 septembre 2009. Lors de ces atrocités commises il y a treize ans, plus de 150 civils, venus répondre à un appel à manifester des forces vives à l’époque au grand stade de Conakry, avaient trouvé la mort, une centaine de femmes violées, des dizaines de portés disparus et plus d’un millier de blessés, selon l’ONU.
Parmi les accusés à la barre, l’ancien président au moment des faits, Moussa Dadis Camara. Son audition fleuve a été scrutée dans les quatre coins du pays. Comment ce procès est-il suivi dans le village du capitaine Dadis, Koulé ? Quelles sont les attentes des citoyens à l’issue de ce procès ? Africaguinee.com y a fait une immersion.
Jeudi 09 février 2023, nous sommes à Koulé Yakéta, village qui a vu naître Moussa Dadis Camara, il y a de cela 59 ans. Le climat est doux, les citoyens accueillants vaquent à leurs occupations. Dans cette commune rurale de la Guinée forestière, située à cheval entre Macenta et N’Zérékoré, Moussa Dadis Camara n’a perdu une once de sa popularité.
Les habitants lui gardent encore dans leurs cœurs. Le procès est suivi de près. Et, chacun a sa lecture de ce jugement dont le dernier accusé est à la barre depuis lundi dernier. Mais c’est beaucoup plus le passage de Dadis Camara à la barre qui retient l’attention.
Chez les citoyens interrogés, ils croient dur comme fer à la thèse de complot dont aurait été victime leur chouchou (Dadis Camara). L’ex chef de la junte est décrit comme un homme affable, intègre qui a voulu du bien pour le pays. Là, l’on croit fermement que M. Camara sera acquitté et accomplira le destin que la providence lui a réservé. Prendre les rênes de la Guinée, à l’issue d’élections libre et démocratique.
Daniel Koulemou a connu Dadis Camara depuis son enfance. Il se dit étonné d’apprendre que cet homme soit impliqué dans la commission de crimes aussi graves. Il souhaite d’ailleurs que le procès se termine bien afin de permettre à son frère d’être élu démocratiquement président de la République de Guinée.
« Dadis dont on est en train de parler, depuis que je l’ai connu à l’enfance, je n’ai jamais entendu quelque chose de mal venant de lui. Il aime tout le monde. Ici à Koulé, nous qui l’avons connu et côtoyé nous sommes très étonnés d’apprendre qu’il serait lié à ce massacre. Jusqu’à preuve du contraire, pour nous, il n’a pas fait de mal, il se battait plutôt pour que le pays puisse aller de l’avant. Mais ce sont ses ennemis qui ont fait qu’aujourd’hui qu’il se retrouve dans cette situation. Ils ont ourdi un complot contre lui. Donc, tous les jours, je prie le bon Dieu que la vérité jaillisse dans cette affaire », lance Daniel Koulemou.
Rencontré à son domicile, M. Raphael Kolié, affirme avoir observé attentivement l’attitude des avocats de Toumba Diakité un des coaccusés de Dadis, qui selon lui, font tout pour enfoncer l’ancien président.
« Lorsque j’ai suivi les interventions de Dadis Camara, quelque part on lui posait certaines questions qu’il arrivait à répondre. Mais quelquefois aussi il y avait des questions, on dirait qu’elles ont été préparées contre lui pour pouvoir le nuire. Lorsqu’un jour j’ai vu l’avocat de Toumba lui demander s’il avait donné l’ordre pour aller au stade, tandis que Dadis avait dit qu’il n’était pas informé du départ de Toumba pour le stade, je me suis interrogé sur le but recherché par cet avocat. Dadis était un homme intègre, il faut se dire la vérité.
Mais en son temps, l’armée n’était pas unie. L’armée était un peu trop disloquée. J’ai suivi aussi le témoignage de quelqu’un qui a dit que lorsque Dadis devait partir normalement au Sénégal, il n’est pas parti au Sénégal mais plutôt au Burkina. Tout cela, c’était surtout le complot du doyen (Alpha Condé, ndlr). Dadis a même dit que c’était le complot du doyen.
Quand des gens disent que Dadis avait formé des gens à Kaléya afin d’aller tuer des gens au stade, j’étais très étonné. S’il avait pris une telle initiative, pourquoi alors dans un témoignage ils ont dit qu’il a même pleuré lorsqu’il a appris qu’il y a eu des meurtres, des tueries dans le stade du 28 septembre ? Je trouve ça contradictoire. Dadis est un homme intègre il faut se dire la vérité », confie Raphael Kolié enseignant de profession.
Pour lui, le seul tort de Dadis aura été celui d’être à la tête du pays au moment des faits. Il dénonce une justice à géométrie variable lorsqu’on sait, rappelle-t-il, qu’il y a eu les tueries de Zogota en 2012 sous l’ère Alpha Alpha Condé qui n’a jamais été entendu sur ces crimes. Mieux, ce citoyen de Koulé ne comprend pas pourquoi l’on met à la même barre Toumba Diakité et Dadis Camara. « Quelqu’un qui a osé tirer sur une personnalité, aujourd’hui on le met en comparution avec sa victime pour discuter, c’est hallucinant », dénonce-t-il saluant le déroulement paisible du procès.
« Nous sommes en train de voir quand même un déroulement paisible du procès. Et, le monde entier est en train de voir ce qui se passe’’, martèle Raphael Kolié.
Abondant dans le même sens, Fassou Koukemou, un autre citoyen de Koulé affirme que Dadis Camara, dit la vérité. Il remercie le colonel Mamadi Doumbouya qui a eu le courage d’ouvrir le procès, treize ans après le massacre.
« Nous sommes renseignés, c’est un complot qui a été ourdi contre Dadis. Et dans ses explications, on sait maintenant que la vérité est là. Le tribunal doit faire son travail et on attend le verdict final. Moi je suis très content de la sortie de Dadis parce que la vérité sort de sa bouche et nous nous savons que c’est la vérité qu’il est en train de dire. En fin de compte nous attendons que la vérité soit dite dans ce procès », confie Fassou Koulemou.
« Après tout ce que j’ai vu à la télé, moi je vois que Dadis n’a aucun problème sur lui. Par rapport au problème du 28 septembre Dadis n’était pas là-bas ce sont des gens qui ont montré des pièges contre lui. Il n’était pas là-bas et il n’a ordonné à aucune personne d’aller là-bas. Après tout ce jugement moi je souhaite que Dadis soit notre président ici en Guinée », ajoute Foromo Gbamou
Cette mère de famille n’a pas le temps de suivre le procès. Elle n’a ni télé, ni radio à la maison. Préoccupée par ses activités champêtres, sa seule prière est de voir le procès prendre fin dans de meilleures conditions pour permettre à Dadis de vivre désormais libre sur sa terre natale, même s’il n’est plus président.
« Après ce procès, moi je désire que Dadis puisse revenir et vivre en paix en Guinée même s’il n’est pas président », souhaite Thérèse Gbamou.
De retour de Koulé,
SAKOUVOGUI Paul Foromo
Correspondant régional d’Africaguinee.com
A Nzérékoré
Tél : (00224) 628 80 17 43
Créé le 11 février 2023 15:05Nous vous proposons aussi
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