Immigration: le gouvernement Merkel vacille à nouveau
Les incidents de Chemnitz en Allemagne ont rallumé jeudi le conflit au sein du gouvernement autour de la politique migratoire, avec une passe d'armes entre la chancelière Angela Merkel et son ministre de l'Intérieur.
Deux mois seulement après avoir évité l'éclatement de sa coalition sur le sujet, la chancelière allemande au pouvoir depuis 2005, tenante d'une ligne modérée en Europe sur les réfugiés, se voit à nouveau fragilisée sur sa droite, au moment où se profilent des élections régionales très importantes en Bavière en octobre.
Le ministre de l'Intérieur Horst Seehofer, président du parti bavarois très conservateur CSU – en principe allié à celui de centre-droit d'Angela Merkel (CDU) – a de nouveau tiré à boulets rouge à la suite des manifestations et incidents qui se sont déroulés à Chemnitz.
«La question migratoire est la mère de tous les problèmes dans ce pays», a-t-il déclaré au quotidien régional Rheinische Post, ajoutant défendre cette position «depuis trois ans», à savoir depuis la décision d'Angela Merkel de laisser entrer plusieurs centaines de milliers de demandeurs d'asile en Allemagne.
Il a aussi pris la défense des manifestants à Chemnitz qui ont protesté après le meurtre à l'arme blanche d'un Allemand, dont sont soupçonnés plusieurs demandeurs d'asile. Le ministre a affirmé «qu'en tant que citoyen», il serait «aussi descendu dans les rues» de la ville.
Plusieurs rassemblements à l'appel de la droite ultra, organisés pour dénoncer la criminalité dont seraient responsables les migrants, et la politique migratoire d'Angela Merkel dans son ensemble, ont donné lieu à des échauffourées, faisant plusieurs blessés.
Appel à la démission
Peu après, Angela Merkel a pris ses distances avec son ministre. «La question migratoire nous pose des défis. Avec elle, il y a des problèmes mais aussi des succès», a-t-elle affirmé dans une interview à la chaîne de télévision RTL Allemagne.
Elle a estimé, à l'inverse de M. Seehofer, que les manifestations répétées de l'extrême droite à Chemnitz avaient été marquées par des «débordements qui ne sont pas tolérables, remplis de haine et visant des personnes». Elle faisait allusion à des agressions de migrants dans la rue ou des défilés de néonazis faisant le salut hitlérien.
M. Seehofer a reçu le soutien du dirigeant du parti d'extrême droite, Alternative pour l'Allemagne (AfD) Alexander Gauland, à l'origine de la plupart des rassemblements de Chemnitz.
«Il a tout à fait raison dans son analyse», a-t-il commenté, tout en affirmant que «Seehofer se bat pour conquérir des voix» pour les élections régionales en Bavière du 14 octobre, où la CSU est menacée par la poussée de l'AfD et risque de perdre sa majorité absolue au parlement régional.
En revanche, le ministre a été vertement critiqué par les sociaux-démocrates, qui complètent la coalition gouvernementale tripartite d'Angela Merkel.
La présidente du parti, Andrea Nahles, a reproché au ministre bavarois de «ressusciter les conflits internes CDU/CSU que nous avons connus avant l'été».
Une autre cadre du parti, Natascha Kohnen, a elle demandé le départ de M. Seehofer: affirmer qu'il aurait manifesté en tant que citoyen à Chemnitz rend «intenable» selon elle son maintien au gouvernement.
La gauche radicale a, elle, ironisé sur le ministre «père de tous les problèmes liés au racisme».
Sondages défavorables
Depuis trois ans, Angela Merkel ne parvient pas à faire durablement baisser les tensions politiques autour de la questions migratoire en Allemagne, à l'origine d'une entrée en force de l'AfD à la chambre des députés il y a un an.
La décision d'accueillir des migrants n'est pas soutenue par la population qui souhaite dans une écrasante majorité, selon des sondages, que le rythme des expulsions s'accélère. Plus d'un sondé sur deux (56%) est contre la politique migratoire du gouvernement, selon une étude INSA pour le quotidien populaire Bild publié vendredi.
Début juillet, Mme Merkel avait réussi in extremis à éviter l'éclatement de sa coalition gouvernementale déjà à cause d'un conflit avec son ministre de l'Intérieur qui réclamait le refoulement à la frontière des demandeurs d'asile déjà enregistrés dans un autre pays de l'UE.
Depuis, son gouvernement s'efforce de conclure des accords bilatéraux avec les pays européens sur ces reconduites. Avec des résultats mitigés.
AFP
Créé le 10 septembre 2018 10:27Nous vous proposons aussi
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