Ibrahima Chérif Bah : « Ce qu’Elhadj Sékhouna doit comprendre… » (Interview)

Ibrahima Chérif Bah, vice-président de l'UFDG chargé de la communication et des relations extérieures

CONAKRY- L’union des forces démocratiques de Guinée (UFDG) va-t-elle se plier à l’exigence du Kountigui de la Basse Côte en changeant Abdoulaye Bah son candidat à la présidence de la mairie de Kindia ? Comment le parti de Cellou Dalein entend-il contrôler les communes de la Basse Guinée après l’accord stratégique signé entre l’UFR et le RPG Arc-en-ciel ?


Le vice-président de l’UFDG chargé de la communication et des affaires extérieures tranche ! Ibrahima Chérif Bah qui s’est confié à notre rédaction invite le chef coutumier de la basse Guinée à rester en dehors de la politique. Dans cette interview, l’ancien gouverneur de la Banque centrale parle également du bail du Port autonome de Conakry et de ses conséquences. D’autres sujets d’actualités sont également évoqués dans cet entretien. Exclusif.  

AFRICAGUINEE.COM : Quelle lecture faites-vous de la sortie polémique de l’imam de Kindia, Elhadj Mamoudou Camara qui aurait affirmé qu’un étranger ne doit pas diriger la commune de la capitale de la Basse Guinée ?

IBRAHIMA CHERIF BAH : Ces genres de propos sont entièrement rétrogrades, condamnables et inacceptables dans ce pays. Quand un imam par ailleurs ami à Alpha Condé dit ceci, c’est qu’il fait la politique de notre professeur national. C'est-à-dire diviser pour régner et faire perdre du temps aux guinéens. C’est inacceptable. Si c’était un papier, je l’aurais déchiré et jeter sur sa figure. Je suis né à Koba ici, mais personne n’ose me dire là-bas que je suis étranger. C’est même énervant. Comment peut-on dans un pays où on élit président quelqu’un de père Burkinabé, de mère malienne né en Guinée, grandi en France et que quelqu’un ose dire à un autre citoyen né à Kindia qu’il est étranger ? C’est abominable et inacceptable.

Cellou Dalein Diallo est intervenu pour faire annuler la plainte qui visait  l’imam. Pourquoi ?

Dans ces genres de cas, ce n’est pas nécessaire de porter plainte. Nous laissons la société civile s’en occuper.

L’imam Elhadj Mamoudou Camara accompagné du député de Kindia se sont rendus à Tanéné chez le Kountigui de la Basse Guinée, Elhadj Sékhouna Soumah qui a demandé à l’UFDG de changer monsieur Abdoulaye Bah. Que fera l’UFDG face à cette exigence ?

C’est anachronique. Nous ne souhaitons pas qu’il se mêle de ça. C’est une question politique et non une question sociale, communautaire ou communautariste. Le Kountigui doit être en dehors de ça. Kindia a voté pour Abdoulaye Bah. Il sera le maire de la commune urbaine de Kindia puisque c’est le choix des populations.

L’UFR et le RPG arc en ciel ont signé un accord stratégique pour contrôle des mairies notamment en Basse Guinée. Comment l’UFDG devrait-il s’en sortir après cet accord?

Il faut d’abord distinguer deux types d’accords. Il y a un accord que l’opposition a signé avec la mouvance pour régler le contentieux électoral. C’est un accord politique pour la paix dans le pays. Nous avons fait des concessions, ils en ont fait aussi. Les alliances, ce sont des accords entre les partis politiques pour le contrôle de certaines localités. Là aussi nous avons constaté des choses qui sont absolument anormales. Quand un parti dit d’opposition signe une alliance avec un parti au pouvoir, c’est anachronique. Cela montre que le parti qui a signé ça n’est pas vraiment opposant.

Dans le cadre de la Basse Guinée, cela nous gêne un peu dans la mesure où un opposant s’est allié au parti au pouvoir pour essayer de dominer les communes, mais nous à l’UFDG, on est serein. Nous savons que la base des partis reste de l’opposition. Ces gens vont simplement ignorer la consigne donnée par leur chef.  Nous estimons que les élus ne suivront pas les signatures faites en dehors d’eux.

Accessoirement, l’alliance entre l’UFDG et l’UDG, l’UFDG et RDIG bat de l’aile. Ils n’excluent pas de rejoindre le parti au pouvoir si jamais vous ne vous entendez pas.

Nous ne sommes pas pour le chantage, nous sommes pour une collaboration franche entre les partis politiques. Des partis qui ont des accords depuis longtemps bien avant les communales doivent mettre en avant ces accords-là avant toute chose. Nous pensons que notre parti l’UFDG est ouvert au dialogue. Nous sommes un parti démocratique qui est en train de négocier avec ses alliés pour arriver à contrôler et gérer les communes d’une autre manière. Nous invitons simplement les partis qui sont de l’opposition de rester sur la ligne de l’opposition et de cesser de flirter avec le RPG arc en ciel qui ne fera que les rouler dans la farine.

Jusque-là l’on ne voit aucun acte concret de votre part. Dites-nous comment l’UFDG travaille-t-elle pour avoir des alliés ?

Nous ne cherchons pas à faire du bruit, mais nous travaillons à la base. Nous sommes sereins.

Ne craignez-vous pas d’être isolés si vous perdez notamment Mamadou Sylla, Jean Marc Teliano ?

Cette affaire d’isolement, c’est un faux problème. Quand un parti politique est en passe de contrôler la commune de Sansalé situé au nord-ouest de la Guinée à la frontière avec la Guinée Bissau, quand il a conquis la commune de Tounkarata au sud-ouest de la Guinée à Lola et ailleurs, quand il contrôle 56% des communes de Conakry, quand il contrôle Kindia, Dubreka, où est l’isolement ? Je veux que les gens cessent d’user de ce mot. L’UFDG est un parti national qui dans un vote transparent peut avoir 65% des suffrages. Nous sommes loin de l’isolement.

A Kindia, est-ce qu’il n’y a pas un risque de retournement de situation lors qu’on sait que l’UFR allié du RPG veut présenter un candidat pour occuper le poste de maire ?

J’exclue cela. Je ne pense pas que l’UFR va présenter un candidat à Kindia d’autant plus que dans leur accord ceci n’est pas prévu. Ce serait inqualifiable. L’UFDG contrôlera totalement la commune urbaine de Kindia quelque soit ce que les gens disent par ailleurs.   

Monsieur Sorel Bangoura est convoqué  ce lundi devant la Justice. Avez-vous un mot d’ordre adresser à vos militants ?

Nous disons que monsieur Sorel Bangoura, notre candidat de Matam n’a rien dit de mal. Il n’a pas parlé que des faits. Rappelez-vous qu’il y a un arrêt de justice ici qui date de 1971 qui condamne quelqu’un pour un certain fait, il y a aussi sous le régime du Général Lansana Conté, une condamnation qui a frappé quelqu’un. Je pense que les faits historiques sont là et son têtus. Les gens iront voir ce qui se passe et écouter ce que la justice va dire dans le calme.

Ousmane Gaoual estime que cette convocation est une « foutaise » à l’encontre de l’UFDG qui enregistré près de 100 morts dans des manifestations politiques sans que la justice n’enquête pour punir les auteurs. Avez-vous le même avis ?

Parlant de morts, je réaffirme que l’UFDG va continuer à réclamer justice pour les 94 disparus, tués par balles. Ce sont des crimes imprescriptibles. Ils ne resteront pas impunis. Parlant de la convocation, je soupçonne ce régime du RPG arc-en-ciel d’utiliser toutes les subterfuges possibles pour nous faire perdre du temps. Il y a presque trois semaines que le contentieux électoral a été vidé. Qu’est-ce qui empêche l’installation des conseillers communaux et ruraux. Nous les avons vu en train de danser la Mamaya à Kankan alors qu’il y a des priorités nationales urgentes.

Le régime est en train de préparer un glissement du calendrier électoral en Guinée. Ceci sera extrêmement grave et sera cause de trouble dans ce pays. C’est certain. Leur stratégie est de nous faire perdre du temps, créer des épiphénomènes pour berner les gens. Je crains que ce régime ne prépare un glissement du calendrier électoral. Ce serait inacceptable. L’UFDG n’acceptera pas cela. Nous voulons que les choses soient faites à bonne date. En février 2019 au plus tard qu’il y ait les élections législatives et en 2020, qu’il y ait les élections présidentielles. Nous ne voulons pas un schéma à la Kabila.

Avez-vous des ambitions de diriger le Conseil régional de Conakry quand on sait que l’UFDG est arrivé en tête dans la capitale lors des élections communales ?

Je ne peux dire tout de suite que j’ai cette ambition ou pas. Le parti a son programme.

Comment analysez-vous le contrat de bail du port autonome de Conakry à l’entreprise turque Albayrak ?

Disons que les conditions dans lesquelles le contrat a été fait sont mauvaises. Le gouvernement ne l’a pas examiné, le ministre de l’économie et des finances qui engage l’Etat financièrement n’est pas informé, l’Assemblée Nationale ne s’est pas prononcée sur le contrat. C’est un contrat entre la Présidence, la direction du port autonome de Conakry. C’est un contrat léonin, c'est-à-dire qu’il n’est pas du tout transparent. Il a été attribué sans appel d’offres international. C’est encore toujours le système Alpha Condé qui consiste à piller dans l’obscurité.

Il faut craindre un renchérissement  du port de Conakry par rapport aux ports voisins. Et en conséquences un coûte additionnel pour les guinéens ou alors, que les armateurs fuient le port s’il est cher par rapport aux autres. C’est un mauvais contrat. A notre avis, l’Assemblée Nationale devrait mettre son pied là-dessus et le bloquer. Elle doit prendre position dans toute affaire qui engage l’Etat de cette manière-là et faire en sorte que cela ne soit pas exécuté.

Le ministre des transports Aboubacar Sylla a avoué que le contrat n’a pas obéi aux règles en déclarant qu’il n’y a pas eu d’appel d’offres. Comment comprenez-vous cet « aveu » d’un ancien opposant qui jusqu’hier dénonçait ces genres de pratiques ?

Nous sommes déçus de constater qu’il se sent obligé de défendre quelque chose qui est mauvais. Et là, il est la tutelle de ce port. Il doit pouvoir avouer normalement qu’il n’a pas été associé et faire en sorte que ce contrat soit simplement bloqué. C’est tout.

Le contrat prévoit assez d’exonérations en termes d’impôt et de taxes pendant un certain nombre d’années. N’est-ce pas là une perte pour la Guinée qui vit sous perfusion des institutions de Breton Wood ?

C’est une perte  parce qu’une concession qui est faite sur 30 ans, si vous prenez 10 ans d’exonération d’impôt et de taxe, c’est extrêmement grave. Ce genre de contrat, nos partenaires au développement à savoir le fonds monétaire, la Banque Mondiale devraient même le dénoncer parce que les exonérations ne sont pas permises dans ces genres de choses. Nous cherchons de l’argent pour financer notre développement. On ne peut se permettre d’exonérer ce genre de contrat. Des montants importants devraient être payés. A mon avis c’est un contrat léonin. L’assemblée devrait mettre en place une commission parlementaire pour l’analyser et le stopper.

En tournée en Haute Guinée, le premier ministre Kassory Fofana a déclaré qu’en sept ans Alpha Condé a travaillé plus que les 50 ans des régimes précédents. Que vous inspire cette déclaration ?

Il s’est lourdement trompé. Il ne peut pas dire ces genres de choses d’autant plus que pour moi, la réalisation de ce régime actuel est basé sur du sable mouvant. Dès 2010 déjà ce régime a cassé le tissu social de la Guinée, base sur laquelle on doit tout construire.  Si moi je suis opposant aujourd’hui, c’est essentiellement à cause de ça. On ne peut pas accepter que le pays soit divisé, on ne peut pas accepter que quelqu’un vient monter les citoyens les uns contre les autres, pour des desseins politiques personnels.

Je considère que le Chef du gouvernement s’est lourdement trompé. Il faut qu’il cesse de tenir ce langage et qu’il avance sur d’autres chantiers qui sont plus fructueux. J’aimerai qu’il s’occupe mieux du dialogue social pour lequel la Constitution lui donne le plein pouvoir. Je souhaite qu’il attaque moins les syndicats et les partis politiques, car selon la Constitution ces derniers sont ses partenaires avec lesquels il doit discuter pour arriver à la paix qui est la base du développement en Guinée.

Interview réalisée par Diallo Boubacar 1

Pour AFRICAGUINEE.COM

Tel : (00224) 655 311 112          

 

Créé le 28 août 2018 09:59

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