Guinée : Nouvel « acte fort » du Colonel Mamadi Doumbouya

Colonel Mamadi Doumbouya, président de la transition guinéenne

CONAKRY-Le colonel Mamadi Doumbouya a envoyé un nouveau « geste fort » qui n’a jusque-là, pas de précédent. Ce 1er novembre 2021, le président de la transition de la guinéenne a « réhabilité » d’anciens officiers exécutés sous le régime de feu Ahmed Sékou Touré, puis enfoui dans des charniers aux pieds du Mont Kakoulima, dans la préfecture de Dubréka, ville périphérique de la capitale Conakry. Il s’agit du colonel Kaman Diaby, ancien officier supérieur de l’armée guinéenne, de Barry Dian Wadou et de Fodéba Keita, deux anciens hauts fonctionnaires.


Ce geste historique du colonel Mamadi Doumbouya entre dans le cadre de la réconciliation nationale, un des six piliers centraux de la transition. Des stèles ont été érigés sur les tombes où repose ces anciennes victimes du premier régime. On les avait obligés de creuser leurs tombes avant d’être fusillés. Ce lundi, les plus hautes autorités militaires, notamment le ministre de la défense nationale, le chef d'état-major des armées se sont recueillis sur les stèles construits en leur mémoire. Un acte qui soulage leurs proches.

Fodé Maréga, neveu de Kaman Diaby, fils d'une ancienne victime et actuellement membre de l'association des victimes du camp Boiro ne cache pas sa joie mêlée de tristesse. « C'est sous une forte émotion que j'ai suivi ce soir cette cérémonie d'hommage. J'hésitais entre les larmes et le plaisir. C'était l'une de nos principales revendications depuis un certain nombre d'années. On se battait pour une reconnaissance des crimes commis au nom de l'État par les responsables de l'époque. Aujourd'hui cette reconnaissance de Kaman Diaby et d'autres militaires exécutés au nom de l'État, nous soulage. Je peux dire que j'étais plein d'émotions », a-t-il réagi.

Fodé Bocar Maréga souligne que leur combat va continuer. Mais il parle déjà d’un grand pas franchi. « Il y avait beaucoup de militaires, près de 46, tous des hauts gradés qui ont été exécutés pendant ces périodes-là. C'était des militaires pour lesquels toute l'Afrique nous enviait. Donc c'est une étape qui a été franchie, on espère que lors de la construction de ces stèles-là, nous aurons une clôture au niveau de ces charniers. Et ces stèles vont nous permettre de mettre le nom de tous ceux qui sont dans ces charniers. Ça va nous permettre de localiser tous les autres charniers sur toute l'étendue du territoire. En plus il y a celui de Nongo, et de tous ceux qui sont connus aujourd'hui. Il faudra nous permettre d'avoir des stèles à la mémoire de tous ces gens pour qu'on puisse se recueillir sur la tombe de nos parents. C'est notre principale revendication au niveau de l'association des victimes du camp Boiro », explique l’ancien député.

Complot Kaman Fodéba

L'avènement du 5 septembre avec le CNRD à sa tête le colonel Mamadi Doumbouya leur permet de sécher un peu les larmes, ajoute-t-il. Selon lui, ce sont les fondateurs de l’armée, -plus de 44 soldats- qui avaient été exécutés. Cet ancien député rappelle que leurs parents avaient été exécutés dans ce qu'on appelait le complot Kaman Fodéba. À l'époque, selon lui, Sékou Touré avait cherché à régler des comptes.

« La première victime après l'indépendance était un voleur qui a été enterré vivant. Ensuite les premiers complots dès 1959, puis en 61 le complot des enseignants, en 64 celui des commerçants.  A l'époque, il avait estimé qu'il ne fallait plus libéraliser le commerce, le métier d'avocat etc. À chaque fois, qu'il y avait un complot on trouvait un élément qui allait avec. Ensuite en 1969, il y a eu complot des militaires. Parce qu'il y a eu le coup d'État au Ghana et au Mali. Sékou Touré s'était dit qu'il ne fallait pas attendre qu'il soit la prochaine victime, c'est ainsi qu'il a pris les devants et a fait exécuter toute la crème de l'armée guinéenne renseigne.

Il a pris des militaires et des civils. C'est dans ça que mon père a été pris et exécuté. On reprochait à mon père de n'avoir pas dénoncé une conversation qu'il aurait entendu entre son frère et son beau-frère. C'est ainsi qu'il a été pris et condamné à perpétuité. Arrêté en 69, il y a eu l'agression portugaise en 1970, et Sékou Touré s'est rappelé et a dit que tous ceux qui avaient été arrêtés en 69 savaient qu'il allait y avoir cette agression en 70, et que désormais, ils sont tous condamnés à des peines de mort. Mon père fut envoyé à Kindia et c'est là-bas qu'il a été exécuté. En 69 par exemple, Sékou Touré avait convoqué le tribunal populaire le 2 avril et le 3 avril une grande partie des prévenus étaient déjà exécutés », se souvient Fodé Maréga. 

Un combat pour sanctionner la violence d'État

”On se bat pour la réhabilitation de nos parents parce que ça été toujours une violence d'État face aux citoyens. Et cette violence d'État a été toujours accompagnée de l'impunité. Ça été toujours le cas. C'est pourquoi, nous sommes heureux de cette reconnaissance là pour permettre à la Guinée de lire son histoire, si on veut tourner page de cette histoire, il faut la lire correctement. Ce n'est que comme ça qu'on peut réconcilier les Guinéens. Il faut faire l'inventaire de toutes ces personnes qui ont été enterrées parce qu'il n'y avait pas que des militaires. Les Fodéba, Barry Diawadou qui étaient dans ce lot. Il y a eu plein d'autres gens qui avaient été exécutés et laissés dans des fosses communes. C'est l'occasion donc de revisiter tout cela et localiser tous ces charniers-là afin de les réhabiliter. Ça c'est une phase extrêmement importante car cela va montrer l'ampleur des dégâts qui se sont déroulés pendant ces années sombres », a indiqué Fodé Maréga.

 

Siddy Koundara Diallo

Pour Africaguinee.com

Créé le 2 novembre 2021 09:38

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