Guinée : La Défense de Cellou répond au procureur Souleymane Ndiaye…
CONAKRY-La Défense de l'opposant Cellou Dalein Diallo a répondu au procureur de la République près le Tribunal de Première Instance de Dixinn, Sidy Souleymane N’Diaye. Lequel a déclaré, lundi 24 mai, à travers un communiqué, que les mesures d’interdictions de sortie du territoire, prises contre certaines personnes, restent maintenues et qu’elles pourraient être étendues à d’autres. Interrogé par Africaguinee.com, maitre Salifou Béavogui, l'un des avocats qui assurent la défense de Cellou Dalein Diallo a déclaré que l'acte posé par le parquet de Dixinn ne repose sur aucune base légale. L'avocat a répondu à nos questions.
AFRICAGUINEE.COM : le Procureur de Dixinn Sidy Souleymane Ndiaye a annoncé lundi soir que les mesures d'interdictions de sortie du territoire sont maintenues et qu'elles pourraient être étendues à d'autres personnes. Quelle est votre réaction ?
MAITRE SALIFOU BEAVOGUI : Le collectif des avocats n’est pas surpris. Parce que cette affaire n’a jamais été gérée conformément à la loi. Cette affaire a été gérée en dehors de toute la réglementation et elle n’a obéi à aucune formalité. C’est pour cette raison d’ailleurs que nous avions décidé de suspendre notre participation du 10 février 2021 au 17 mai 2021 dans les différentes procédures en cours. Parce que ce n’est pas le droit qui s’applique, mais plutôt des humeurs et d’autres considérations qui guident la procédure.
Dans un Etat de droit, l’interdiction de sortir du territoire est strictement réglementée. L’article 15 de la loi fondamentale (la constitution ndlr) réglemente strictement l’interdiction de sortir du territoire. Dans les ouvrages des libertés publiques, l’interdiction de sortir est strictement réglementée parce qu’elle porte une atteinte grave à la liberté fondamentale qui est celle d’aller et de venir. Chaque guinéen est libre de sortir, de rentrer et de s’installer partout.
Aujourd’hui, nous ne savons pas qui a ordonné ces mesures d’interdiction de sortir du territoire ? A quelle date ces mesures ont-elles été ordonnées ? Contre qui ? Pour quel motif ? Sur quelle base ? Ces interdictions ont-elles été notifiées aux intéressés ? La réponse à toutes ces questions, c’est la négative. Donc, cela veut dire que nous ne sommes pas sur le terrain du droit. Parce que sur le terrain du droit, pour interdire à un citoyen de quitter le pays, tous ces paramètres doivent se retrouver. Toutes ces données doivent figurer dans la décision. Or là, c’est un dossier qui a été instruit.
Nos clients qui ont été arbitrairement empêchés de sortir ne sont ni poursuivis ni inculpés. Aucune disposition n’est respectée. Si c’était un dossier qui a été instruit, on aurait pu comprendre. Pendant l’instruction, si le juge d’instruction avait pris des ordonnances de placement sous contrôle judiciaire, en ce moment, ces ordonnances auraient pu figurer dans le dossier. Mais dans tout le dossier, il n’y a aucune trace, l’ordonnance de renvoi que nous nous avons n’indique rien. Et mieux, le bon droit exige que pendant la phase de l’enquête préliminaire, c’est-à-dire que quand le dossier est encore à la police où on réunit les indices, comme le procureur de la république est le directeur des enquêtes, en cette phase il peut interdire la sortie du territoire à un citoyen.
Mais dès que le dossier quitte la police et arrive au niveau du tribunal, le procureur donne une orientation au dossier, il saisit un cabinet d’instruction. En l’occurrence, seul le cabinet d’instruction, le juge d’instruction peut désormais prendre une ordonnance pour interdire une sortie du territoire. Le procureur tout ce qu’il fera dans un dossier qui est pendant devant la juridiction du jugement tendant à restreindre la liberté de la personne poursuivie ou non poursuivie est de nul et du nul effet. Si le procureur a décidé de saisir la juridiction du jugement, seule cette juridiction peut interdire la sortie du territoire.
Le communiqué du parquet ne repose sur aucune base légale, pour nous il n’est conforme à aucune disposition de la loi. Nous ne devons même pas porter un regard sur ce communiqué. Nous, nous voulons avoir des décisions qui matérialisent ce communiqué s’il existe ou s’il a existé. Le reste, c’est de la plaisanterie.
Le procureur a aussi annoncé que la programmation du jugement est imminente. Qu'en dites-vous ?
Le second volet tendant à la programmation du dossier, cela n’a que trop duré ! Ça ne doit pas être une chanson. Nous, même demain à 8h du matin, nous sommes prêts à défendre ce dossier parce que nous avons nos arguments. Pendant que le dossier est resté avec eux pendant 7 mois maintenant. C’est eux qui le manipulent à foison. Demain matin à 8h, si on le programme, nous pouvons démonter toutes ces accusations. Au lieu de dire que des dispositions sont en train d’être prises, nous pensons qu’on doit dire ‘’voici la date de l’audience, allons-y à l’audience’’.
En mars 2020 à N’zérékoré, le procureur de N’zérékoré avait fait signer une réquisition de ce genre pendant que le dossier était au cabinet d’instruction. Comme j’avais la réquisition, j’avais attaqué devant le cabinet d’instruction et on l’a annulé. Parce qu’à chaque fois que le dossier est devant le cabinet d’instruction, c’est seul le juge d’instruction qui peut désormais prendre des mesures coercitives et non le procureur de la république. A ce niveau ça le dépasse, il est une des parties au procès ou à la procédure. Donc, pour nous son communiqué-là c’est vraiment de la plaisanterie et nous, nous ne plaisantons pas. Le collectif est très au sérieux. Parce que nous avons nos clients qui sont privés de leur liberté de façon injuste et arbitraire. Au-delà des communiqués, c’est l’audience qui nous intéresse aujourd’hui.
Est-ce que votre client, Monsieur Cellou Dalein Diallo a pu entrer en possession de ses documents de voyage notamment son passeport ?
La procédure est pendante devant le tribunal de Mafanko. Nous avons marqué une toute petite pause suite au décès du procureur, mais le jeudi prochain le dossier pourrait passer à l’audience en référé.
A suivre…
Propos recueillis par Oumar Bady Diallo
Pour Africaguinee.com
Créé le 25 mai 2021 18:09Nous vous proposons aussi
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