Grippe aviaire en Guinée : Des œufs importés d’Europe mis en cause par des aviculteurs « déboussolés » par l’ampleur des ravages

Grippe aviaire en Guinée

COYAH- Depuis deux semaines, une forme grave de grippe aviaire décime des fermes avicoles situées dans les préfectures de Coyah et Forécariah, épicentre de l’épidémie. Les pertes subies s’évaluent à des milliards Gnf. Déboussolés par l’ampleur des dégâts qu’ils ont enregistrés, les fermiers avicoles interpelle le Gouvernement pour sauver un secteur qui était déjà l’agonie, à cause de l’épidémie de Covid 19 et de ses effets induits.


Interrogés par Africaguinee.com, ces fermiers pointent du doigts des « œufs » importés d’Europe d’être à l’origine de cette épidémie. Alors que la riposte continue sur le terrain pour circonscrire la propagation, dans les autres régions encore épargnées, les fermiers vivent dans la psychose.

Africaguinee.com a interrogé les acteurs de cette filière. Ils proposent des pistes de solution pour sauver d'autres fermes. Marcel Bamba estime ses pertes à plus de 850 millions GNF. Il décrit un vrai désastre économique. Ses employés risquent de se retrouver au chômage alors qu’aucune perspective rassurante ne pointe à l’horizon.

« Il y a deux semaines de cela depuis que nous avons commencé à ressentir cette épidémie dans nos fermes. C’est une ferme qui a été contaminée. Mais ça n’a pas été déclaré à temps et puis l’épidémie s’est propagée dans d’autres fermes quelques jours après dans la zone de Kakoulimaya. Du coup, l’État à travers le ministère de l’élevage a commencé l’abattage. Mais ils ont un peu trainé avant de venir.  Ils ont juste dit qu’il y a une épidémie de grippe aviaire et qu’il fallait chercher le type de grippe parce qu’il y en a plusieurs.  Les échantillons sont envoyés vers l’Europe pour déterminer le type. En attendant, on peut estimer que c’est une forme complexe et grave parce qu’une fois la grippe aviaire arrive, dans votre ferme quelques jours après vous perdez toutes les poules pondeuses.

Le gouvernement est prévenu malheureusement il n’y a pas une équipe suffisante sur le terrain pour répondre aux attentes des fermiers avicoles. Aucune cellule de crise n’est mise en place alors que la plus grande partie des fermes avicoles est attaquée. Sinon une fois que la maladie touche une zone on la met en quarantaine sur 10km on abat toutes les poules, ça circonscrit déjà l’épidémie, elle ne se propage plus. Malheureusement, lorsqu’on dit qu’un seul fermier est touché, les services compétents prennent au moins une semaine avant d’intervenir.

A côté, il n’y a pas eu de communication claire sur le sujet. C’est pourquoi il y a certains qui ne veulent pas perdre leur argent. Ils peuvent égorger leurs poules, les déplumer et les mettre sur le marché ; c’est dommage. C’est comme si la réaction tardive de l’État est en train de pousser d’autres à être dans l’illégalité. Si l’État dit clairement : une fois qu’il y a une suspicion chez vous, déclarez.  On viendra abattre les bêtes pour sauver d’autres. Et, nous allons verser le montant équivalent. Imaginez quelqu’un qui a une bonne information comme, il ne prendra pas le risque d’aller revendre les poules malades pour minimiser les pertes. Dans ma ferme j’ai déclaré moi-même volontairement, j’ai passé 3 jours derrière eux » regrette Marcel Bamba aviculteur.

Abdoulaye Barry est également gestionnaire de ferme dans la zone de Coyah, il n’arrive pas à se remettre des dégâts.

« Pour le moment, nos anciennes fermes sont indemnes mais nous craignons qu’elles soient touchées parce Coyah n’est pas assez grand, nous avons là plus de 30.000 poules.  C’est notre nouvelle ferme avec des poules entretenues depuis 4 mois maintenant qui est touchée. Ces poules pondeuses n’ont pas fait les premières pontes. Déjà, 3.211 sont mortes d’abord sur 4600. Les autorités sont venues abattre celles qui sont estimées malades. Nous avons subi d’énormes pertes. Huit cent  et quelques sont mortes d’elles-mêmes, les autres sont abattues par les vétérinaires ensuite incinérées.

Nous sommes curieux de savoir quelle sera la suite, mais la menace est réelle sur le terrain. Le circuit est très vaste, des producteurs d’aliments, de nous fermiers, les vétérinaires, les transporteurs jusqu’aux détaillants y compris le consommateur, c’est des milliers de personnes qui vivent de cette activité qui risquent de se retrouver sans rien faire désormais. Le chômage guette tout le monde dans le secteur »

Les pertes subies par MARCEL Bamba se chiffre à plus centaines de 800 millions GNF sans comptabiliser les investissements de départ. Comme tous les autres fermiers, il comptait sur la prochaine fête de tabaski pour écouler sa production et recouvrir les investissements. Désormais, tous les regards sont tournés sur le gouvernement de transition pour sauver le secteur menacé.

« En 2 semaines, j’ai perdu 6300 poules pondeuses. Derrière, il y a un investissement énorme. Ce sont des poules qui étaient en phase de ponte qui sont attaquées après 4 mois et demis de financement. Il faut 135 millions de francs au moins pour nourrir 1000 poules pondeuses par mois. Imaginez maintenant : 6300 volailles et faites le calcul pour évaluer les pertes subies. J’estime mes pertes subies à hauteur de 850 millions. Toutes mes économies et mes prêts bancaires sont partis dans ce projet. Vous comprendrez le désastre économique auquel nous sommes confrontés présentement. J’ai perdu plus de 600 millions en nourriture seulement sans compter mon investissement de départ. Car il faut construire le bâtiment, faire un forage, c’est des zones reculées, il faut l’électricité pour l’éclairage qui est indispensable dans la ponte, l’énergie solaire m’a beaucoup coûté. Le bâtiment aussi c’est autre chose ; imaginez où il faut mettre 7000 poules pondeuses.

J’avais 7 travailleurs qui sont maintenant au chômage technique, il y a des grands fermiers qui peuvent employés beaucoup plus. A côté des pertes il y a le chômage qui se crée. J’ai perdu plus de 2000 poules avant l’arrivée des vétérinaires du ministère. Ils sont venus abattre à leur tour 4319 têtes devant moi. Ils ont fait comptabiliser tout pour documenter.  Ils m’ont remis un papier ou tout est marqué, le reste ils ont introduit dans un ordinateur. Pour ce qui est l’indemnisation ou l’accompagnement ils n’ont rien dit. Une poule mange 120 grammes par jour, c’est la quantité requise.

Ce que je demande au président de la Transition, il faut que le gouvernement fasse une bonne communication autour, il y a des fermes qui ne sont pas touchés d’abord. Ça peut les sauver. Les produits venant de ces fermes ne souffrent d’aucuns problèmes ; il suffit de donner les bonnes informations. Les produits locaux sont authentiques ; l’origine de cette maladie vient des produits importés ; des œufs et des carcasses importés ; c’est pratiquement les œufs importés de l’Europe qui sont à la base de la maladie chez nous. Des femmes achètent ces œufs au marché ; nous aussi on les livre on se frotte, du coup on vient contaminer nos fermes sans nous rendre compte. Donc, il faut interdire les œufs importés et nous voulons être indemniser afin de relancer nos activités » plaide Marcel Bamba

La psychose touche les autres régions du pays. Mamadou Alpha Diallo, aviculteur installé à Labé craint le pire à l’image des autres fermiers. « Le vent qui souffle dans notre secteur est grave actuellement, investir sur une poule, les risques sont énormes même en temps normal sans maladie. Aujourd’hui, la grippe aviaire est là et les actions du gouvernement sont faibles par rapport aux enjeux et à l’ampleur de la maladie.

Face aux craintes de tout perdre, les aviculteurs vont sortir les poules, les revendre à vil prix. Or, si vous vendez une poule pondeuse à 25000 Gnf alors que vous avez investi entre 100.000 et 150,000gnf, la perte est visible. L’avantage de la poule c’est quand elle pond, si elle meurt sans pondre ou si elle est vendue par peur de maladie, le fermier est économiquement mort. Maintenant quelqu’un qui perd 5000 ou 10000 poules pondeuses. Nous sommes vraiment inquiets. Coyah est fortement touché. Certains parlent même de Kindia. Les mouvements se font dans tous les sens. Aidez-nous à sauver le secteur » s’inquiète Alpha Diallo qui garde encore les souvenirs du coronavirus qui laisse encore des traces dans leurs activités.

Affaire à suivre…

Alpha Ousmane AOB BAH

Pour Africaguinee.com

Tel : ( +224) 664 93 45 45

Créé le 25 mai 2022 14:32

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