Grève des enseignants : trouver une solution honorable et acceptable pour tous

Habib Yimbering Diallo

Trois semaines après l’ouverture officielle des classes, l’école guinéenne reste paralysée. Syndicat et gouvernement campent chacun sur ses positions. Le premier exige les fameux 8 millions comme salaire de base. Le second martèle qu’il est dans l’incapacité de satisfaire cette revendication.


Devant l’intransigeance des uns et des autres, une médiation est souhaitable pour désamorcer la crise. Même si celle que préconise le Premier ministre, qui fait recours à un chef traditionnel,est peu rassurante pour les enseignants. Demander à un chef traditionnel deprodiguer des conseils au « fils « de la Basse Côte revient à dire que ce dernier peut tout seul décider de mettre fin à la crise.

Alors que si le Premier ministre a des contraintes vis-à-vis des institutions financières comme le fond monétaire international, Aboubacar Soumah, lui aussi, a le couteau des enseignants sur la gorge. Il ne s’agit donc pas d’appeler quelqu’un pour lui dire de mettre fin à la crise comme s’il s’agissait de reprendre une femme qu’il a répudiée.

Dans le contexte actuel le gouvernement et le syndicat sont plus enclins à entendre raison. Le premier ne parvient pas mettre fin à la grève malgré tous les moyens connus et inconnus qu’il a utilisés. Le second veut une sortie honorable pour lui et acceptable pour les enseignants pour lever le mot d’ordre. Dans ces conditions, il ne sera pas difficile –ou tout au moins impossible- de rapprocherleurspositions. D’autant plus que les enseignants redoutent anxieusement le fameux gel de leur salaire

En analysant cette crise en profondeur, posons-nous la question suivante : la revendication des enseignants est-elle légitime et réaliste ? La réponse à ces deux interrogations dépend de quel enseignant il s’agit. Il est évident que, même payés 10 fois, certains enseignants n’auront pas été récompensés à leur juste sacrifice. Tout comme payés 10 fois moins d’autres ne mériteraient pas ce salaire. Il faut donc trouver le juste milieu.

Commençonspar ceux qui méritent ce salaire. Un enseignant qui a fait don de soi pendant 30 ans à former, à forger et à mouler les cadres de ce pays mérite tout. A la fois l’honneur et le bonheur. Tout ce que ce pays compte de sommités, dans le public comme dans le privé, dans la science ou dans la culture, a été formé par ces enseignants.

Il arrive souvent qu’un ministre ou autre haut cadre croise son ancien maitre d’école, avec le même complet depuis près ou plus de 15 ans et qu’il le reconnaisse par cet ensemble. Dans nos villages ce dicton populaire est bien connu « le Tergal (tissu en polyester) ne s’use pas et l’enseignant ne le jette pas ».La Nation ne peut pas récompenser cet enseignant.

En revanche, d’autres ne méritent même pas les 8 millions même divisés par 10. Ce sont ceux pour lesquels l’enseignement est juste un moyen de se remplir les poches. Par tous les moyens, y compris la vente des notes. Un homme qui ne travaille que 16h par semaine peut-il prétendre à 8 millions de salaire ? Ou celui qui passe un quart de son temps au public et les trois autres quarts au privé. Même si, là aussi, il va peut-être au privé pour arrondir les fins de mois difficiles. Et que dire de celui qui travaille dans le privé ou en séjour à l’étranger mais qui continue à percevoir son salaire en complicité avec sa hiérarchie.

Il est donc important que les protagonistes dans cette crise mettent de côté leur égo pour discuter dans l’intérêt des enseignants mais aussi et surtout celui des enfants.

Le gouvernement, avec le concours du syndicat, devrait procéder à un contrôle strict et rigoureux de la présence des enseignants dans les écoles pour démasquer les fictifs et leurs complices. Ensuite partager leurs salaires à ceux qui travaillenteffectivement.

Il doit exiger que les enseignants mutés à l’intérieur du pays rejoignent leur poste pour toucher leur salaire. Et contrôler l’application effective de la mesure. Il est par exemple inacceptable que les pauvres citoyens payent un enseignant dit communautaire. Cette pratique est une illustration de la démission de l’Etat dans le secteur de l’éducation.

Ce dernier doit aussi mettre en œuvre une politique de motivation et d’encouragement pour l’enseignement. Orienter les meilleurs dans le secteur mais aussi leur donner un salaire qui leur permet de vivre correctement et honorablement. Même si les enseignants savent que celui veutêtre riche doit faire autre chose que l’enseignement.

En tous les cas, le gel de salaire ou le remplacement des grévistes par des nouvelles recrues constituent une véritable bombe à retardement. Pour caricaturer, c’est comme si, un homme, qui ne parvient pas à subvenir aux besoins de sa femme, répudie celle-ci sous le prétexte qu’elle demande trop de dépense pour la remplacer par une autre. Quand la deuxième arrive la première revient à la maison. Notre pauvre, incapable de dépenser une seule femme se retrouve avec deux.

Habib Yembering Diallo

habibydiallo@gmail.com

664 27 27 47

 

 

 

Créé le 23 octobre 2018 20:01

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