Grande interview : Le ministre de la coopération, Moustapha Koutoubou Sanoh parle…

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CONAKRY- Après la finalisation du processus de transition avec l’organisation des élections législatives, la Guinée ambitionne désormais de renforcer sa coopération avec les différents partenaires au développement. C’est ce qu’a déclaré en substance le ministre guinéen chargé de la coopération internationale, Moustapha Koutoubou Sanoh, dans une interview exclusive accordée à notre rédaction. D’autres sujets liés à l’actualité nationale ont aussi été abordés lors de cet entretien. Exclusif !!!


 
  AFRICAGUINEE.COM : Bonjour Monsieur le ministre !
 
 
MOUSTAPHA KOUTOUBOU SANOH:  Bonjour à vous !
 
  AFRICAGUINEE.COM : L’examen de la loi de finances 2014 par le Conseil Nation de la Transition a suscité une vive polémique au sein de la classe politique. Comment avez-vous accueillie la réaction de l’opposition qui a vigoureusement dénoncé cette décision du gouvernement guinéen ?
 
MOUSTAPHA KOUTOUBOU SANOH:Comme vous le savez bien, c’est un projet du gouvernement piloté par les ministères des finances et celui délégué au budget. Comme tout un chacun, nous avons le devoir de soutenir et de porter toute contribution possible pour que ce budget soit adopté par le conseil national de transition (CNT). 
 
Il est tout à fait normal que le budget d’un Etat soit discuté à un haut niveau. Un premier débat a eu lieu au mois de juin au CNT. Et cette loi de finances vient de nous donner aujourd’hui le feu vert de ce qui a été adopté et ce qui sera adopté par le CNT. Je crois que nous avons intérêt que ce budget soit adopté dans les meilleurs délais pour permettre au gouvernement de fonctionner dès le premier janvier 2014. En cas de retard avec le budget, il sera difficile pour l’Etat de s’acquitter de ses devoirs. Et comme vous le savez, l’année 2014 s’annonce avec beaucoup de défis pour la Guinée. Beaucoup de défis parce que nos relations de coopération avec nos partenaires techniques et financiers s’accélèrent davantage, et on a beaucoup d’investisseurs qui vont revenir. Ils étaient partis à cause de la situation qui prévalait sur le plan international. Ils étaient confrontés à beaucoup de difficultés. Nous souhaitons que l’année 2014 soit une année différente par rapport à ces miniers et autres investisseurs. La conférence d’Abu Dhabi était une occasion de rassurer les investisseurs afin qu’ils puissent revenir en grand nombre pour permettre à la Guinée de bénéficier des opportunités que nous avons, que ces opportunités soient traduites en projets porteurs de croissance pour le pays. 
 
Comme ce nouvel an s’annonce avec beaucoup de défis, il est important qu’on adopte ce budget.
 
  AFRICAGUINEE.COM : Mais l’opposition continue toujours à dénoncer “l’illégalité“ de l’adoption de ce projet de loi de finances par le CNT…  
 
MOUSTAPHA KOUTOUBOU SANOH: L’opposition est dans son rôle. C’est tout à fait normal qu’une opposition s’oppose. Ils sont dans leur rôle de s’opposer à certains projets, à certaines actions du gouvernement. Ce n’est pas la première fois que l’opposition exprime son mécontentement par rapport à certaines activités du gouvernement. Comme ils sont dans leur rôle, nous acceptons. Mais nous disons que l’Etat doit assumer ses obligations, ses responsabilités à savoir : négocier, communiquer avec l’opposition pour pouvoir vraiment sortir la Guinée de cette situation un peu difficile. Mais je suis sûr que l’article 157 de la constitution est clair. Il parle de l’installation, pas d’élection. Vous savez, le président de la République a été élu le 07 novembre 2010, mais il ne pouvait pas dire le lendemain que le Président de la transition devait quitter immédiatement le bureau et qu’il doit forcément commencer à fonctionner. Non, le président de la transition est resté jusqu’au 23 décembre, date à la quelle il a été installé dans ses fonctions. Après l’installation, on commence maintenant à assumer ses fonctions. Les nouveaux élus ont le droit, en 2014, d’avoir un regard sur tout ce qui a été décidé en 2013, en 2012, 2011, 2010, 1995… ça ne cause pas de problème. Moi je suis très étonné de voir que cela a créé beaucoup de problèmes, beaucoup d’interprétations, beaucoup d’émissions comme si c’est le seul budget que nous allons avoir en Guinée. En 2014 on aura un budget, en 2015 on aura, toutes les années on aura un budget et vouloir dire qu’il fallait attendre, que l’Etat ne doit plus fonctionner. Justement, c’est comme si on demandait à l’Etat d’attendre d’abord, de ne rien faire jusqu’à la tenue des élections législatives qui devraient être organisées depuis 2011. Si on disait que l’Etat devait s’arrêter jusqu’à l’organisation des élections législatives, je crois qu’on ne serait pas là où nous sommes aujourd’hui. Moi je crois que l’opposition est parfaitement en train de jouer son rôle. Que l’opposition soit toujours là, qu’elle soit omniprésente dans les activités du gouvernement, dans les projets du gouvernement, qu’elle puisse dire ce qui ne va pas et que le gouvernement sache qu’il y a une opposition sur place. Mais, je crois que le gouvernement n’a pas violé la loi. Je suis un admirateur de droit, je crois que tout un chacun peut faire la différence entre l’élection et l’installation. (…).
 
Le CNT ne relève pas du président de la République, c’est un organe qui représente l’organe législatif qui s’appelle l’Assemblée nationale. Tant que cette Assemblée nationale n’est pas installée, on n’a pas droit de dire qu’il faut oublier le CNT. Cette Assemblée aura la charge d’examiner cinq budgets pendant ces cinq années. Les cinq prochaines lois de finances seront examinées par cette Assemblée. 
 
  AFRICAGUINEE.COM : Vous dites que la Guinée a traversé des moments ‘’difficiles’’ ces dernières années. Quels sont les moments forts que vous retenez de cette période ?
 
MOUSTAPHA KOUTOUBOU SANOH: Vous savez il y a eu des moments très difficiles ici, avec notamment les manifestations de rue. Cela a rendu les relations entre le pouvoir et l’opposition très tendues. On pensait même que la démocratie qui était en construction allait avoir beaucoup de difficultés. Mais, moi j’avais toujours cet espoir, j’ai toujours espéré qu’on va s’en sortir un jour, parce que toutes les crises que la Guinée a connues de 1958 à maintenant, on est toujours arrivé à trouver des solutions pour les résoudre. Ce qui fait que les moments difficiles que nous avons traversé, nous sommes tous heureux, la Guinée a pu mettre fin à sa transition, dans la paix, la stabilité et dans la sécurité. Ce n’est pas le cas dans plusieurs pays. Vous savez dans certains pays voisins, l’opposition est de l’autre côté, elle boycotte des élections, boycotte la participation, c’est le parti au pouvoir qui gère tout. Il y a donc une opposition marginalisée, mais notre cas ici, est que tout le monde a accepté de se retrouver au tour de la table des négociations. Le médiateur international et les médiateurs nationaux, chacun a contribué. 
 
Les moments difficiles, c’était aussi les manifestations qui étaient parfois violentes qui ont fait beaucoup de morts et nous souhaitons que ça soit un passé pour la Guinée et que les guinéens puissent se retrouver au tour d’une table de négociation pour pouvoir résoudre leurs problèmes. La Guinée nous appartient tous, donc nous n’avons pas le droit de marginaliser une certaine couche sociale. Nous avons le devoir de partager de façon égale tout ce que nous avons comme opportunité dans ce pays. C’est ce qui fait que tout guinéen est interpellé de contribuer à sa manière à la construction de la Guinée.
 
Donc, je crois que les années 2012-2013 ont été des années vraiment difficiles pour la Guinée, mais 2013 est finit en beauté parce qu’on a mit fin à cette transition qui n’a que trop durée.
 
  AFRICAGUINEE.COM : Ces difficultés n’ont t-elles pas eu d’impact sur les relations de coopération entre la Guinée et les différents partenaires au développement ?
 
MOUSTAPHA KOUTOUBOU SANOH:Je pense que mon département sera le plus bénéficiaire de la finalisation de la transition dans notre pays. Vous savez, avec les partenaires techniques et financiers, certains ne veulent pas collaborer avec un pays qui est en état de transition. Mais 90 à 100% de ces partenaires n’ont plus raison de dire que nous ne collaborons pas avec ce pays parce qu’il est en transition. Cette transition est finie. Donc, c’est une opportunité pour nous de relancer nos relations de coopération avec ces partenaires techniques et financiers. Les exigences de ces partenaires techniques et financiers sont finies. Nous avons essayé pendant les trois ans de transition à convaincre nos partenaires techniques et financiers pour leur dire que ce qui se passe en Guinée, c’est juste un passage dans l’histoire de toute les nations. Toute civilisation, toute démocratie a connu cette traversée qui fait qu’aujourd’hui nous avons fini avec cette traversée et que nous sommes aujourd’hui un pays normal. Un pays normal où  la démocratie doit régnée. Les principes démocratiques doivent forcement être respectés désormais dans notre pays.
 
Les trois pouvoirs qui sont là ; ils sont légaux. Le pouvoir législatif sera bientôt en opération, le pouvoir exécutif qui est là et le pouvoir judiciaire doivent forcément travailler avec ces deux pouvoirs pour permettre à la Guinée de devenir un pays normal, un pays qui aura droit à l’émergence au développement et qui aura droit à tout ce que les pays normaux connaissent aujourd’hui. 
 
 AFRICAGUINEE.COM : Qu’est ce qu’on peut retenir en termes d’apports de la part des différents partenaires au développement durant l’année 2013 ?
 
MOUSTAPHA KOUTOUBOU SANOH: En dépit de toutes ces difficultés, le ministère, dès le début de l’année 2013, s’est doté d’un plan d’actions. Dans ce plan d’actions, on s’est projeté un défi en ce qui concerne la mobilisation des ressources financières pour appuyer le budget national de développement et pour financer certains projets de développement. Le défi que nous avons mis au premier janvier 2013, le département doit forcement mobiliser un montant de 300 millions de dollars, environ cent mille milliards de francs guinéens (100. 000 milliards GNF). C’est ce qui était le défi. C’est pour bien sûr appuyer le budget national et pour financer certains projets de développement qui ne sont pas financés par le budget national et, pour contribuer au développement socioéconomique ainsi, contribuer à la transformation de la Guinée en un pays émergent. 
 
A ce jour, nous avons pu mobiliser environ 318 millions de dollars, soit 2179 milliards de francs guinéens au cours de l’année 2013. Par la grâce de Dieu, nous avons adopté le mécanisme de mobilisation. Nous sommes allés auprès de certains partenaires techniques et financiers pour leur expliquer le problème auquel nous sommes confrontés. Nous leur avons présenté des projets bancables qui ont été préparés par des services différents. Nous avons discuté avec les partenaires techniques et financiers que les besoins du gouvernement dans certains secteurs à savoir le secteur de la santé, de l’éducation, de l’environnement, des transports et des travaux publics. Donc, l’ensemble de ses montants que nous mobilisés, certains ont contribué à l’amélioration des conditions de vie des populations. 
 
Il y a un montant qui a été alloué pour la construction du pont de KAAKA (Coyah). Dès le premier janvier 2014, nous allons poser la première pierre  pour la construction de ce pont. Nous avons contribué à l’achat de plusieurs moustiquaires imprégnés pour lutter contre le paludisme. On a contribué au financement de cantines scolaires pour les enfants qui sont dans les zones rurales, à l’achat des équipements des services de la santé à l’intérieur du pays, etc.
 
Nous ambitionnons que le japon vienne en force en début 2014, avec une trentaine de projets qui sont en bonne position avec la conférence de la TICAD, la conférence de Tokyo-Afrique. Nous avons aussi contribué à l’annulation de la dette guinéenne. On devrait plus de 100 millions de dollars au Japon et cette dette a été annulée. La liste n’est pas exhaustive. 
 
  AFRICAGUINEE.COM : Quel est le montant exact décaissé dans ces 318 milliards de dollars ? 
 
MOUSTAPHA KOUTOUBOU SANOH: Non, vous savez, avec les partenaires techniques et financiers qui sont là, il y a certains qui gèrent les décaissements. La gestion de certains montants est laissée au compte des partenaires techniques et financiers. Ils sont en étroite collaboration avec les départements sectoriels. Je vous donne un exemple : si l’Allemagne décide de construire des centaines d’écoles, ils font un appel d’offres, et ce que l’Etat bénéficie, l’Etat supervise, mais l’Allemagne avec une agence de la place va recruter la société plus méritante afin qu’elle puisse construire les écoles. Après avoir construit ces écoles, l’Allemagne met les écoles à la disposition de l’Etat, nous recevons ces écoles, et nous les mettons à la disposition du ministère de l’enseignement pré-universitaire. Il faut rappeler que nous avons négocié, pour la première fois,  que la Guinée puisse abriter le siège de la coalition Sud-Sud et triangulaire. 
 
En ce qui concerne l’appui budgétaire, ce montant est transféré directement aux comptes du ministère du budget et le ministère de l’économie et des finances. Nous, nous servons d’interface et nous nous assurons aussi que les engagements pris avec les partenaires techniques et financiers soient respectés au niveau de nos départements sectoriels. 
 
Nous avons des commissions de suivi et évaluation qui insistent et rappellent les départements sectoriels bénéficiaires de ces appuis, le respect strict des engagements signés.
 
  AFRICAGUINEE.COM : Quelles sont les ambitions de votre département pour l’année 2014 ?
 
MOUSTAPHA KOUTOUBOU SANOH:Je n’oublierai pas de vous dire que notre département a été confirmé comme un département de référence. Nous avons eu le certificat ISO qui nous confirme pour la deuxième année. Ce certificat est un témoignage que ce département répond aux exigences, aux normes internationales en ce qui concerne la promotion de la coopération bilatérale, multilatérale et la coordination de l’aide extérieure. C’est un certificat certifié par le comité français d’accréditation (COFRA). Cela nous a beaucoup aidé avec nos partenaires techniques et financiers, parce qu’ils sont rassurés d’avoir à faire avec un département responsable et qui respecte les engagements. Donc, l’ambition est de poursuivre  les activités que nous avons menées, les grandes commissions mixtes que nous avons organisées et que nous allons organiser en 2014 pour permettre à la Guinée de s’inspirer des expériences des pays émergents. Si nous avons pu mobiliser en 2013 plus de 315 millions de dollars, que 2014 soit entre 350 à 400 millions de dollars. Il faut forcement qu’on aille à la mobilisation de ces fonds pour aider le budget national à financer certains projets, pour contribuer au développement socioéconomique de notre pays et pour faire la promotion de ce pays. L’aide que nous recevons aujourd’hui, il faut que ça soit clair, que ça ne soit pas une aide tout simplement que nous allons continuer à demander aux gens de nous aider. Toute aide qui ne nous aide pas à nous passer de l’aide ne nous convient pas.
 
Nous souhaitons que l’aide que nous recevons aujourd’hui nous aide à faire en sorte que nous ne tendions plus la main pour faire face à certains secteurs.
 
Donc, l’ambition au niveau de la mobilisation, ce n’est pas moins de 400 millions dollars. Les relations avec les grandes commissions mixtes, la relance des relations de coopération avec certains partenaires techniques et financiers, renforces nos relations de coopération avec l’Allemagne, avec certains pays qui étaient partis un peu loin comme le Canada, et aller vers les pays émergents, la promotion de la coopération sud-sud et la coopération triangulaire.
 
  AFRICAGUINEE.COM : Merci monsieur le ministre !
 
MOUSTAPHA KOUTOUBOU SANOH: C’est moi qui vous remercie !
 
   Interview réalisée par Mamadou Aliou BM Diallo 
   Et Bah Aissatou
   Pour Africaguinee.com
   Tél. : (+224) 664 93 46 24
 
 
 
Créé le 28 décembre 2013 23:14

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