CONAKRY- Le ministre ginéen chargé de la communication, Togba Césaire Kpogomou, est sorti de son silence en répondant aux accusations des observateurs de l'Union Européenne qui ont dénoncé l'utilisation des moyens de l'Etat lors de la campagne pour les élections législatives du 28 septembre dernier. Dans un entretien exclusif accirdé à notre rédaction, le chef du département de la communication a aussi abordé d'autres questions liées à l'actualité nationale…Exclusif!!!
AFRICAGUINEE.COM: bonjour Monsieur le ministre
TOGBA CESAIRE KPOGOMOU: oui Bonjour
AFRICAGUINEE.COM : En tant que ministre de la communication quel regard portez-vous sur la presse guinéenne ?
TOGBA CESAIRE KPOGOMOU: Lorsque je prends les choses à la prise de mes responsabilités, je crois que nous pouvons tirer quelques éléments de satisfaction et de fierté, et beaucoup de choses restent à faire naturellement. Mais à l’occasion des visites que nous avons rendues à la presse publique et privée, à la lumière de ce qui est réalisé, si je prends le domaine public, aujourd’hui, nous sommes fiers que la télévision guinéenne soit suivie de partout dans le monde. Nous sommes fiers que nous ayons parvenu à caler le journal télévisé à 30 minutes ; nous sommes fiers que les émissions se soient diversifiées, que ceux qui étaient partis de la rédaction soient retournés au bercail. Nous sommes fiers de l’appui du président de la République et du gouvernement en matière de logistique, en moyens financiers, parce qu’aujourd’hui, je peux le dire sans risque de me tromper que la couverture est intégrale sur le territoire national en son et en image. Nous sommes satisfaits que des véhicules soient mis à disposition permettant d’aller dans le pays profond pour nous amener toutes les préoccupations de nos populations à la base.
Si je prends la presse privée après moult rencontres au plus haut sommet, nous sommes satisfaits qu’un organe comme l’union des radios et télévisions libres de Guinée (URTELGUI) soit dans le cadre de nos orientations, pas dans le terme de soumettre les medias privés à un changement de ligne éditoriale, mais que l’urtelgui soit capable de se regarder en face, de s’auto-évaluer, de proposer des sanctions pour les pairs. Parce qu’avant, c’est une espèce d’officine de revendications, mais aujourd‘hui URTELGUI est capable de dire ce que fait tel confrère est bon et ce que fait tel autre ne l’est pas.
Nous sommes fiers des journalistes qui animent des émissions inter actives permettant aux citoyens de s’exprimer et qui arrivent à canaliser ses auditeurs pour éviter des dérapages, et évitent que des accusations fortuites soient faites, des journalistes qui invitent les gens à recouper les informations, à parler de développement, plutôt que d’avoir la diffamation et l’insulte à la bouche.
AFRICAGUINEE.COM : Monsieur le ministre, depuis que vous êtes à la tête de ce département, concrètement, quelles sont les reformes que vous avez faites ?
TOGBA CESAIRE KPOGOMOU: Depuis notre arrivée ici, il y a juste douze mois, nous avons fait beaucoup de reformes, parce que le constat était déplorable. Nonobstant les problèmes que nos prédécesseurs ont réalisé, nous avons trouvé un département qui connaissait énormément des dysfonctionnements : le cabinet, les directions, la Direction Administrative et Financière, tous les services.
La preuve est que la moitié des caméras étaient dehors avec des personnes qui étaient parti avec, le groupe électrogène n’était pas en état de fonctionnement adéquat, les murs étaient décrépis, chacun évoluait en vase clos. La RTG Boulbinet était moins qu’un vidéoclub. Il y avait une mésentente totale, un climat de suspicion entre les travailleurs, entre les directeurs, en bref, le climat était délétère. Il fallait s’atteler à recoller les morceaux et établir la confiance entre les différents acteurs. Donc, c’est la principale reforme à laquelle nous avons abouti.
Sur le plan de la gestion des équipements, chacun évoluait de son côté, ce qui doit être l’expression des besoins des différentes structures, ne l’était pas. Il était exprimé par un petit groupe qui savait ce qu’il fallait mettre et ce qu’il ne fallait pas mettre et qui ne se sentait pas obligé de rendre compte aux travailleurs. Nous avons brisé ce carcan en créant un esprit de symbiose qui fait qu’en dehors des réunions de cabinet hebdomadaire que nous réalisons. Nous avons crée une plateforme plus large de concertation que l’assemblée générale qui permet à tous les travailleurs, devant le ministre, devant le cabinet, de dire ce qui est sur leur cœur en terme de rectification de leur œuvre en terme de leur proposition pour la bonne marche du département.
AFRICAGUINEE.COM : Quels sont vos défis ?
TOGBA CESAIRE KPOGOMOU: Naturellement, nous avons assez de défis à relever. Nous avons le défi de la formation, nous avons promis en tant que professeur que nous mettions un point d’honneur sur la formation des travailleurs, nous pouvons déplorer qu’à part des projets de formations qui étaient mis en orchestre, rien de nouveau, il faut le confesser, n’a été entamé, bien que nous ayons fait des plaidoyers auprès des ambassades, des institutions internationales, pour que certains de nos journalistes et techniciens partent se former. Mais ce n’est qu’une partie remise parce que nous n’avons que douze, on ne pouvait pas tout embrasser en même temps. Donc, il fallait prendre des points nodaux, essayer des les satisfaire pour qu’il y ait davantage d’efficacité. Aujourd’hui, le climat est à l’ambiance joyeuse, le climat est à la compréhension. Nous avons appelé beaucoup à l’ordre, c’est-à-dire le respect de contenu des cahiers des charges. Nous avons conscience qu’il y ait des dysfonctionnements au sein de ces cahiers des charges, parce que l’époque de sa naissance et le temps que nous vivons aujourd’hui ne se ressemblent pas. Le contexte ayant changé, il faut envoyer des missionnaires dans la sous région, pour voir ce qui se passe dans les autres pays et que cela nous serve d’inspiration. Et que de façon consensuelle, que nous soyons responsables publics et privés, tous ceux qui ont un regard ou une préoccupation pour la bonne marche de notre secteur, qu’on se retrouve pour lancer des nouveaux jalons.
Naturellement, il faudrait trouver aussi des spécialistes parce que c’est un domaine de droit. Donc nous allons nous y atteler très bientôt. Je crois que beaucoup de choses sont en train d’être faites parce que notre crédo c’est poursuivre sur ce plan, surtout sur l’effort qui a été fait et qui a fait prendre conscience aux responsables que la place d’un journaliste c’est moins dans une prison, c’est bien dans sa rédaction. Donc, nous ferons tout pour que les délits de presse soient réduits, nous ferons tout pour que nous nallions pas à la pénalisation, et cela ne peut pas se faire sans l’effort des journalistes. On met tout sur la formation, mais tout n’est pas que formation. C’est ce qui m’amène à distinguer trois catégories de journalistes.
Ceux d’entre vous qui sont bien formés, qui ont grande conscience de leur métier d’information, de distraction, d’équilibre de l’information, ceux là exercent le métier avec efficacité et professionnalisme.
Il y a une deuxième catégorie qui est à la position médiane. Qui est au journalisme, faute d’avoir trouvé à faire dans leur propre secteur, c’est-à-dire, ils en font leur préoccupation secondaire, leur violon d’ingrat. Ces journalistes là, il faut bien les former. Puisque, parti au métier, ils veulent désormais l’exercer, mais ils ont besoin d’être outillé pour qu’ils exercent efficacement leur métier.
Il y a une troisième catégorie qui se situe à l’autre extrême : qui est bien formé, qui sait ce qu’il faut faire et ce qu’il ne faut pas faire. Mais qui ont fait le pari que de nuire, de ne pas informer. Ceux-ci font peu part de l’éthique et de la déontologie. Ils ont la diffamation, l’insulte à la bouche ; ils ne recoupent pas l’information. Mais leur objectif premier, c’est de nuire. Donc, ils se donnent qu’à des déclarations péremptoires, ils insultent jusqu’aux plus hautes personnalités de notre pays, ils font des accusations gratuites. Ceux-ci, vous n’avez qu’à les envoyer dans n’importe quelle institution de journalisme, ils ne changeront pas. Mais, nous devons, en père de famille, savoir qu’il y a des enfants turbulents, il y en a qui sont en priori sages et qu’il faut multiplier l’effort de formation, de sensibilisation pour que les gens sachent que du fait de la fragilité de notre système démocratique et ses balbutiements, la presse doit contribuer à l’éduquer, à contribuer à faire prendre conscience à nos populations de la nécessité de pouvoir analyser ce qui s’est passé aux alentours en terme de conflits et des soubresauts ainsi que les conséquences que ces conflits ont engendré. C’est de cette presse citoyenne que nous voudrions voir naître dans notre pays, émerger, prospérer, mais pour que cela ne se tienne, il faut garder espoir. Si nous regardons les autres démocraties, c’est un accouchement qui n’a pas été facile.
AFRICAGUINEE.COM : Au lendemain du scrutin législatif du 28 septembre 2013, les observateurs de l’union européenne ont dénoncé certains membres du gouvernement, y compris vous, d’avoir usé des moyens (véhicules administratifs) de l’Etat pour faire campagne au compte du parti au pouvoir. Quelle explication pouvez-vous apporter à cette déclaration ?
TOGBA CESAIRE KPOGOMOU: (…) J’ai du respect pour l’Union Européenne et les observateurs dont j’ai reçu. Nous avons passé en revu tous les problèmes qui assaillent la presse guinéenne. (…) Lorsqu’on parle de véhicule administratif, moi j’ai fait ma mission dans un véhicule pick-up immatriculé RC9160Z. Et je crois que les véhicules de l’Etat sont immatriculés dans l’ordre des véhicules administratives (VA) ou véhicules d’entreprises publiques (EP), vous avez l’ordre de mission que j’avais, vous avez le numéro d’immatriculation, donc, ce n’est pas un véhicule du gouvernement.
Quant à m’employer à faire la campagne pour le parti au pouvoir, je crois que vous parlez de l’union européenne. Et cela tombe bien, il s’agit de l’union européenne qui comporte plusieurs pays où on fait des élections et tout ; où des partis accèdent au pouvoir au détriment d’autres qui échouent aux élections.
Donc, le ministre que je suis, en dépit des appuis techniques que je peux avoir dans le domaine pour lequel j‘ai en charge des responsabilités, je suis avant tout un homme politique. Lorsqu’il y a élection, lorsqu’il y a campagne électorale, c’est tout à fait naturel, qu’au côté de mon parti, je soutienne ses candidats, que je fasse en sorte qu’il y ait beaucoup de suffrages. C’est ce que j’ai fait. Et cela se fait aux Etats unis, en France et dans toutes les grandes démocraties. Donc, ce n’est pas exact qu’on dise que j’ai utilisé des moyens de l’Etat. Je suis allé avec un véhicule personnel, naturellement j’ai fais la campagne pour mon parti, c’est-à-dire le RPG arc-en-ciel. Et demain je ferais la même chose pour les prochaines échéances électorales de 2015. Donc, c’est la réponse que je puisSE vous donner.
AFRICAGUINEE.COM : Que répondez-vous à ceux qui vous accusent de bourrage d'urnes dans les localités de Yomou et de Lola, le jour du vote ?
TOGBA CESAIRE KPOGOMOU:Bien, puisqu’on parle de campagne électorale, il est arrivé qu’on dise de moi que le jour du scrutin on m’a trouvé avec des urnes du côté de Yomou. Alors, je voudrais vous dire que ce sont des allégations mensongères qui n’engagent que les auteurs. Donc, je n’ai jamais été à Yomou avec des urnes, effectivement, je suis parrain des préfectures de Lola et de Yomou. Lorsque je suis allé pour la campagne électorale, effectivement j’ai battu campagne dans les deux préfectures. Mais, je ne sais pas par quelle opération de Saint esprit, le jour du vote, je ne suis pas allé à Yomou, je suis resté à Lola. Et je ne peux pas être à Lola et à Yomou en même temps. Si vous ne m’avez pas posé la question, je ne serais pas rentré dans tous ces détails parce qu’il y a des gens qui veulent vendre la copie, il y a d’autres qui veulent augmenter leur audimat et qui créent des contrariétés.
AFRICAGUINEE.COM : Les résultats provisoires de ces élections sont publiés et désormais tous regards les sont tournés vers la cour suprême. Dans ce climat ‘’délétère’’ que travers la Guinée, quel appel lancez-vous à l’endroit des acteurs politiques de tout bord ?
TOGBA CESAIRE KPOGOMOU:Je ne peux pas accepter avec vous que nous traversons un climat délétère. Ce sont des gens qui veulent le rendre ainsi, parce qu’on invente des histoires de tout côté, on crée de la sinistrose, et on tend l’impression à la population interne comme aux populations des autres pays que la Guinée est au bord du gouffre, que la Guinée est un pays qui s’effondre, un pays qui est à quelques pas du génocide. Donc, ce climat est intentionnellement inventé.
L’appel que je peux lancer c’est que les guinéens conservent leur sérénité, que les uns et les autres restent calmes, que nous fassions confiance à nos institutions. En ce qui concerne les jeunes, ce que je peux vous demander, c’est de ne pas céder à la panique. (…) donc nous connaissons les écueils, nous savons aussi ceux qui tirent les ficelles dans l’ombre, ceux qui n’ont pas intérêt à ce que le pays avance. (…) c’est un groupuscule des politiciens qui font de la politique politicienne, qui s’agite à Conakry dans la lanterne politique de Conakry pour montrer un visage non acceptable de notre pays. Nous avons des institutions, la première des choses que nous devons faire pour que nous soyons respectés de l’extérieur, c’est que nous-mêmes dedans, nous respections nos propres institutions. Nous avons la cour suprême qui a reçu les requêtes et qui est en train d’analyser les résultats provisoires, les différentes réclamations. Nous en avons conscience, et nous portons confiance à cette cour qui, dans notre entendement ne dira que le droit. Je crois que c’est l’une des rares fois qu’après une élection législative, que le parti au pouvoir et l’opposition, en terme des résultats, se tiennent quasiment coude à coude. Les populations ont voté dans la sagesse, il n’y a pas eu des heurts, nous devons par respect pour ces populations, garder le calme, rester serein, accepter les résultats de la cour suprême, au lieu d’inciter les populations dans les rues. Lorsqu’il passe un jour sans que l’enfant n’y aille à l‘école, ce sont des milliards de francs qu’on perd, parce que la formation n’a pas de prix.
Les résultats vont être proclamés, je crois que le ciel ne tombera pas sur notre tête. Je crois qu’il faut être sage, et s’en tenir à ce que va donner la cour suprême.
AFRICAGUINEE.COM : Alors que l’opposition a décidé de surseoir à toute manifestation publique, nous avons assisté à plusieurs manifestations d’ordre sociale dans certains quartiers de Conakry, où des populations réclament du courant par-ci, des élèves qui réclament des enseignants par-là et d’autre part, des enseignants vacataires qui exigent leur l’intégration dans la fonction publique. Comment vous analysez cette situation et quelle solution faudrait-il envisager pour finir avec ces réclamations ?
TOGBA CESAIRE KPOGOMOU:La solution, c’est ce que les gens doivent rester calmes. Vous savez, moi je ne peux pas dire que ceux qui manifestent n’ont pas le droit de manifester. Maintenant, si ce sont des révoltes spontanées pour mettre en exécution un plan B lorsque le A, a échoué, je crois que nous avons des dispositions règlementaires qui doivent être prises pour que le cyanure ne s’infiltre pas dans notre vie quotidienne. Je crois que c’est pour un Oui et un Non, on doit barrer les routes, on doit saccager par-ci par-là, je crois qu’il faut mettre fin à cela.
Vous savez qu’il y a des gens qui n’ont pas intérêt au calme, puisque nous sommes en train d’aller vers la mise en place de l’organe législatif, ils savent que désormais les débats se transporteront à l’hémicycle et pas dans la rue. Et puisqu’ils ont des choses à vider comme un sac, il faut qu’ils les vident. (…)
Nous devons avoir l’honnêteté de dire que depuis que les groupes d’Agrekko sont fonctionnels, la desserte s’est améliorée. Nous n’allons pas nous enliser dans cette une espèce de polémique stérile, il faut que les uns et les autres se ressaisissent et que nous trouvons d’autres voies pour résoudre nos problèmes que de se mettre dans la rue.
AFRICAGUINEE.COM : Quelle est la réaction du ministère guinéen de la communication et du gouvernement après l’enlèvement et l’exécution des deux journalistes de RFI au Nord du Mali, le weekend dernier ?
TOGBA CESAIRE KPOGOMOU:La réaction du département de la communication en est une profonde consternation, de vive émotion, parce qu’on ne peut pas admettre que des personnes dévouées à leur travail, des journalistes qui essuient sang et sueur pour informer les populations, des journalistes qui respectent le droit, ces personnes là soient aussi cruellement abattues de sang froid. Nous ne saurons l’admettre. C’est avec le cœur meurtri que nous avons appris la nouvelle et qui nous a tombé dans la conscience comme un coup de massue.
Je voudrais saisir cette occasion pour témoigner toute ma compassion à la grande famille des médias à travers le monde, à RFI, un medium que tous les africains écoutent, de par la vivacité de ses informations, de par la capacité à souvent recouper les informations. Nous sommes très attristés. Au nom de mon département, je voudrais témoigner à la famille éplorée, la famille des médias, toute ma compassion.
AFRICAGUINEE.COM : Monsieur le ministre merci d’avoir accepté de répondre à nos questions.
TOGBA CESAIRE KPOGOMOU:C’est moi qui vous remercie.
Interview réalisée par Aliou BM Diallo
Pour Africaguinee.com
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Créé le 7 novembre 2013 12:47