Gouvernement : les ministres ont-ils déserté les bureaux pour battre campagne ?

CONAKRY-Les ministres guinéens ont-ils boudé leurs bureaux pour battre campagne ? Depuis le début de la campagne pour les élections communales l’administration guinéenne présente une certaine paralysie. Et pour cause : Tous les ministres ou presque sont à l’intérieur du pays officiellement pour dit-on sensibiliser les populations sur le PNDES (programme national pour le développement économique et social). Mais derrière cette mission de sensibilisation se cache un air de campagne. Cette situation inquiète plusieurs citoyens qui fustigent l’abandon par les ministres de leurs départements pour battre campagne pour le parti au pouvoir.
« Le constat est décevant en Guinée. Mais c'est un constat général dans les pays africains. La période préélectorale est extrêmement dangereuse dans les pays africains. Le pouvoir en place nomme des ministres qui font la politique du Président de la République. Et c'est extrêmement dangereux que les ministres en situation de service puissent libérer les bureaux pour se rendre dans les différentes localités éloignées les unes des autres pour mener campagne. La campagne n'est pas interdite, mais nous ne pouvons pas lier la fonction publique à la fonction administrative car il y aura incohérence de compétence, incohérence des tâches à respecter. Certes, le ministre peut se déplacer pour une activité concernant le développement du pays, les cadres peuvent se déplacer. Mais c'est mal vu que tous les ministres se déplacent en laissant tous les départements pour se rendre à l'intérieur du pays pour battre campagne pour les élections locales. C’est déplorable », fustige Joseph Bernard Traoré.
Odilon Maomy juriste ne partage pas cet avis. Il estime que « lorsqu’on accepte d'intégrer une équipe gouvernementale, vous êtes obligés de faire la politique de ce gouvernement. Par conséquent s'ils sont partis pour battre campagne, ils font la politique du Président de la République. Je suis désolé de le dire mais c'est normal », soutient ce juriste.
Ibrahime Soy Dian Diallo, enseignant chercheur, préconise la séparation de la politique de l'administration. « Je pense qu'il serait judicieux de séparer la politique de l'administration. Lorsqu'on confond les deux on va faire toute la population des militants. C’est ce qui explique ce que nous vivons aujourd’hui. Et puisque c'est l'Etat qui dispose des moyens, l'Etat donc va utiliser ces moyens à des fins politiques et non à des fins de développement. Ce qui augure un lendemain de crise », a prévenu cet enseignant chercheur.
Il déplore que l'Etat envoie toute l'administration à l'intérieur pour battre campagne avec les moyens de l'Etat, alors que pendant ce temps il y a les enseignants qui réclament des augmentations de salaires et l'Etat argue qu'il n'y a pas d'argent. « Il serait judicieux de séparer la politique de l'administration. L'administration c'est une continuité. Il faudrait que l'administration continue à fonctionner. On constate déjà une certaine paralysie à ce niveau. Aujourd'hui quand vous allez dans les bureaux pratiquement ça tourne au ralenti », regrette cet universitaire.
Face à ces critiques, le ministre de l’administration du territoire et de la décentralisation a défendu ses collègues en justifiant leur présence à l’intérieur du pays par le souci de préservation de la paix sociale et du développement local. « Qu’on ne confonde pas la présence des membres du gouvernement à l’intérieur du pays avec une quelconque participation à une campagne électorale », s’est-il défendu ce vendredi. Sauf que, la question que bon nombres d’observateurs se posent est de savoir : « pourquoi maintenant ? »
Oumar Bady Diallo
Pour Africaguinee.com
Créé le 27 janvier 2018 10:18
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