Évacuation des guinéens au Soudan: Un ancien étudiant fait des propositions…
KHARTOUM-Alors que le Soudan s’enfonce dans le chaos, de nombreux pays organisent le rapatriement de leurs ressortissants. Pour le cas de la Guinée qui a une centaine de ses ressortissants bloqués dans ce pays, c’est encore le statu quo. Sur place, l’angoisse grandit. Comment évacuer les guinéens de ce bourbier ? Comment vivent-ils dans ce pays ? Afrciaguinee.com a interrogé M. Mamadou Dian Dieng, un ancien étudiant guinéen au Soudan qui connait bien ce pays. Il fait des propositions concrètes au Gouvernement pour évacuer rapidement les guinéens.
AFRICAGUINEE.COM : Beaucoup de pays organisent le rapatriement de leurs ressortissants du Soudan exceptés ceux de l’Afrique Subsaharienne. D’après vous comment les autorités guinéennes doivent-elles s’organiser pour sortir nos compatriotes de ce bourbier ?
MAMADOU DIAN DIENG : Justement, les pays africains n’arrivent pas à s’organiser pour évacuer leurs citoyens en détresse. Parce que même les égyptiens qui sont plus proches, qui ont une puissante armée et dont les militaires même étaient en appui à l’armée soudanaise dans des volets techniques, ont été sévèrement secoués par la crise. Même hier ils ont perdu un membre de la mission diplomatique égyptienne à Khartoum.
L’idée qui m’est venue, c’est de voir avec le département des Affaires étrangères et des guinéens établis à l’étranger, pour chercher un partenariat avec l’Arabie Saoudite, l’Allemagne, l’Espagne, qui ont réussi à amener des avions et à rapatrier des gens. Ce partenariat permettra de pouvoir venir en aide à nos compatriotes qui sont bloqués à l’université et ceux qui sont dans les quartiers. C’est vraiment inquiétant.
A mon avis, c’est la proposition qui a de l’efficacité. Il faut travailler avec les pays qui ont de l’efficacité sur le terrain, qui ont réussi à extirper leurs ressortissants pour qu’ils nous aident à extirper les nôtres, parce que nous n’avons pas les moyens, nous n’avons pas d’ambassade à Khartoum. On a qu’une ambassade installée au Caire avec un point focal installé à Khartoum. Mais ce point focal n’est représenté que par les étudiants. Ils n’ont aucune efficacité, ils ne peuvent pas faire grand-chose.
Vous évoquez le cas de l’Allemagne et de l’Arabie Saoudite, or Conakry privilégie la piste égyptienne, qui d’après vous, a également des difficultés à évacuer leurs ressortissants. N’est-ce pas là, une difficulté ou bien il faut changer d’approche ?
Je ne sais pas jusqu’où ils sont allés dans les négociations avec l’Egypte, je respecte leur démarche. Mais maintenant là, je pense que ceux qui se sont montrés en premier, c’est les saoudiens. Les saoudiens ont une facilité, parce que si par la route ils peuvent déjà amener des gens au port Soudan et du port Soudan ils peuvent les amener à Djeddah, je pense que c’est un raccourci très important. Parce que la frontière égyptienne maintenant là, elle est très complexe. Ce n’est pas évident que nos frères puissent passer par là facilement. Nous sommes solidaires avec le peuple soudanais et solidaires en particulier à nos frères guinéens qui sont restés au Soudan.
Vous êtes un ancien étudiant guinéen au Soudan. Quelle est votre expérience de la vie soudanaise ?
Premièrement, il faut savoir que depuis 2017, le Soudan est en crise économique aigue. Les gens vivent dans une précarité qui ne dit pas son nom. Particulièrement, la situation des étudiants étrangers est très compliquée. Avant même le conflit, ils vivaient dans des conditions très difficiles. Cette crise de 2017 jusqu’à maintenant n’a fait que s’aggraver. Ce qui a conduit au renversement du régime de El Béchir en 2019. Et depuis, le pays s’enfonce.
Le pays a enregistré une grave coupure d’internet et l’accès aux services sociaux de base devient de plus en plus compliqué. Avez-vous des nouvelles de vos anciens amis étudiants encore présents à Khartoum ?
Bien que je sois au pays (Guinée), je suis resté sur leur plateforme WhatsApp et télégramme. Je suis l’actualité de ces dernières semaines de près. Nos compatriotes qui sont restés au Soudan (fonctionnaires, diplômés, enseignants), me disent que la situation est vraiment compliquée ces dernières heures. Qu’on a demandé à tous les étudiants de se regrouper au niveau des campus. Ils cherchent avec insistance à sortir de la capitale pour se retrouver dans une zone plus paisible ou bien pour pouvoir revenir en Guinée. Ce qui est marrant, c’est qu’actuellement, il y a trois situations.
La première situation, c’est qu’il y a la crise économique ; deuxièmement, il y a le conflit ; troisièmement, il y a des groupes armés qui n’appartiennent pas à l’armée régulière ou au groupe paramilitaire qui opèrent aussi dans les quartiers. Même quand tu sors pour te ravitailler en manger, tu ne trouves pas d’abord de boutique ouverte et tu risques aussi de te faire agresser. La semaine dernière, un de nos étudiants a été agressé. Les routes ne sont pas sécurisées. Les gens cherchent à sortir du pays. Vous imaginez, quand il y a une crise comme ça, les frais de transport se multiplient. Les gens sont vraiment peinés. Les messages que j’ai reçus sont vraiment inquiétants.
Comment vivent les étudiants présents sur place ?
Par dignité, les étudiants ne veulent pas s’exposer particulièrement. Mais je suis les plateformes WhatsApp. Il y a des soudanais même qui expliquent qu’il y a des problèmes d’électricité, d’eau, de la connexion internet. Hier on disait qu’à 80%, les services d’eau et d’électricité étaient défaillants dans la capitale et parallèlement à cela, les marchés sont fermés et pillés. 56 hôpitaux qui étaient opérationnels au Soudan, l’autre jour, 39 n’étaient plus utilisables.
Washington a annoncé que les deux généraux qui sont au cœur de ses affrontements, ont accepté une trêve de 72 heures. N’est-ce pas une bonne nouvelle ?
Le Général (Burhane) qui dirige le pays, considère déjà son rival (Umdeti) comme un rebelle. Il dit qu’il n’y aura pas le cessez-le-feu tant qu’on n’aura pas maitriser les paramilitaires. Donc, c’est ce qui fait qu’on n’est pas sûr de l’efficacité de cette nouvelle annonce. Le cessez-le-feu ne tiendra pas.
Vous êtes très sceptique ?
Non, je suis même pessimiste.
Dansa Camara DC
Pour Africaguinee.com
Créé le 25 avril 2023 16:12Nous vous proposons aussi
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