Diouldé Sow, député de Pita : « Attaquer chez le Khalife du Foutah, c’est franchir la ligne rouge… »
CONAKRY- L’attaque du domicile privé du Khalife général du Foutah a irrité la colère du député uninominal de Pita. L’honorable Diouldé Sow estime que la « ligne rouge » a été franchie.
Le député uninominal de Pita exige que justice soit rendue au Khalife, mais également à tous les citoyens qui ont été violentés ou perdu des biens. Diouldé Sow s’est confié à notre rédaction à travers notre correspondant local.
AFRICAGUINEE.COM : Vous êtes venu urgemment à Pita après les violences qui ont secoué cette préfecture ces derniers jours. Quelles sont vos premières impressions ?
HONORABLE DIOULDÉ SOW : Il faut dire que ce qui vient de se passer encore à Pita est regrettable. Je suis un fils de Pita, un fils de la région et en tant que député uninominal de Pita je suis attristé. Attristé de voir le niveau de déchéance morale auquel nous sommes arrivés dans ce pays. C’est très difficile. Ce qui est arrivé à Pita est inadmissible et inacceptable, parce qu’on suppose être dans une République. On ne peut pas sous prétexte d’assurer la sécurité, venir commettre des dérives. Au nom des populations je dis que Pita n’acceptera ce qui s’est passé. On ne peut pas porter les tenues de la République, au nom de la sécurité des populations et leurs biens ainsi que les édifices publics, vous passez au vandalisme, en détruisant les biens des gens et violer les domiciles privés des citoyens. Moi en tant que responsable, je suis inquiet pour mon pays parce que pour moi aller attaquer le domicile des gens, et aller jusqu’à attaquer le domicile du Khalife général du Foutah, dépasse l’entendement parce que dans notre culture et coutume une personne âgée est à respecter et non une personne à offenser, quelles que soient les raisons surtout que cette autorité morale était tranquillement assise devant sa maison, la journée de surcroit.
C’est pourquoi le jour même que je l’ai appris, j’ai appelé le Gouverneur de Mamou, le ministre Damantang et le ministre Bah Ousmane aussi. J’ai envoyé toutes les images des exactions au ministre de la sécurité et même au ministre Bah Ousmane. J’ai dit au ministre de la sécurité que si on n’arrêtait pas ce qui se passe, ce qui pourrait arriver après nous ne pourrons pas gérer.
Après chez le khalife ils ont fait une descente musclée à Guemé, au marché 2, au niveau des garages où ils ont cassé les vitres de toutes les voitures. Ils ont réuni des tables au marché pour mettre du feu dessus. Un kiosque plein de produits alimentaires a été brûlé.
Qu’est-ce qui peut expliquer un tel déferlement de violences dans une ville comme Pita selon vous ?
Toutes ces frustrations-là ont pour conséquence toutes les violences qui vont venir après parce que quand ceux qui sont chargés d’appliquer la loi se mettent dans une position contraire à la loi, il est évident que les populations vont se faire justice. Malheureusement on est à ce niveau et aujourd’hui il est regrettable pour tout le monde. C’est pourquoi pour moi et pour tous les fils du Foutah, ce qui s’est passé chez le Khalife c’est la ligne rouge qui est franchie. Nous avons besoin d’explications, nous voulons savoir qui a donné cet ordre et pour quel motif. Les gens doivent être obligatoirement dédommagés parce qu’on ne peut pas trouver des citoyens chez eux, et les attaquer de façon impunie. Aujourd’hui tout le monde est dans une situation indescriptible et c’est difficile pour moi en tant député, élu, représentant de ce peuples-là, de rester comme ça sans faire face à ces manquements à la loi. Personne n’est au-dessus de la loi.
C’est la loi fondamentale de notre pays qui autorise chaque citoyen qui n’est pas d’accord par rapport à une position du gouvernement de protester et dire que nous ne sommes pas d’accord. Les biens et les domiciles des gens sont sacrés
Que comptez-vous faire ?
Je suis en discussion avec un certain nombre de personnes. Je vous apprends également qu’une grande rencontre est prévue ce samedi 18 janvier 2020. A l’issue de ça des décisions seront prises parce que pour nous ce qui est arrivé au khalife et à Pita ne restera pas un fait divers. Il faut qu’on nous dise qui a donné l’ordre sinon nous tirerons toutes les conséquences. Si vraiment il y a un Etat il faut que quelqu’un se lève pour procéder aux enquêtes et dire, on connait les gens déployés ici, ils ne sont pas venus d’eux-mêmes, ils sont envoyés par quelqu’un. Donc nous voulons connaitre le commanditaire.
Avez-vous rencontré les autorités locales de Pita ?
Je vais rencontrer tout le monde, à commencer par le préfet, pour savoir si c’est lui qui a réquisitionné l’armée pour qu’elle se livre à tout ici. Ensuite le Gouverneur et le ministre de la sécurité
A Pita, il faut rappeler que le commissariat de police et la gendarmerie ont été incendiés. Est-ce que ce n’est pas ce qui a amené les agents de sécurité à faire un usage abusif de la force ?
C’est complexe. J’ai dit déjà préalablement que toute forme de violence n’est pas normale. Ce n’est pas pour encourager qui que ce soit mais si des hommes viennent tirer à balles réelles en temps de paix dans une petite préfecture de gauche à droite, de manière à pousser les citoyens (…). Il y a eu des violences et j’ai dit que je n’encourageais pas la destruction des édifices publics ; mais tout ceci fait que ce sont des conséquences de tout ce qui est violation de la loi en permanence il faut qu’on en tire les leçons. Il faut qu’on puisse s’asseoir et se dire la vérité. Mais à priori toute forme de violence n’est pas souhaitable. Toute forme de violence est condamnable.
Un dernier mot ?
Je demande au chef de l’Etat, président de la république, de prendre ses responsabilités avant qu’il ne soit trop tard. Et c’est un devoir pour lui de prendre ses responsabilités. Ce que nous demandons ici c’est de savoir qui a donné l’ordre d’aller attaquer le khalife à son domicile et aller détruire les biens des gens. Dans une République il faut que quelqu’un décide en toute responsabilité et nous demandons que la lumière soit faite. Je profite aussi de l’occasion pour demander à tout le monde de garder le calme.
Interview réalisée par Alpha Ousmane Bah(AOB)
Pour africaguinee.com
Tél. (+224) 664 93 45 45
Créé le 18 janvier 2020 11:26Nous vous proposons aussi
TAGS
étiquettes: Interviews, Pita