Des ennuis en cascade pour Claude Guéant, pilier de la présidence Sarkozy

Claude Guéant et Nicolas Sarkosy

Trois ans d'emprisonnement avec sursis probatoire ont été requis mercredi à Nanterre contre l'ex-ministre de l'Intérieur Claude Guéant, jugé pour escroquerie concernant ses frais de campagne législative 2012, qui a dénoncé de "très grandes injustices".


Pour son sursis probatoire sur trois ans, le parquet lui demande de justifier de ses activités, d'indemniser la partie civile (l'agent judiciaire de l'Etat), et de régler ses dettes au Trésor public.

Le tribunal correctionnel rendra sa décision le 22 novembre.

L'homme incontournable de la présidence de Nicolas Sarkozy, aujourd'hui âgé de 77 ans, était en 2012 candidat à la députation dans les Hauts-de-Seine. L'accusation lui reproche d'avoir sciemment minoré ses comptes de campagne et ainsi obtenu un remboursement de plus de 30.000 euros.

"La probité des futurs élus commence par la probité des candidats qui briguent les suffrages", a déclaré mercredi la procureure Nathalie Foy. "Même si les sommes en jeu ne sont pas considérables, cette situation ne doit pas être banalisée" car elle "jette le discrédit sur la vie politique".

En 2012, a-t-elle ajouté, M. Guéant "était un homme de tout premier plan, un homme extrêmement puissant", secrétaire général de la présidence puis ministre de l'Intérieur.

A son encontre, la représentante du parquet a également requis 50.000 euros d'amende, la privation de ses droits civiques, l'interdiction de la fonction publique et d'être mandataire social pendant cinq ans.

"La procureure a requis une mort civile", a déploré l'avocat de Claude Guéant, qui a plaidé sa relaxe.

– "Lettre maladroite" –

Un courrier de quatre pages est au cœur de cette enquête.

Dans cette lettre du 3 janvier 2012, Pierre-Christophe Baguet, maire UMP (devenu LR) de Boulogne-Billancourt et député sortant des Hauts-de-Seine, avait annoncé soutenir Claude Guéant pour lui succéder à l'Assemblée nationale. Il y avait joint la déclaration de candidature de ce dernier.

La procureure accuse MM. Baguet et Guéant d'avoir cherché à faire financer "ce document de propagande distribué à 60.000 exemplaires" par la ville de Boulogne-Billancourt.

Les deux prévenus contestent. Me Philippe Bouchez El Ghozi, avocat de M. Guéant, a affirmé que son client n'avait pas donné "d'accord express" pour la publication de cette lettre. Me Mario Stasi, avocat de M. Baguet, a reconnu une "lettre maladroite"mais pas un délit.

Le parquet a demandé d'"infliger une très, très sérieuse mise en garde" à Pierre-Christophe Baguet. Le maximum de la peine pour financement illicite de campagne a été requis, soit un an d'emprisonnement avec sursis et 3.750 euros d'amende.

Ces deux hommes incarnent une "corruption des mœurs politiques qui irradie et pousse d'autres personnes dans son sillage", a considéré la procureure.

Elle a requis des peines de prison avec sursis ou des amendes contre deux anciennes employées de la mairie et le gérant de l'imprimerie de la lettre.

– Tableau "très noir" –

Tous ont plaidé la relaxe.

M. Guéant n'en est pas à sa première péripétie judiciaire.

Il est le premier locataire de la place Beauvau à avoir été incarcéré, du 13 décembre 2021 au 9 février 2022.

La justice avait estimé qu'il ne s'acquittait pas dans les temps de l'amende et des dommages et intérêts qu'il avait été condamné à payer dans l'affaire dite des primes en liquide du ministère de l'Intérieur.

Cette incarcération a été "une épreuve extrêmement douloureuse", a confié Claude Guéant au tribunal, rappelant sa "santé fragile". "Quitte à paraître présomptueux, le tableau qui est fait de moi est très noir", a-t-il ajouté, "dans ma vie, j'ai fait un certain nombre de choses très positives".

L'ex-ministre doit par ailleurs être rejugé dans le dossier des sondages de l'Elysée, après avoir fait appel de sa condamnation en janvier à un an de prison, dont huit mois ferme, pour favoritisme.

Il est également mis en examen dans l'affaire des soupçons de financement libyen de la campagne présidentielle victorieuse de Nicolas Sarkozy en 2007.

M. Guéant a dit "très mal" vivre ces procédures pénales "répétées". "J'ai eu une vie personnelle et professionnelle sous le signe d'une totale honnêteté et intégrité (…) J'ai le sentiment de très grandes injustices".

AFP

Créé le 13 octobre 2022 10:32

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