Cas des migrants à Sfax : « Nous ferons tout pour récupérer les guinéens… », assure Morissanda Kouyaté
CONAKRY-Les autorités guinéennes observent de près les évènements en cours en Tunisie, notamment dans la ville de Sfax où la mort d’un tunisien a provoqué un déchainement de violences contre les migrants subsahariens.
Face à cette résurgence des tensions, Africaguinee.com a pu interroger le ministre guinéen des affaires étrangères. Dr Morissanda Kouyaté explique les premières actions envisagées par Conakry pour gérer cette nouvelle crise. Il évoque cependant des difficultés auxquelles les autorités guinéennes sont confrontées. Entretien exclusif !!!
AFRICAGUINEE.COM : Il y a une résurgence des tensions contre les migrants subsahariens en Tunisie. Quelles sont les dispositions envisagées par le Gouvernement pour aider les guinéens ?
DR MORISSANDA KOUYATÉ : Depuis hier (jeudi 06 juillet, ndlr) je suis en train de me battre, mais j’avoue que c’est très compliqué. Parce que nous avons fait dix voyages en Tunisie. Pendant ces dix voyages, nous avons ramené ceux qui voulaient revenir. Les autres ont dit qu’ils ne viennent pas. Or, c’est sur la base du volontariat que les rapatriements se font. Nous ne pouvons pas forcer les gens à revenir. Ils sont restés mais nous leur avions dit que si ça a commencé comme ça, c’est sûr que ça va continuer tôt ou tard, mais ils n’ont pas compris. Il y en a même, c’est à l’aéroport qu’ils ont désisté. Ils ont été enregistrés pour le voyage, ils ont pris l’argent…arrivé à l’aéroport, ils ont disparu. Mais j’ai dit que ce n’est pas grave, l’essentiel est que l’Etat soit là. Nous avons affrété dix fois l’avion en Tunisie, les deux derniers vols d’ailleurs, c’était des gros porteurs. Donc, à la date d’aujourd’hui ceux qui sont restés en Tunisie sont ceux qui ont refusé de revenir. J’étais présent moi-même et c’est moi-même qui ai remis les enveloppes individuellement.
Malheureusement, ce qui se passe en ce moment, non seulement, les gens ont commencé à les torturer, les frapper, mais ils les ont embarqués pour les envoyer dans un no mans land vers la Lybie. Je me bats avec mes équipes, nous avons quelques contacts qui ne passent plus, malheureusement. Leurs téléphones doivent être certainement déchargés, c’est difficile de mettre main sur eux. Mais je suis en train de voir avec notre consul qui se trouve en Tunisie pour essayer de trouver une solution. J’ai parlé avec mon homologue tunisien, je vais faire tout ce qui est possible.
Parce qu’il y a une chose qu’on ne fera pas, c’est de dire : ils ont refusé de revenir et tant pis pour eux. On ne le fera pas. Ils restent des guinéens. Qu’ils acceptent ou pas, que l’on soit fâché ou non, ils ont droit à notre protection. C’est notre rôle. Donc, je suis en train de me battre, y compris appeler mon homologue tunisien avec lequel j’ai de très bons rapports pour voir comment nous pouvons récupérer les guinéens. Je ne suis pas sûr à 100% parce que c’est trop compliqué, mais nous nous battons.
Parlant des violences à Sfax, est-ce qu’on vous a notifié des cas où des guinéens ont été agressés ou raflés ?
Nous n’avons pas eu des cas officiellement signalés. Nous-mêmes, nous ne l’avons pas constaté, nous n’avons pas eu de plaintes depuis que nous avons quitté. Cela peut être dû au fait qu’ils avaient refusé de revenir, ils sont certainement gênés de retourner vers nous pour dire que ça ne va pas. C’est à travers nos propres réseaux qu’on a activé pour avoir quelques numéros de téléphones mais qui ne passent plus, hélas. Mais nous sommes en train de nous battre. Nous ferons tout ce qui humainement possible pour que consciencieusement, l’on soit sûr d’avoir utilisé tous les moyens. Nous e souhaitons pas qu’il y ait des situations dramatiques.
Certains guinéens rapatriés de Tunisie ont manifesté deux fois à Conakry pour demander au Gouvernement d’honorer ses engagements relatifs à la facilitation de leur réinsertion. Où est-ce qu’on en est dans ce processus ?
Nous n’avons promis à personne que quand il va revenir en Guinée, nous allons lui donner du travail. Le Gouvernement est équitable. Si celui qui a pris le chemin, il est parti sans réussir à passer, le Gouvernement est allé à son secours pour le ramener sain et sauf, à celui-ci nous lui donnons tout, celui qui n’a pas quitté, qui a fait ses études, qui a cru en son pays et qui est resté, il va dire quoi ? Est-ce qu’il y a une différence entre les deux ?
Il y a des gens qui racontent beaucoup de choses en disant que l’OIM (organisation internationale pour les migrations) a fait ceci ou cela, personne n’a donné de l’argent au Gouvernement. C’est le Président de la Transition qui mis l’avion à disposition avec les moyens. Il m’a instruit de partir les chercher. J’ai fait dix voyages, mais personne ne nous a aidé.
Un message à l’endroit de tous ces guinéens de la diaspora…
Le Chef de l’Etat dans son programme a mis en priorité les guinéens tout court, qu’ils soient en Guinée ou à l’extérieur. Ceci n’est pas un slogan. C’est pourquoi quand il y a un seul guinéen malade à l’étranger, nous essayons d’entrer en contact avec lui. Si je peux demander au pays hôte de m’aider à le prendre en charge, je le fais pour appliquer cette politique du Gouvernement et du Président de la République. Parce qu’un citoyen ne peut compter que sur son gouvernement d’abord. C’est la priorité, tout le reste vient après.
Certes, on n’a pas tous les moyens mais on se débrouille pour résoudre les problèmes de ceux qui en ont le plus besoin d’être secourus. Les guinéens doivent savoir qu’ils ont un Gouvernement auquel ils peuvent s’adresser lorsqu’ils ont des difficultés. Moi, je ferai tout pour appliquer cette politique du Président de la République.
Entretien réalisé par Boubacar 1 Diallo
Pour Africaguinee.com
Créé le 7 juillet 2023 21:29Nous vous proposons aussi
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