Bah Ousmane, ministre d’Etat à la présidence: Pourquoi j’ai quitté la Guinée? (interview)

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CONAKRY-Pourquoi Bah Ousmane a quitté la Guinée pour le Canada? Ce ministre d'Etat et allié du président Alpha Condé a brisé le silence.Dans cet entretien exclusif, il lève un coin du voile sur ses intentions et s'exprime sur l'attitude de l'opposition qui menace de reprendre ses manifestations dans le pays.


AFRICAGUINEE.COM : Monsieur le Ministre d’Etat Bah Ousmane bonjour !

BAH OUSMANE : Oui bonjour Monsieur Souaré !

Cela fait plusieurs mois depuis que vous avez quitté la Guinée. Peut-on connaître les raisons de votre long séjour du côté du Canada ?

Il se dit beaucoup de choses depuis que je suis parti de Conakry le 24 août pour le Canada via la France. Je suis arrivé au Canada depuis le 29 aout. Je précise que je suis détenteur d’un visa de séjour avec entrées multiples valables pour 3ans. Il m’a été délivré par l’ambassade du Canada à Dakar. Avant mon départ de Conakry j’ai été reçu le vendredi 22 août par Monsieur le président de la République, j’étais accompagné de deux cadres du bureau exécutif de l’UPR (Union pour le Progèrs de la Guinée, son parti politique, Ndlr). Au cours de l’audience j’ai exposé le motif de mon voyage, combien de temps j’avais prévu. J’avais prévu de rester deux ou trois semaines. C’est après que j’ai quitté Conakry. Lorsque je suis arrivé au Canada j’avais  ma troisième fille malade. Ça fait deux ans que l’avais pas vu. Mais je me suis rendu compte que son état de santé s’était dégradé.   J’ai informé le Chef de l’Etat qui m’a fait part de son soutien, il m’a dit de rester là pour son suivi. J’ai eu l’occasion de parler avec lui lorsqu’il s’est déplacé pour l’Assemblée Générale des Nations-Unies. Voilà le contexte dans lequel je suis arrivé ici. Depuis que je suis là, j’ai parlé deux fois avec le président pour lui faire le point de la situation. La dernière fois, c’était il y a une semaine, pour l’informer que e l’état de santé de ma fille était préoccupant, mais que je vais rentrer en Guinée, ensuite revenir incessamment pour continuer à suivre ma fille. Le président m’a demandé de rester et que j’avais tout son soutien. C’est ça le contexte.

Maintenant ce qui se dit : ‘’demandeurs d’asile au Canada’’, ça me fait rire. Pourquoi ? Pour quelle raison ? Je ne l’ai pas fait il y a 20 ans que ma famille vit ici. Pourquoi maintenant ? J’ai de bonnes raisons de ne pas demeurer ici parce que :

1-J’aime mon pays, je suis bien attaché à la Guinée. J’ai commencé à servir ce pays j’avais presque huit ou neuf ans, et je sais ce que j’ai fait comme carrière politique pour servir la Guinée, ce n’est pas maintenant que je vais quitter la Guinée.

2- J’ai un parti politique que je dirige. Je suis président de l’UPR, je tiens à ce parti. Je suis fondateur de l’UPR et ma voix a été très décisive dans la création de l’UPR. Vous pouvez vous informer pour l’histoire.

3-Ensuite, j’ai ma famille en Guinée, j’ai ma mère en Guinée qui est âgée de 87 ans. Depuis que je suis né je ne l’avais jamais quitté auparavant. C’est la première fois que je suis resté aussi longtemps absent de l’entourage direct de ma mère. Je la voyais chaque jour. Donc j’ai de bonnes raisons de ne pas fuir la Guinée.

Mais bien avant votre départ de Conakry on vous voyait rarement aux côtés du Président de la République dont vous êtes pourtant un des conseillers spéciaux…

J’ai été nommé ministre d’Etat conseiller spécial de Monsieur le président. Il a toujours utilisé mes services. Je précise que j’ai un bureau dans l’enceinte de la présidence qui m’a été affecté par Monsieur le président. A chaque fois qu’il a eu besoin de moi, il me fait appel et j’ai exécuté les missions qu’il m’a confiées à l’étranger et à l’intérieur du pays. J’exécute les travaux qu’il me confie. Je ne suis pas ministre du Gouvernement, mais je suis dans la structure de la présidence. Je pense en tant que conseiller spécial du président, je peux ne pas être toujours sur la scène de l’actualité.

Des observateurs estiment que vos relations avec le Chef de l’Etat se sont un peu refroidies depuis que vous avez quitté votre poste de ministre d’Etat aux travaux publics. Votre réaction ?

Moi je suis toujours mon destin. Mes relations, je les maintiens toujours. Monsieur le président de la République, je l’ai connu depuis 1992. Depuis nous travaillions ensemble dans le cadre de l’opposition guinéenne. Et lorsqu’il s’est agi du 2ème tour de l’élection présidentielle, mon parti et moi-même sommes alliés à lui. C’était une conséquence des relations que nous avions depuis jusqu’à maintenant. Alors s’il se dit que nos relations se sont distendues, je tiens à préciser que mes relations, je les garde. Et si d’aventure, il y a une quelconque décision que je devrais être amené à prendre,  compte tenu d’un contexte, je vous assure que j’aurai pu la prendre. Mais pour le moment, nous sommes alliés, je n’ai pas encore vu d’aléas à cela. Nous sommes liés par un accord politique que nous avons signé au mois d’août 2010.

En tant que président du parti UPR, quelle analyse faites-vous de la situation socio-politique qui prévaut en Guinée ?

Aujourd’hui, l’analyse que nous devons faire, c’est d’abord faire le constat qui résulte malheureusement de cette épidémie de fièvre hémorragique à virus Ebola qui frappe notre pays. Une épidémie avec des conséquences sociales très lourdes, sans parler des conséquences économiques. Aujourd’hui, nous avons vu combien de fois cette épidémie a affecté les populations guinéennes, et   mis à rude épreuve notre économie. Les partenaires sont plus réticents à venir en Guinée, certains projets sont arrêtés. Donc, cette épidémie a créé beaucoup de difficultés économiques à notre pays. Sur le plan social, il y a des familles qui sont déchirées par la perte presque de tous ses membres. Nous sommes en train de vivre des évènements très douloureux actuellement, et qui minent l’avancée de notre pays dans les années à venir.

Mais à côté il y a heureusement cette mobilisation  générale des populations. Et, il a fallu cette mobilisation pour arriver à ce résultat que nous sommes en train d’obtenir aujourd’hui.

Que pensez-vous des menaces de l’opposition guinéenne qui n’exclue pas de reprendre ses manifestations de rue si ses revendications ne sont pas prises en compte par le Gouvernement ?

Dans un pays démocratique, les manifestations et les revendications sont de mises. Un parti d’opposition est fait pour contester le pouvoir qui est là. Pour ce qui de la recomposition de la CENI (Commission Electorale Nationale Indépendante, Ndlr), il y a une loi qui dispose des attributions et du fonctionnement de la CENI. La composition de la CENI est faite en sorte que les différentes mouvances soient représentées (majorité et opposition), la société civile et l’administration. La loi dispose qu’il appartient aux différentes entités de désigner ses représentants au sein de cette structure. Alors si aujourd’hui l’opposition demande la recomposition de la CENI, là il y a un problème puisque les différents partis de l’opposition sont représentés au sein de la CENI.

Les autres revendications qui sont évoquées, je pense qu’il faut les régler dans le cadre d’un dialogue. C’est vrai que le dialogue n’est pas facile entre l’opposition et la mouvance présidentielle, ce n’est pas nouveau et ce n’est pas spécifique à la Guinée. Nous avons été de l’opposition pendant plusieurs années, nous savons comment ça se passait, mais il faut privilégier le dialogue surtout qu’en ce moment, notre pays traverse une situation très difficile. Il faut dialoguer.

Bien qu’aucun calendrier précis n’ait été pour l’instant défini par la CENI, peut-on savoir comment vous comptez aborder les prochains rendez-vous électoraux avec votre formation politique, l’UPR ?

A propos du calendrier électoral, comme vous le dites rien n’est encore ébauché. Mais un parti politique se querelle pour conquérir le pouvoir. Je suis ici pour une certaine période, dès ma rentrée en Guinée, avec le bureau exécutif, nous allons mettre en place un calendrier de nos activités. Nous allons tenir soit un comité central ou un congrès pour faire le point de la situation et déterminer notre démarche.

Peut-on s’attendre à votre candidature à l’élection présidentielle en 1015 ?

El hadj Bah Ousmane n’est pas le candidat naturel du parti. Les textes de notre parti disposent que ce n’est pas seulement le président du parti qui peut être candidat. Mais c’est au parti de décider si oui ou non d’abord  nous présenterons un candidat et celui qui va être ce candidat.

Quel va être votre camp ?

Tout ceci sera déterminé par le congrès ou la session du comité central.

Merci beaucoup Monsieur le Ministre d’Etat !

Merci, je voudrais vous féliciter pour le travail que vous faites et exprimer un  souci que certains de vos confrères relaient des rumeurs et des informations non-fondées. Je crois qu’ils ont l’obligation d’informer, mais aussi de vérifier les informations, de les recouper avant de les mettre sur la place publique.  Je suis ici pour des raisons de famille et je rentrerai en Guinée pour continuer mon combat. Je vous encourage.

 

Entretien réalisé par SOUARE Mamadou Hassimiou

Pour Africaguinee.com

Tél. : (+224) 655 31 11 11

 

Créé le 24 novembre 2014 10:03

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