Bah Oury persiste : « il ne faut pas abdiquer devant la violation de la Constitution… »

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CONAKRY-Bah Oury est ferme ! Il ne faut, selon lui, sous aucun prétexte accepter d’abdiquer devant la violation de la Constitution. L’opposant qui a été interrogé par Africaguinee.com s’est aussi exprimé sur le bras de fer entre le barreau et l’exécutif guinéen autour de la nomination de Mamadi 3 Kaba  à la CENI. L’appel de l’envoyé spécial de l’ONU en Afrique de l’Ouest à l’endroit des acteurs politiques  n’a pas été occulté par M. Bah Oury. Interview !


AFRICAGUINEE.COM : Nous assistons  à un bras de fer judiciaire entre l’Etat guinéen et le barreau qui a décidé d’attaquer le décret du chef de l’Etat nommant Mamady 3 Camara commissaire à la CENI. Comment est-ce que vous observez cette situation ?

BAH OURY : Je crois qu’il faut respecter la loi qui est très explicite. Feu Salif Kebe faisait partie du barreau et a été désigné par le barreau guinéen. A la suite de son décès, étant un commissaire désigné par le barreau, ce dernier de par la loi doit désigner un autre commissaire pour le remplacer. C’est en conformité avec l’esprit de la loi telle qu’elle existe.

Il a eu quand même des précédents où par exemple  le FNDC qui a saisi les juridictions guinéennes qui se sont déclarées incompétentes. Peut-on s’attendre à un scenario similaire ?

Tout est possible parce que vous savez on ne fonctionne plus dans l’esprit de l’Etat de Droit. C’est le fait du prince, c’est la volonté d’imposer ses desiderata qui l’emporte sur le respect des lois de la république. Malheureusement c’est devenu devenue une marque de fabrique. C’est un constat. Mais quoi qu’il en soit, il est de la responsabilité du barreau de faire en sorte que la loi soit respectée en la matière.

Le climat politique guinéen est toujours crispé alors que la présidentielle approche à grand pas. Croyez à une chance de renouer le fil du dialogue pour aborder cette joute de manière plus ou moins sereine ?

Vous savez il y’a eu un contentieux extrêmement lourd dont la création incombe totalement au pouvoir en place. Le fait de violer la loi constitutionnelle, c’est-à-dire le fait de changer la constitution de 2010 et le fait d’organiser des élections législatives avec un fichier totalement corrompu, posent deux sérieux problèmes qu’il faut résoudre fondamentalement avant de parler de quoi que ce soit. Donc s’il doit y avoir discussion, s’il doit y avoir un dialogue, c’est autour de ces deux points. Et comment les résoudrepolitiquement ? Est-ce que c’est avec le pouvoir en place ?  Est-ce que c’est une situation exceptionnelle qui amènerait la société guinéenne à pouvoir résoudre ces deux questions majeures ?  Pour le moment ce que nous souhaitons, c’est que la Guinée puisse résoudre ces deux questions qui conditionnent la possibilité de la paix et de la stabilité de la Guinée. L’impunité ne doit pas être encouragée.

Nous ne devons sous aucun prétexte  fermer les yeux sur les méfaits, sur les tueries  et les violations graves de la constitution, pour croire qu’on va gagner la paix et la stabilité. Au contraire, nous allons réduire l’espace de la stabilité à zéro. Et c’est en allant dans cette direction, nous transformerons notre pays en une Haïti. Je respecte bien entendu Haïti. Mais ce pays qui a été le premier à être indépendant depuis 1803, de fait d’une gouvernance catastrophique dans la durée ne parvient pas aujourd’hui d’avoir la paix, la stabilité et le développement. La Guinée ne doit pas s’engager dans la logique d’une Haïti en Afrique. C’est la raison pour laquelle il faut rester ferme; il ne faut pas accepter d’abdiquer devant la violation de la constitution et devant la mise en œuvre d’un fichier électoral totalement corrompu qui ne pourra que générer, discrimination, violence et instabilité.

Le représentant spécial du secrétaire général des Nations-Unies en Afrique de l’ouest a co-signé une tribune avec le président de la commission de la CEDEAO qui appellent les Etats de la sous-régions qui ont des joutes électorales majeures cette année à s’inscrire dans une logique de dialogue pour trouver un consensus sur le maintien ou le report de ces scrutins. Qu’est-ce que vous pensez de cet appel ?

Cet appel ne s’adresse pas à la Guinée dans mon entendement. Cet appel s’adresse à la Côte-d’Ivoire et à d’autres pays  qui doivent s’engager dans un processus électoral durant cette année 2020. Puisque nous faisons face à une crise majeure avec le Covid-19, donc c’est de ce point de vue pertinent d’aller dans ce sens.

Mais en ce qui concerne la Guinée, la CEDEAO doit assumer notamment le président de cette commission doit assumer ses responsabilités. Etre complaisant à l’égard des violations graves des constitutions qui remettent en cause la limitation des mandats présidentiels, c’est ouvrir la boite à pandores qui fera en sorte que la CEDEAO risque de sombrer dans le chaos. Nous avons déjà un sérieux problème qui est l’instabilité et l’insécurité dans une bonne partie des pays du sahel avec des Etats fragiles. Le président de la commission de la CEDEAO doit assumer avec force et détermination la mission qui est la sienne, celle d’assurer la paix, le développement de la démocratie et la stabilité dans l’espace CEDCEAO. Toute attitude complaisante est une prime accordée à ceux qui vont violer les Droits de l’Homme, violer les constitutions au péril des vies humaines qu’ils vont dans une certaine mesure briser. Il ne faudrait pas que nous soyons complaisants à cet égard.

Croyez-vous à une chance de la tenue de la présidentielle cette année en Guinée ?

J’ai des doutes par rapport çà cela pour plusieurs raisons. Déjà nous avons une crise politique majeure, nous avons une crise économique qui est là, nous avons une crise sociale larvée qui est sourde et nous avons un peuple profondément en colère. En rajoutant là-dessus la crise sanitaire qui est là, donc les conditions pour cela ne sont pas du tout réunies pour qu’on puisse parler d’une élection présidentielle en 2020. Maintenant il est important que la Guinée avec l’aide de Dieu ait les moyens politiques pour une sortie de crise qui assurera la stabilité et la paix dans notre pays.

A vous entendre on se dirige droit vers un glissement. Ce qui suppose que le président Alpha Condé irait au-delà de son mandat qui doit s’arrêter en 2020 ?

Bon, les circonstances politiques peuvent évoluer. Mais quoi qu’il en soit, cela veut dire qu’une situation exceptionnelle va s’imposer très bientôt. A partir de ce moment-là, la responsabilité des autorités actuelles, c’est de prendre langue avec la communauté des Chefs d’Etats de l’espace CEDEAO qui sont dans un premier aspect, les interlocuteurs les plus immédiats dans le cadre de la résolution à travers les instances internationales de la crise politique guinéenne pour envisager des solutions. Mais quoi qu’il en soit, le maintien du Statu-quo n’est pas du tout envisageable. Il est indispensable que la Guinée trouve les formes de transition qui lui permettront de continuer à aller de l’avant dans la paix, la stabilité et dans la conformité avec le respect des principes de l’Etat de Droit.

Entretien réalisé par Diallo Boubacar 1

Pour Africaguinee.com

Tel : (00224) 655 311 112

Créé le 25 mai 2020 12:47

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