Assignation de l’Etat en justice et audits en Guinée : El hadj Mamadou Sylla brise le silence ! (Interview)

El hadj Mamadou Sylla

CONAKRY- Le président du patronat guinéen a enfin décidé de briser le silence ! El hadj Mamadou Sylla, Président Directeur Général du groupe Futurelec Holding explique les motivations de sa décision d’assigner l’Etat guinéen en justice. Allié du président Alpha Condé depuis 2010, El hadj Mamadou Sylla réaffirme sa volonté d’aller loin, et très loin d’ailleurs, pour que l’Etat guinéen paye sa créance. Entretien exclusif !!!


 

AFRICAGUINEE.COM : El hadj Mamadou Sylla bonjour !

EL HADJ MAMADOU SYLLA : Oui bonjour !

Vous avez assigné l’Etat guinéen en justice ce week-end, expliquez-nous pourquoi ? 

C’est une affaire qui est signée entre trois parties (Futurelec Holding, l’Etat guinéen et la Banque Centrale de la République de Guinée, Ndlr) le 15 décembre 2008. La Banque  Centrale de la République de Guinée (BCRG) s’est engagée à payer non seulement six millions  de dollars à la signature, et deux titres ont été émis à l’époque. Les deux s’évaluent à peu près à 13 millions de dollars. En tout, c’est 19.794.619 USD  (dix neuf millions sept-cent quatre-vingt quatorze mille six cent dix neuf dollars américain. Depuis ce temps là, c’est vrai qu’il y a eu la mort du président Conté une semaine après la signature, rien ne m’a été payé.  

Les militaires sont venus au pouvoir après. Toutes les institutions ont été dissoutes par la junte. On a réclamé l’argent, les militaires n’ont pas payé parce qu’on disait qu’on était en transition. Mais aujourd’hui, il est temps que la BCRG paie ce montant maintenant. Parce que ceci a trop duré.

En réparation des préjudices subis, vous réclamez le paiement de dix milliards de francs guinéens à titre de dommage et intérêts. Ne pensez-vous pas que cela soit exorbitant ?

Notre avocat  et l’huissier ont visé  sur les transactions commerciales. La loi est  claire  là dessus. Si cet argent m'appertenait, 20 millions de dollars aujourd’hui, je serais parti loin. Si vous voyez que toutes mes sociétés sont en faillite, c’est à cause de ça. Si l’Etat reste devoir  à un seul individu plus de 20 millions de dollars, j’aimerais bien voir aujourd’hui en Guinée quelle est cette personne qui a ce montant. Même quand je vois la signature ou les prêts d’argent que l’Etat fait avec les bailleurs de fonds, c’est autour de 5 millions de dollars jusqu’à 17 millions de dollars.

 Donc, moi qui ai aidé l’Etat dans l’effort de guerre (en 200o, lors de l’agression rebelle dans le sud du pays, ndlr) normalement je devrais être payé. Aujourd’hui ça me fait un grand préjudice. Comme conséquence de cette dette,  j’ai fermé toutes mes sociétés. J’avais plus de 1000 travailleurs dans mes différentes sociétés, mais aujourd’hui tout le monde est menacé. Parce que si moi-même le financier  j’ai des problèmes, cela va se répercuter sur eux.

Les titres d’Etat et la convention qu’on a signés, c’était tellement bien ficelé et tout, et ceci a été recommandé par le Fonds Monétaire et la Banque Mondiale,  qui ont exigé qu’un audit soit fait entre nous. Et puis, si c’est moi qui devais, j’aurais été tenu de rembourser. Mais c’était le contraire. C’est l’Etat et la Banque Centrale qui me doivent. La BCRG a pris l’engagement. Le titre c’est comme un chèque, tu donnes à quelqu’un, il  part pour toucher l’argent. Donc, la créance est là, c’est incontestable. Parce qu’il y a des conventions et tout le monde a signé.

Pourquoi avez-vous attendu d’être cité dans les résultats d’audits avant d’assigner l’Etat en justice pour le paiement de votre créance ?

Ecoutez ! L’audit qui est sorti, jusqu’à preuve de contraire, je ne vois pas où on dit qu’El Hadj Sylla ou son groupe Futurelc doit à l’Etat. Donc, les audits ne me concernent pas. On dit que ce sont les militaires qui ont fait ces audits, mais ils ne sont pas habilités à le faire. C’est comme quand tu dis à un chien de venir manger alors que tu as un bâton en main. Il ne viendra pas. Donc, les militaires ne sont pas habilités à faire les audits, parce qu’ils ont la force, les fusils et tout. Mais malgré tout ça, moi j’ai été convoqué et j’ai répondu. Mais comme c’est un montant qui était obtenu avec un audit qui a été fait par un cabinet d’audit privé, indépendant, les militaires ont compris. J’ai tous ces papiers. Après toutes les enquêtes qui ont été faites, ils ont reconnu que c’est l’Etat qui me doit de l'argent.

C’est pourquoi je dis que cet audit ne me concerne pas. Là où mon nom est cité, c’est dans l’affaire d’avion. Et l’avion en question, je l'ai acheté, je ne l'ai pas volé. Et, celui qui me l'a vendu je pense que techniquement en tant que chef de département, ce ministre était habilité à le faire. Bien qu’il y a tout un arsenal de lois qui accompagne cette vente. On sait que c’est le ministère des transports qui commande les avions, qui gère, mais quand il s’agit de vendre, il y a une unité de privatisation, il y a aussi le ministère de l’Economie et des Finances. Et puis, il y a eu un décret qui a dissout Air Guinée. Alors à partir du moment où toutes ces choses là sont réunies, moi je ne suis pas concerné par un audit sur la vente des avions. Ça c’est entre administration. Si quelqu’un est habilité à vendre ou pas les avions, je ne suis pas concerné, je suis client.

Même l’inspecteur général d’Etat, Massoud Thiam  m’a invité. J’ai été avec mon groupe, on a montré mes papiers, ils ont même appelé l’auditeur indépendant qui avait géré le dossier. Thiam a vu. Il a vu qu’il était obligé de classer le dossier, parce qu’il a compris que c’était clair. Voilà, aujourd’hui tout est clair. Si quelqu’un dit que je dois dans les audits, il n’a qu’à prouver, moi j’ai prouvé qu’on me doit.

C’est pourquoi je réclame aujourd’hui. J’ai trop attendu.  La Banque Centrale ne s’est pas exécutée, je demande que la loi soit dite parce qu’on est dans un pays de droit. De toute façon, si on dit le droit ici, tant mieux ! Si on refuse le droit ici, on ira ailleurs.

Vous n’excluez pas  de porter l’affaire devant les juridictions internationales si vous n’êtes pas satisfaits ?

Je ferai tout ce qui est en ma possession pour récupérer mon droit maintenant. Je suis déterminé et décidé maintenant. Et puis, il n’y a pas que ce dossier là. Il y a d’autres dossiers, tels que l’organisation du cinquantenaire (en 2008, ndlr). J’ai donné 10 milliards de francs guinéens en crédit cash pour la réussite de l’organisation du cinquantenaire. J’ai toutes les preuves. Les militaires quand ils sont venus, ils ont pris aussi des véhicules dans ma cour. J’ai tout ces documents là. Quand on prend le cas de l’hôtel Kaloum, j’ai un bail, j’ai beaucoup  dépensé là-bas. Aujourd’hui, ils ont tout cassé.

Vous évaluerez tout ça à hauteur de combien ?

Je  ne sais pas exactement, mais en gros quand j’évalue tout ce que l’Etat me doit,  il faut compter dans les deux cents milliards de francs guinéens

Merci Monsieur Sylla !

C’est à moi de vous remercier !

 

Entretien réalisé par Diallo Boubacar 1

Pour Africaguinee.com

Tel : (00224) 655 31 11 12

Créé le 25 août 2014 12:23

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