Aboubacar Sylla : ‘’On a renforcé le contingent de Donzos à Conakry pour réprimer nos manifestations…’’ (Interview)

Aboubacar Sylla

CONAKRY- L’opposition guinéenne va-t-elle répondre favorablement à l’appel lancé par la France pour une reprise rapide du dialogue politique ? Quelles sont ses nouvelles exigences pour son retour autour de la table du dialogue ? Alors que l’opposition a annoncé une nouvelle manifestation ce lundi 20 avril, son porte-parole Aboubacar Sylla, vient de dénoncer la présence d’une milice appelée « Donzo » qui serait chargée de réprimer toutes leurs manifestations. Dans cet entretien exclusif accordé à notre rédaction, Aboubacar Sylla,  porte-parole de l’opposition guinéenne réagit également après les dernières déclarations du Président Alpha Condé sur la crise politique.


AFRICAGUINEE.COM : Honorable Aboubacar Sylla bonjour !

ABOUBACAR SYLLA : Oui bonjour !

Que pensez-vous de l’appel de la France demandant aux acteurs politiques guinéens et au Gouvernement de privilégier le dialogue afin d’aplanir leurs divergences sur le processus électoral?

Pour ce qui nous concerne, nous pensons que les autorités françaises enfoncent une porte ouverte. Nous sommes demandeurs de dialogue depuis quatre ans. Mais évidement inspirés par l’expérience des précédents dialogues où le Gouvernement n’hésite pas à se dédier, et à renier à ses engagements, à violer sa propre signature, nous ferons en sorte que si dialogue doit y avoir, qu'il ne ressemble pas aux précédents.

Pour nous prouver la bonne foi du pouvoir, nous avons demandé  que la CENI (Commission électorale nationale indépendante, Ndlr) gèle ses activités. Cela s’est passé en 2013, le processus électoral a été momentanément interrompu jusqu’à la fin du dialogue.

Nous avons également demandé que le chronogramme de la discorde, qui a été à la base de la crise politique actuelle, soit purement et simplement annulé par la CENI. Il ne servirait à rien d’aller à un dialogue si l’objet même du dialogue devient obsolète du fait de la poursuite du déroulement du chronogramme de la CENI.

Par ailleurs nous avons exigé que tous les manifestants arrêtés dans l’exercice de leur droit  constitutionnel soient relaxés. Ils ont été arrêtés de façon violente parfois dans leur concession ou dans leur lieu de travail. Les chefs d’inculpation d’occupation illégale sur les voies publiques ou de participation à une manifestation non autorisée, ne sont pas du tout fondés. L’attroupement sur les voies publiques n’est pas prouvé par l’illégalité.

Nous avons dit que nous ne reconnaissons pas ces autorités locales. Les délégations spéciales n’ont plus de mandat. Donc, nous n’avons aucune obligation à leurs soumettre nos courriers.

 C’est pour cette raison que nous avons estimé que les chefs d’inculpation qui ont été brandis pour condamner de façon hâtive nos militants sont totalement infondés. Nous avons donc, demandé à ce que ces manifestants soient libérés. Tout ceci prouvera que le Pouvoir est de bonne foi et qu’il est effectivement disposé à un dialogue. Si ces conditions sont réunies nous n’aurons aucun inconvénient à nous retrouver avec le Gouvernement avec sa mouvance politique pour discuter d’abord du cadre de dialogue, c'est-à-dire définir l’identité des personnes et de tous les protagonistes qui vont être autour de la table pour discuter y compris de l’accompagnement et de la  facilitation qui doit être mise en place.

Ensuite nous allons discuter du menu de l’ordre du jour pour que nous puissions en débattre.

Mais il ne sert absolument en rien d’organiser un dialogue si les différents points de discorde sont déjà obsolètes. C'est-à-dire qu’aucun dialogue n’est possible sans que l’ordre du jour ne porte sur la CENI et sur le chronogramme électoral.

Est-ce que ces exigences que vous brandissez, ne sont pas illusoires d’autant plus que le Chef de l’Etat qui  s’est déjà exprimé sur le chronogramme, a affirmé que les élections locales ne sont plus tenables avant la présidentielle ?

Je peux dire qu’il a pratiquement tué dans l’œuf ce dialogue politique qui était en train d’être  réclamé par tout  le monde. La société civile, la  communauté internationale et l’opinion nationale également. Qu’il affirme que les élections locales ne peuvent pas se tenir avant 2016, il a totalement tué ce dialogue dans l’œuf. Parce que le point principal à débattre lors de ce dialogue, c’est bien le chronogramme électoral qu’il vient de tuer dans l’œuf en émettant un verdict qui rend ce dialogue sans objet.

Le deuxième point qui est la CENI, j’ai entendu le chef de sa mouvance politique à l’Assemblée Nationale (Amadou Damaro Camara, Ndlr) affirmé catégoriquement qu’il n’est pas question de toucher à la CENI et qu’en tout état de cause, elle ne sera pas reformée. Or ce sont les points principaux qui pourraient faire l’objet d’un éventuel dialogue. Mais si le Président et sa mouvance politique se sont déterminés par rapport à ces sujets, ils ont déjà tué dans l’œuf toute velléité de concertation dans la mesure où ils ont déjà trouvé des solutions à eux aux préoccupations qui  nous interpellent tous.

Donc, selon vous, il ne reste plus que la rue comme recours pour amener le Pouvoir et la mouvance à lâcher du lest ?

C’est pour ça que l’opposition continue ses marches jusqu’à preuve du contraire. Nous déplorons cette violence qui s’abat toujours sur nos militants. Il y a eu déjà trois morts parmi nos manifestants, une cinquantaine de blessés et il y a eu près d’une centaine d’interpellations dont certains sont déjà devant les tribunaux d’autres déjà condamnés à des peines extrêmement sévères. Tout ça ne dénote pas de la volonté du Gouvernement de décrisper le climat politique pour créer un cadre favorable à un dialogue quelconque.

Vous dénoncez également la présence massive des chasseurs traditionnels « donzo » dans la capitale pour réprimer vos manifestations. Est-ce que vous avez des preuves de ces allégations ?

Nous avons eu des informations précises qui nous ont été données par des personnes très bien informées. Et puis les donzos sont tellement visibles qu’ils ne peuvent pas se confondre sur le paysage ambiant. Ils ont des accoutrements qui attirent facilement le regard sur eux. Déjà en 2013, nous avions connu ce phénomène, il y a eu beaucoup de blessés et des morts. Ces blessures et ces meurtres n’étaient pas toujours l’œuvre des hommes en uniforme. Ce sont des personnes qui se mêlaient aux forces de l’ordre et qui étaient probablement des donzos qui étaient à la base de ces sévices.

Je crois qu’on a encore renforcé le contingent de donzos qui étaient déjà à Conakry. On se souvient qu’il y a eu dans un passé récent des donzos qui ont fait irruption à la Cour d’Appel de Conakry qui ont interrompu un procès et qui ont fait des injonctions au président du tribunal qui a du supplier. Ce contingent a été renforcé. Tout ceci laisse penser que l’appel au dialogue lancé par ce Gouvernement c’est juste pour amuser la galerie et faire une opération de communication alors qu’en réalité au contraire, il est en train de renforcer son arsenal répressif pour engager une véritable épreuve de force avec l’opposition.

 

Entretien réalisé par Diallo Boubacar 1

Pour Africaguinee.com

Tel : (00224à 655 31 11 12

Créé le 19 avril 2015 13:30

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