Chute d’Alpha Condé : Comment vivent les proches des victimes du coup d’Etat…

CONAKRY-En Guinée, ce mardi 5 septembre 2023, il fait deux ans jour pour jour depuis que Alpha Condé a été renversé par le Groupement des Forces Spéciales dirigé par le colonel Mamadi Doumbouya, actuel président de la Transition. Si l’arrivée du comité national du rassemblement pour le développement (CNRD) a été applaudi quasi unanimement, deux ans après, c’est l’image d’une société guinéenne fracturée qui se dégage. Les manifestations de ce jour constituent une preuve éloquente de cette fracture. Deux forces antagoniques s’affrontent. D’un côté, il y a les soutiens de la junte, de l’autre il y a les forces vives qui exigent un retour à l’ordre constitutionnel. Il existe une autre catégorie : ceux et celles qui ont perdu des proches lors du coup d’Etat. C’est le cas de cette veuve d’un membre de la garde rapprochée d’Alpha Condé. Certes, elle n’a pas fait le deuil mais ce qui lui fait beaucoup plus mal, c’est d’apprendre que des artistes organisent un concert.

« On est très choqué. J’ai parlé avec une camarade qui a aussi perdu son mari le 5 septembre 2021 à Sékoutouréyah lors du coup du d’Etat, elle était en larmes. On est obligée d’accepter ce qu’ils décident en ce moment puisque nous n’avons de force. Sinon le 5 septembre ne devrait pas être un jour de concert ou un jour d’anniversaire, ce n’est pas un jour à fêter. Ceux qui fêtent le 5 septembre n’ont pas leurs parents qui sont victimes de ce coup d’Etat. Moi qui ai perdu son mari lors de l’assaut, je sais ce que j’endure. Nous les victimes, chacun ressent sa douleur de son côté. Un 5 septembre n’est pas un jour de concert ou un jour de fête pour la Guinée », a réagi cette veuve en larmes.

Une autre renchérit : « Ces artistes qui ont organisé ce concert n’ont pas des parents victimes du 5 septembre, celui qui a perdu un papa, un frère, un mari, on oncle, un beau-père, un cousin, un neveu lors du coup d’Etat ne peut pas aller s’arrêter sur un podium pour fêter, chanter et danser à l’occasion de l’anniversaire de ces événements. Nous sommes à un jour ouvrable aujourd’hui mais je ne suis pas allé au travail, je suis restée à la maison. Pour ne rien au monde je ne sortirai de la maison aujourd’hui, je suis à jeun, aujourd’hui le 4 septembre ça fait 2 ans jour pour jour… (pleures).

Le samedi 4 septembre 2021 j’ai passé toute la journée avec mon mari à la maison après le dimanche il est parti au travail où il a été tué. Je consacre le 4 septembre de chaque année comme le jour de mon mari, je suis en jeun, je reste à la maison, je ne suis pas allée au travail, je ne peux pas, rien ne peut me faire sortir de la cour aujourd’hui (pleures). Ils n’ont qu’à faire leur concert et fêter leur anniversaire ce n’est pas mon problème, je suis là avec mes enfants (pleures), ça fait très mal qu’Allah fasse justice, je me remets à Dieu (peuple) », a pleuré cette veuve tout en revenant sur les événements du 5 septembre 2021.

Décoration

« Depuis le 5 septembre 2021, nous n’avons vu personne chez nous pour nous consoler à plus forte raison de nous présenter les condoléances. Le corps de mon mari a été décorés mais nous n’avons pas assisté. J’ai réclamé le corps de mon mari mais je n’ai pas reçu, je suis allé à l’hôpital Ignace Deen pour récupérer son attestation de décès mais on ne me l’a pas remis.

Les autorités savent très qu’il y a eu des morts c’est pour cela qu’on a décoré les corps, mais Dieu est Grand. Il est là pour tout le monde, qu’Allah fasse justice. Le jour de la décoration des militaires qui ont été tués le jour du coup d’Etat, c’est quelqu’un qui m’a appelé pour dire de regarder la RTG pour voir. J’ai toujours demandé à mes camarades veuves de rester calme, de demander la justice divine », a fait savoir cette veuve.

Africaguinee.com

Créé le 5 septembre 2023 18:07