Sénégal : Comment les guinéens ont vécu les violences?

DAKAR-Les violences qui ont secoué le Sénégal suite à la condamnation de l’opposant Ousmane Sonko à 2 ans de prison ferme pour  » corruption de la jeunesse », continuent d’alimenter les débats. Ce pays, jadis considéré comme un havre de paix et de stabilité dans la sous-région, a traversé trois jours mouvementés. C’est l’un des pires moments de son histoire.  Un bilan actualisé des violences fait état de 16 morts.


Comment les guinéens ont-ils vécu ces violences ? Africaguinee.com a recueilli les témoignages de certains ressortissants guinéens vivants à Dakar. La plupart des gens interrogés expriment des inquiétudes par rapport à la situation que vit leur pays d’accueil. Alors que le calme revient peu à peu depuis ce lundi, la restriction de la communication sur les réseaux sociaux empêche certains d’avoir des nouvelles de leurs proches.

Diouldé Diallo, coiffeur à Grand-Yoff suit la situation de près. En déplacement à Keur Massar pour rendre visite à une partie de sa famille, le week-end a été long pour lui. Difficilement il est arrivé à destination. Il s’informe difficilement de la situation des guinéens à cause de la restriction de l’internet.

 « Apparemment les manifestants ne se fatiguent pas contre les forces de sécurité. Ils sortent partout, on ne sait plus où il faut les canaliser. Les forces de l’ordre tentent de les contenir en vain parce que partout les manifestants forment des mouvements de façon dispersée. Le mouvement est général, c’est dans tout DAKAR, la banlieue et l’intérieur du pays. A Saint Louis et Ziguinchor, l’effet de contagion a pris réellement forme. La connexion coupée, VPN ne fonctionne pas correctement. Accéder aux compatriotes se complique parce que les gens sont liés par les groupes WhatsApp, sans connexion c’est compliqué. J‘ai appris que quelques magasins ont été touchés à Pikine, mais on parle de cas isolés. Dans l’ensemble ça va, mais avec beaucoup de craintes. Nous avons peur. Juste, il faut que nos parents comprennent, quand ce n’est pas calme il ne faut même pas essayer d’ouvrir sa place quel que soit les raisons, ça attire la colère des manifestants. Si tu es attaqué dans ces conditions, tu ne pourras pas te plaindre, des jeunes incontrôlés sont nombreux dans la rue», a lancé ce jeune compatriote.

Tenancier de café au cœur du marché Sandaga, Souleymane Bah a moins ressenti les violences contrairement à ceux qui vivent dans la banlieue dakaroise.  

« Les violences resonnent partout à Dakar mais là où nous sommes, au Centre-ville, c’est calme. Les tensions c’est dans les quartiers populaires et la banlieue. Il y a eu des pillages par endroit, certains édifices publics ont été également visés. Mais s’attaquer à des ressortissants d’un pays, ce n’est pas arrivé encore. Mais nous n’avons pas toutes les informations encore à cause de la suspension de l’internet», explique Bah Souleymane.

Aliou Bah, jeune étudiant guinéen à Cheikh Anta Diop de Dakar est encore  affecté. L’intensité des violences vécues est sans précèdent. Il témoigne  n’avoir jamais vécu une pareille situation au Sénégal.

« Le Sénégal a connu des violences certes, mais les tensions que nous vivons actuellement je ne l’avais jamais vécu au Sénégal. Certes il y a eu les évènements de Mars 2021 suite au placement en garde à vue de l’opposant Ousmane Sonko pour le cas du prétendu viol et qui a d’ailleurs abouti à cette condamnation dont les faits sont requalifiés en corruption de jeunesse. La violence que nous vivons elle est extrême, elle est énorme. Dans certains points stratégiques, l’armée est déployée pour sécuriser les lieux. La police et la gendarmerie au niveau des carrefours et des grandes artères. En dépit, les violences continuent, l’université Cheikh Anta Diop a été saccagée notamment la faculté de droit et celle des sciences économiques et gestion, l’université Assan Cheikh de Ziguinchor aussi touchée. Pour ce qui viendra, personne ne sait comment ça va se passer, parce que des tracts et des affiches circulent invitant à une manifestation à la place de l’indépendance à Dakar plateau.  Les rues sont désertes  la nuit, la journée agitée, les bus de transport n’ont pas repris couramment », confie cet étudiant guinéen.

I Ndiaye est médecin dans un centre hospitalier de Dakar où il reçoit à son service beaucoup de patients guinéens sur rendez-vous. Ceux reçus entre décembre 2022 et janvier 2023 dont le prochain retour était de 6 mois, leur échéance est arrivée ce juin 2023. Il redoute de leur situation si les violences continuent.

« parmi les étrangers qui viennent pour des soins au Sénégal, les guinéens occupent une place importante. Entre janvier et juin c’est 6 mois, donc l’échéance d’observation arrive à terme, c’est le moment de revenir. Mais s’ils ne trouvent pas de route, ça sera compliqué. Au moins, ils sont 17 patients attendus dans notre hôpital courant juin, parmi eux des asthmatiques, des diabétiques arrivés à une phase, des hypertendus, des personnes âgées souffrant d’arthrose, des cardiotaphe. D’autres aussi sont des nouveaux malades qui doivent venir pour la première fois, les rendez-vous sont déjà établis, il y en a parmi eux des malades qui nécessitent des rééducations de membres suite des AVC. Pour ceux qui connaissent Dakar, si l’autoroute à péage est barricadée,  ceux qui viendront par avion n’auront pas de passage, c’est la voie la plus sure pour arriver à Dakar à partir de l’aéroport. Pour ceux qui emprunteront la voie terrestre, là aussi c’est plus compliqué, l’autoroute nationale est bloquée vers Thiaroye, grand Mbao et Tingueeji. Les risques sont énormes. Si le réseau internet est rétabli au moins, a défaut de pouvoir venir nous allons leur dire de se rapprocher de nos confrères médecins guinéens, nous allons échanger sur un contrôle à distance pour savoir qu’est-ce qu’il faut pour eux, c’est la stratégie qu’il faut envisager si les violences continuent toujours. Nous le souhaitons pas », explique ce spécialiste de la santé.

Fatimatou Diallo évolue dans le commerce import-export entre les deux pays  depuis des années.

« Je suis allée un peu plutôt cette fois, j’ai eu un peu ce que je cherche comme marchandises, c’était prévisible ce qui est arrivé là. Ce qu’il faut retenir, ces violences vont impacter les commerçants guinéens qui importent du Sénégal vers la Guinée surtout les femmes à l’approche de la  fête. Si vous partez actuellement vous ne pouvez rien trouver de bons, tout le monde est dans la débandade. Quand le mouvement Sonko prend la rue, c’est l’arrêt de toute activité à Dakar. La psychose va hanter tout le monde. Je m’inquiète pour les malades, qu’ils soient en Guinée ou même au Sénégal, ils ne peuvent pas aller dans les hôpitaux, le blocus c’est partout. Les perturbations des services c’est partout presque », explique Fatimatou Diallo qui connait bien le pays de la Teranga.

Le bilan de ces journées de tensions fait déjà 16 morts, des centaines de blessés et plus 500 arrestations selon le gouvernement sénégalais. La journée de ce lundi 5 juin 2023 a été moins agitée, selon nos informations.

Alpha Ousmane Bah

Pour Africaguinee.com

Tel : (+224) 664 93 45 45

Créé le 5 juin 2023 22:27

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