Guinée : Qui est Elhadj Ousmane Baldé, défunt chef des « Haali Pular »?
CONAKRY-Elhadj Ousmane Baldé est décédé à l’âge de 84 ans à la suite d’un malaise dans la nuit du 26 mars 2023 à Conakry. La nouvelle de sa disparition s’est propagée comme une trainée de poudre en Guinée. Sa renommée et sa stature dépassent les frontières. En témoignent les nombreux messages qui continuent pour lui rendre hommages. Derrière l’opérateur économique, il y a l’homme de foi qui a œuvré pour le rayonnement de l’islam, mais aussi pour la défense des valeurs de sa communauté. Qui est-il réellement ? Comment a-t-il pu construire cette stature ? Africaguinee.com a fouillé quelques archives de la famille BALDÉ.
Né en 1939 à Fatako dans la préfecture de Tougué, région de la moyenne Guinée, Elhadj Ousmane Fatako Baldé a fait ses études coraniques dans son village. Dès son jeune âge, il est animé de l’esprit de ‘’Leadership’’. A 6 ans déjà, il est chef de groupe des enfants du village de son âge et prend le titre d’Alpha Ousmane. A l’école coranique aussi il devint le chef du Dudhal (foyer islamique). A 14 ans, il est devenu orphelin de père.
Ses débuts dans le commerce
En 1949, il débute le petit commerce en faisant la navette entre Fatako et Labé, séparées d’une distance de 130 km qu’il faisait à pied. Quatre ans plus tard, il achetait des arachides à Fatako, qu’il amenait revendre à Bantighel (Pita), puis allait à Télémélé pour acheter des nattes qu’il revendait aux marchés hebdomadaires de Kankalabé, Koïn et Kollangui.
A l’âge de 15 ans, il migre vers le Sénégal où il restera pendant 6 mois. Adolescent, il embrasse le métier d’apprenti-chauffeur, mais il se rend vite compte que ce métier n’était pas le sien. Il retourne alors à Labé pour reprendre son commence dans les marchés hebdomadaires.
En 1956, il se rend en Sierra Leone à la recherche du diamant. Mais l’avanture Léonaise fut écourtée par les britanniques qui déclenchèrent une chasse aux sorcières contre les ressortissants guinéens, maliens, sénégalais et gambiens se trouvant dans la zone diamantifère du pays.
Rentré en Guinée, alors âgé de 20 ans, il se décide de partir en aventure à Gueckédou, ville martyr située dans le sud de la Guinée. Il y arrive le 5 janvier 1960 avec pour capital la somme de 100 000 CFA. Un montant insuffisant pour faire du commerce comme il l’envisageait. Résilient et courageux, le jeune adolescent démarre son commerce comme étalagiste. Peu à peu, ses affaires prospèrent. Il perce le marché Libérien où les montres Mortimer et Oméga se vendaient comme des petits pains. L’homme d’affaire commença à voyager. Il va à Las Palmas pour acheter des marchandises et les revendre à Monrovia et en Guinée.
Au Libéria, il créa une société avec un associé et débutent l’importation des motos tchèques de marque Java. Ils décident que l’un d’entre eux aille au Zaïre s’installer à leur compte. Les deux associés intègrent un marché encore plus éloigné. Ils achètent de la purée de tomate qu’ils envoient au Zaïre, et de là, ils rachètent d’autres produits qu’ils envoient revendre en Belgique. Les affaires tournent, la vision aussi.
Son ascension à la tête d’un empire économique
Ils décident de diversifier en commençant l’importation de la cigarette, transitant au Liberia pour le marché Guinéen. Par la même occasion, ils obtiennent les marchés de piles Evryday, des cigarettes de marque St-Morris et Dunhill. L’empire s’étend et grandit avec une gamme de produits variés. Il s’engage dans l’importation de produits laitiers de Hollande et de farine de blé de France, des tissu wax de marque Vlisco, et plusieurs autres articles. Plus tard, c’est les concessions automobiles General Motors des États-Unis, Isuzu du Japon et Opel d’Allemagne qui se retrouvent au sein de la société Baldé et Motors.
Les affaires d’Elhadj Ousmane se diversifient dans d’autres domaines, tels que l’immobilier, la construction de centres Commerciaux et d’entrepôts, l’acquisition et le développement de domaines agricoles et des plantations. Ces activités se situent aussi dans d’autres pays, comme au Sénégal, en Gambie, en Guinée-Bissau, ainsi qu’en Sierra Leone.
En 1984, Elhadj Ousmane Baldé participe, avec d’autres opérateurs économiques guinéens, à la création du PLC (Programme Libre de Commerce) qui a relayé l’Etat dans le cadre de l’importation et de la distribution des denrées de première nécessité. En 1985, cette structure commerciale fut rebaptisée SAPEG avec la même mission.
(…) En 1998, il fut élu président de la Chambre de Commerce, de l’Industrie et de l’Artisanat de Guinée, poste qu’il occupa jusqu’en 2002. Elhadj « sans loi », c’est aussi l’homme de conviction qui ne transige pas. Il n’a pas caché son opposition face au troisième mandat d’Alpha Condé. Sous le régime de ce dernier, il a été victime de spoliation de plusieurs de ses biens, mais il n’a jamais fléchi. Sa résilience et son courage lui ont permis de traverser beaucoup d’épreuves.
Suite au décès d’Elhadj Saikou Yaya Barry, Elhadj Ousmane Fatako a été porté en 2018 à la tête de la Coordination des Foulbhè et Haali Pular. Fonction qu’il assuma jusqu’à son décès ce dimanche 26 mars 2023. Elhadj Ousmane Baldé rejoindra sa dernière demeure le 31 mars dans son Fatako natal où il a bâti une mosquée qui figure parmi les plus grands lieux de culte du pays. Il laisse derrière lui quatre veuves, 26 enfants et un lourd héritage à gérer.
Focus Africaguinee.com
Créé le 28 mars 2023 21:19Nous vous proposons aussi
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