Massacres de Zogota : Dix ans après, les victimes continuent de réclamer justice…
N’ZÉRÉKORÉ- Dans la nuit du 3 à 4 Août 2012, le village de Zogota situé dans la sous-préfecture de Kobela, préfecture de Nzérékoré avait été assiégé par des éléments des forces de défense et de sécurité (Policiers, militaires, gendarmes). Six villageois réveillés de leur plein sommeil avaient été massacrés, d’autres blessés. Dix ans jour pour jour après les faits, les victimes attendent toujours justice.
Saisie, la cour de justice de la CEDEAO avait rendu le 10 novembre 2020, une décision sur cette de crime, condamnant l'Etat guinéen à payer trois milliards six cents millions de francs guinéens, au titre de la réparation du préjudice subi par les victimes. Ce mercredi 03 août 2022, jour de la commémoration de ce triste anniversaire, le collectif des avocats des victimes de Zogota a interpelé les nouvelles autorités sur la nécessité de tenir le procès.
"Dans la nuit du 3 au 4 Août 2012, aux environs d'une heure du matin, les habitants de Zogota ont été brutalement attaqués dans leur sommeil par des éléments des forces de défense et de sécurité, venus au village à bord d'une dizaine de véhicules appartenant à l'armée, à police et à la gendarmerie. Cette attaque nocturne, d'une ampleur jamais égalée dans la contrée a duré près de 4 heures et s'est soldée par la mort de 5 citoyens abattus sur le champ, et un sixième décédé de ses blessures au petit matin à l'hôpital régional de Nzérékoré.
Ceux qui étaient sortis de leurs maisons suite aux coups de feu, ont essuyé des tirs à bout portant et reçu des gaz lacrymogènes. Les plus chanceux ont été arrêtés et torturés avant d'être emmenés manu-militari à Nzérékoré, où ils seront détenus pendant plusieurs jours. En plus de ces assassinats, les membres des forces de défense et de sécurité, ont blessé de paisibles citoyens, incendié la case de Monsieur Blaiwo Kolié avant de dégoupiller une grenade à l'intérieur de la maison de Moriba Kpoghomou.
Les victimes ont déposé une plainte avec constitution de partie civile le 23 août 2012, devant le doyen des juges d'instruction du tribunal de première instance de Nzérékoré. Cette plainte est encore sans suite judiciaire à la date d'aujourd'hui", se souvient avec regret Maitre Pépé Antoine Lamah.
Une décennie après ces crimes, les victimes ne demandent qu’une chose : Justice. Pour ce faire, elles appellent le colonel Mamadi Doumbouya à s’impliquer pour juger les auteurs de ces crimes.
« Aujourd'hui, on est en train de parler du jugement des responsables du massacre du 28 Septembre 2009. Pour Zogota, on n’en parle pas. (…) Ce n'est pas Mamadi Doumbouya qui était président au moment des évènement du 28 Septembre, mais c'est lui qui est en train d'organiser le procès. Nous voulons que ce même Mamadi Doumbouya, président de la République fasse quelque chose afin qu'il y ait un jugement pour les victimes de Zogota », a lancé maître Siba Michel Kolié.
Six personnes avaient trouvé la mort dans cette attaque tandis que d'autres ont été blessées et torturées, selon le collectif des avocats. De nos jours, les citoyens de Zogota gardent encore ce mauvais souvenir.
" Quand j'ai parlé de Nazio Pascal Kolié, j'ai vu plusieurs personnes couler des larmes. Ce jeune avait reçu une balle qui a traversé son épaule, il n'a pas reçu de soins appropriés, il en est mort plus tard sans avoir obtenu l'accompagnement de l'Etat guinéen. Il est mort dans l'indifférence, personne n'a parlé de lui, si ce ne sont pas que ces avocats que nous sommes. Tous les jours on parle des procès du massacre de 28 Septembre, mais on ne parle jamais du procès du massacre de Zogota. Pourtant les images existent, vous verrez des images insoutenables et insupportables.
Un vieux de plus de 100 ans, un guérisseur d'une renommée particulière, qui a fait des miracles, a été tué à bout portant pendant qu'il était venu désarmer. Allez-y aujourd'hui à Zogota, vous allez trouver des traces de balles sur les bâtiments. Et pas n'importe quel fusil, ce sont des fusils d'assaut. Allez-y à Zogota, vous verrez une victime qu'on a tenté d'égorger, il a encore la trace à la gorge. Vous verrez une victime qui a perdu le major de son doigt. Vous verrez une personne qui a été poignardé sur les fesses par les éléments des forces de défense et de sécurité. On ne parle pas aujourd'hui de ces crimes. Nous voudrions que cette situation préoccupe les nouvelles autorités", a martelé Maître Pépé Antoine Lamah, avocat au barreau de Guinée.
Après ces violences survenues à Zogota, plusieurs personnes ont été pointées du doigt par le collectif. Au nombre de 6, ces personnes sont considérées comme des responsables de cette attaque meurtrière. Ce sont entre autres le Feu Colonel Mandjou Baldé, à l'époque commandant de la quatrième région militaire, le colonel Mamadouba Soumah, à l'époque commandant de la gendarmerie régionale, actuellement à la retraite, Colonel Lancinet Condé, à l'époque commandant du camp d'infanterie de Macenta, Hassane Sanoussy, à l'époque des faits préfet de Nzérékoré, Moïse Tohonamou, qui était le directeur de la sûreté de Nzérékoré.
A suivre…
SAKOUVOGUI Paul Foromo
Correspondant régional d'Africaguinee.com
A Nzérékoré
Tél : (00224) 628 80 17 43
Créé le 3 août 2022 17:39Nous vous proposons aussi
TAGS
étiquettes: