Menaces de sanctions, exigences de la Cedeao, dialogue : Ousmane Gaoual Diallo parle…

Ousmane Gaoual Diallo, porte-parole du gouvernement de transition

CONAKRY-Alors que la Cedeao demande un réaménagement du calendrier de la transition pour le rendre « acceptable », le Gouvernement guinéen semble « inflexible » sur les trois ans, fixés comme délai pour le retour des civils au Pouvoir. Dans un entretien accordé à notre rédaction, le Porte-parole du Gouvernement Ousmane Gaoual Diallo a invoqué des délais incompressibles par rapport à l’exécution de certaines étapes inscrites dans la feuille de la transition. C’est le cas par exemple de l’établissement d’un fichier électoral adossé à l’état civil. M. Diallo affiche une ouverture des autorités à fournir les explications nécessaires pour convaincre la Cedeao que les 36 mois ne sont pas superflus. Dans cette interview, il aborde la question liée au dialogue, la nomination d’un nouveau médiateur et d’autres sujets qui cristallise les débats dans la conduite de la transition guinéenne.


AFRCAGUINEE.COM : Quelle lecture faites-vous des conclusions du sommet de la CEDEAO en ce qui concerne la Guinée ? 

OUSMANE GAOUAL DIALLO : Nous avons noté avec satisfaction la prise en compte du contexte guinéen, ce que nous avons toujours sollicité. Nous avons remercié le chef de l'Etat sortant (de la Cedeao), le Président Ghanéen qui n'a ménagé aucun effort pour être à l’écoute des différentes délégations guinéennes qui sont arrivées à Accra. Nous avons salué aussi l'effort du président de la Transition, son excellence le Colonel Mamadi Doumbouya qui a maintenu le fil du dialogue avec ses pairs de la CEDEAO. Il faut aussi saluer l'effort du ministre des Affaires Étrangères et du Premier ministre qui ont œuvré chacun en ce qui le concerne pour que, d'abord les guinéens se retrouvent ici autour de la table et qu'on essaie de poser les problèmes qui minent encore la cohésion nationale sur cette question de la Transition. Donc, c'est un effort pédagogique, d'explication qui doit se poursuivre avec les nouvelles autorités de la CEDEAO pour permettre de discuter et aplanir les derniers points de malentendus. 

A votre avis ce sont ces efforts diplomatiques consentis par le Gouvernement qui ont abouti à ce résultat ? 

Incontestablement cela a fait bouger les lignes. Ce que la CEDEAO dans sa résolution a noté avec satisfaction, c’est cette ouverture du dialogue présidé par le premier ministre. Il faut qu'on continue d'encourager nos différents acteurs qui sont impliqués dans le renforcement du dialogue inter-guinéen, -le ministre de l'administration du territoire et de la décentralisation, le chef de l'Etat lui-même, le premier Ministre et tous les acteurs de l'ombre- qui travaillent pour que les guinéens essaient d'inventer le mécanisme nouveau de résolution de leur contradiction. Ça, c'est quelque chose que la CEDEAO encourage. Dans un monde qui est secoué par la crise ukrainienne, si les africains montrent par l'exemple qu'ils sont capables de résoudre leurs problèmes par le dialogue, je pense que c'est quelque chose qu'il faut encourager. C'est pour cela que nous invitons les acteurs politiques guinéens et les acteurs de la société civile d'accepter, en toute tranquillité d'être autour de la table et d'essayer de trouver des solutions là-bas.

D'abord entre nous, si on ne montre pas notre capacité de transcender les émotions, les divergences et d'être là en toute responsabilité pour donner la chance au dialogue de s'imposer comme un mécanisme de résolution des crises, alors on aura échoué. Il faut que cela soit pour que les guinéens tournent le dos aux confrontations et aux conflits qui ont miné la cohésion nationale, en rétablissant la confiance entre les acteurs politiques. Il faut que les choses changent. Et, nous nous employons à cela et nous ne ménagerons aucun effort pour arriver à rassurer et à convaincre les uns et les autres. 

On sait combien de fois les clivages sont endémiques, les suspicions aussi. Quelle va être votre approche ?

Il faut aller avec humilité et continuer avec l'effort de transparence. Je pense que c'est normal que tout cela arrive, qu'il y ait de la suspicion. Nous n'avons pas la culture du dialogue dans notre pays. La Guinée est un pays de confrontations. Donc, il faut inventer d'autres mécanismes mais cela ne va pas aller comme une ligne droite. Ces soubresauts doivent rappeler à chacun sa responsabilité au-delà de nos émotions personnelles. Il faut que les uns et les autres acceptent vraiment que dans le chemin de la création d'un nouvel espace de résolution de crise, il y a souvent des soubresauts mais il faut les dépasser. Je pense donc que c'est l'engagement et la responsabilité de chacun d'œuvrer dans ce sens. En ce qui nous concerne, nous ferons la part pédagogique dans la transparence pour aller vers les autres et être à leur écoute pour que les gens acceptent d'être autour de la table puisque c'est une volonté qui est importante. 

Les revendications des différents acteurs -RPG arc-en-ciel, ANAD, FNDC, CORED- sont disparates. Comment allez-vous vous y prendre pour contenter tout le monde ?

Chaque groupe politique, chaque organisation de la société civile à des raisons légitimes qu'il doit poser sur la table. C'est effectivement à ça qu'on les invite et on essayera un à un à dépasser les divergences. Mais il faut que les uns et les autres acceptent d'être autour de la table. On ne peut pas vouloir le dialogue fut-il sous l'observation de la communauté internationale ou un dialogue inter guinéen sous l'égide du premier ministre et ne pas accepter de faire la part de sacrifice qui est nécessaire pour ça. C'est pourquoi nous invitons tout le monde à venir autour de la table. C'est autour de la table qu'on peut poser ces exigences et c'est autour de la table qu'on peut trouver de solutions avec ou sans la communauté internationale. 

Vous connaissez bien les réalités de la classe politique. Avez-vous noué des contacts avec certains acteurs réticents pour les convaincre de venir autour de la table ?

Autour du dialogue, les acteurs qui arrivent sont souvent rassurés par les démarches formelles qu'on peut faire en plein jour et par des démarches informelles qui peuvent amener les uns et les autres à dissiper leurs inquiétudes. C'est ce que nous faisons. Chacun en ce qui le concerne s'emploie pour que les guinéens acceptent d'inventer un mécanisme de résolution de crise. C'est quelque chose de fondamental pour notre pays. 

La CEDEAO demande aux autorités guinéennes de proposer un nouveau calendrier acceptable sans quoi des sections économiques et financières pourraient frapper notre pays. Comment le Gouvernement va-t-il s'employer pour répondre à cette demande ? 

C'est une invite qui nous a été faite à faire preuve de transparence, à faire plus de pédagogie. C'est comme ça que nous comprenons la décision des chefs d'Etat. Mais nous disons également que la question ne se juge pas à l'aune seulement de la transition. Il faut qu'on travaille sur le contenu. Le cas guinéen a une particularité. On sait tous que le fichier électoral est une source de crise. Dans ces 12 dernières années, notre pays a été en crise permanente par rapport à ça. Il faut dépasser cette crise-là. On ne peut arriver à ce dépassement lorsqu'on se focalise la transition sur la durée. Il faut qu'on travaille sur le contenu pour ne pas différer les problèmes d'aujourd'hui à la prochaine génération de dirigeants. Donc, il faut qu'on arrive à convaincre la CEDEAO sur le contenu. Une fois que le contenu aura été accepté par les uns et les autres la durée s'imposera d'elle-même et les gens comprendront que les 36 mois édictés ne sont pas superflus.

Mais ce contenu fait l'objet de vives critiques de la part de certains acteurs qui estiment qu'il y a des étapes qui peuvent être réunies pour réduire la durée…

La tâche la plus consommatrice en terme de durée, c'est l'élaboration du fichier électoral qui est adossé à l'état civil. C'est ce qui garantit son authenticité et sa durabilité. Ce fichier électoral peut consommer au moins 24 mois. C'est des 24 mois au cours desquels on peut faire d’autres activités aussi. Donc, on peut paralléliser beaucoup d'activités pendant cette période-là. Et, c'est une période qui est minimale pour atteindre cet objectif de l'élaboration du fichier d'état civil. Donc, pendant ce temps on peut faire le toilettage institutionnel, constitutionnel…pour notre pays et après il restera 12 mois pour dérouler le calendrier électoral. 

Comment le Gouvernement a-t-il accueilli la nomination de l'ancien président béninois, Thomas Boni Yayi comme nouveau médiateur dans la crise guinéenne ?

Nous avons pris acte de cela tout en rappelant que c'est les acteurs guinéens qui doivent apporter la solution par leur volonté et leur responsabilité de régler les questions qui se posent dans notre pays. Les acteurs internationaux comme leurs noms l’indiquent, ce sont des facilitateurs. Ils viennent s'appuyer sur les personnes qui ont la volonté d'aller de l'avant. Tant que cette volonté ne se retrouve pas entre les guinéens, les solutions extérieures seront juste un leurre. Et ça n'apportera pas de l'efficacité. Nous avons déjà vécu ça dans le passé, il faut que les guinéens aient la volonté de changer notre mécanisme de résolution de crise en toute responsabilité pour permettre au pays d'aller de l'avant.

Est-ce qu'à date il y a une visite de ce médiateur est annoncée en Guinée ? 

Non il n'y a rien qui est annoncé dans ce sens-là. Mais il faut rappeler que pour nous, ce n'était pas la personne qui a posé problème. On n'a jamais communiqué en disant qu'on ne veut pas de monsieur Chambas dont il faut saluer les efforts au sein de cette organisation sous régionale. Ce que nous avions dit à l'époque, ce que la crise n'était pas au point d'exiger la présence de la communauté internationale à notre chevet et qu'il fallait encourager les guinéens à se retrouver autour de la table. C'est cet effort que le gouvernement a fait qui a permis cette première journée de dialogue qui s'est ouverte ici malgré les critiques qui sont arrivées dont il faut en tenir compte pour que le dialogue puisse se poursuivre. 

Quel va être la prochaine étape ? 

Le premier ministre donnera le calendrier et le rythme qui vont être poursuivis dans les prochains jours. 

Le Président Bissau guinéen, Umaro Sissoco Embalo est le nouveau président de la conférence des chefs d'Etat de la CEDEAO. Comment analysez-vous son arrivée à la tête de l’organisation ? 

Il est en train de marquer l'histoire de son pays. C'est la première fois que la Guinée Bissau se retrouve à la tête de l'organisation sous régionale. C'est quelque chose de bien et cela montre que ce pays fait des efforts démocratiques qui lui permettent d'être sur la scène internationale. Dans un passé très récent, ce n'était pas le même son de cloche qu'on entendait quand on parlait de la Guinée Bissau. C'est tout à son honneur, nous le félicitons pour cette reconnaissance de ses pairs ouest africains. 

Certains craignent que son caractère trop direct ne soit un handicap…

Je pense qu'il aura le temps de prouver le contraire ou d'apporter la confirmation de ces jugements. Ce qui est clair, même l'échec de ce putsch qui était intervenu dans ce pays montre quand même une certaine sympathie dont il jouit au sein de l'armée et au sein de la population. Cela montre aussi que les populations Bissau guinéennes et les institutions militaires de ce pays ont évolué quant à l'intégration des principes démocratiques.

Embalo est perçu comme un ami et un allié de la junte guinéenne. Son arrivée à la tête de la Cedeao constitue-t-elle un motif de satisfaction pour vous ?

Aujourd'hui l'Afrique de l'Ouest a des intérêts communs. Il ne faut pas qu'on croit qu'un tel chef d'Etat est ami à l’un et ennemi de l’autre.  La Guinée n'a que des amis dans l'espace CEDEAO. Les intérêts des pays convergent.

Interview réalisée par Diallo Boubacar 1 &

Oumar Bady Diallo

Pour Africaguinee.com

Tel : (00224) 655 311 112

Créé le 5 juillet 2022 03:23

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