Crimes de sang : Quelle juridiction pour « juger » Alpha Condé et cie?

L'ancien président guinéen Alpha Condé

CONAKRY-Le Procureur Général près la Cour d’Appel de Conakry, Alphonse Charles Wright a donné des instructions, mercredi 4 mai 2022, aux fins de poursuite judiciaire par voie de dénonciation contre l'ancien Président, Alpha Condé et 26 anciens responsables de son régime. Ils sont soupçonnés d’atteintes volontaires à la vie humaine notamment, meurtre, assassinat et complicité de meurtre et d'assassinat.


Nul n’est au-dessus de la Loi

Toutefois selon certains juristes, ces poursuites soulèvent des questions, notamment le privilège des juridictions. Le TPI de Dixinn en charge d’engager les poursuites et de conduire l’instruction des dossiers a-t-il compétence de juger un ancien président ? Pour répondre à cette interrogation, votre quotidien en ligne Africaguinee.com a interrogé un juriste. Dès l’entame, notre interlocuteur a tenu à préciser que "nul n'est au-dessus de la loi".

Qu’est-ce que ça veut dire ? "Quelque soit le statut ou le rang social (d’un citoyen), nul ne peut-être épargné lorsqu'il s'agit de l'application de la loi. La loi est faite pour tout le monde et personne ne peut échapper à son application", explique ce juriste, qui soulève la question de « privilège de juridictions ».

Privilège de juridictions

"Compte tenu des fonctions assumées par les uns ou par les autres, il y a ce qu'on appelle les privilèges de juridiction. C'est-à-dire, compte tenu de la fonction que la société vous a confié, lorsque vous commettez une infraction dans l'exercice de cette fonction, une juridiction spéciale est créée pour vous. Cela ne veut pas dire que vous êtes au-dessus de la loi mais c'est simplement dire que compte tenu de la fonction incarnée, vous, on ne peut pas vous juger devant le même tribunal que les autres. C'est ce qu'on appelle privilège juridiction et c'est la loi elle-même qui le prévoit", a expliqué notre source.

Ce juriste rappelle que les faits que le procureur général a cités ont été commis quand les intéressés étaient dans l'exercice des fonctions au compte de la même société. 

Vide juridique

"Il faut faire la différence entre deux périodes, pendant que les faits se commettaient et maintenant que la poursuite est engagée. Ces deux périodes doivent être distinguées. Alors, pendant que ces présumées infractions se commettaient les personnes étaient dans l'exercice de leurs fonctions. Donc, s'il était question de les poursuivre dans le passé là, la poursuite ne pouvait se faire que devant ces juridictions spécialisées. Mais maintenant, nous sommes dans une autre période, une période d'exception où la constitution a été suspendue ce qui suppose qu'il y a un vide juridique.

Jurisprudence

Maintenant ce qui peut être fait à mon avis, il faut chercher à résoudre cette question du vide juridique et la seule solution ce qu'à travers une norme que ce soit une loi, ou une ordonnance, ça dépend, il faut essayer de régler cette question pour éviter un précédent. Sinon, si on les juge aujourd'hui comme tout citoyen ordinaire cela va créer une jurisprudence. Pour éviter ce précédent ou cette jurisprudence, il faut clarifier cette question liée à la compétence de la juridiction : qui peut les juger ? Parce que les faits ont été commis quand ils étaient dans l'exercice de leurs fonctions mais aujourd'hui, ils ne sont plus dans l'exercice de ces fonctions.

Il faut une norme comme ce fut le cas de la CRIEF (Cour de Répression des Infractions Économiques et Financières ndlr). Parce que l'ordonnance qui a créé la CRIEF a supprimé toutes questions de privilèges juridiction ou toutes questions liées à un statut ou une fonction. Donc, tout le monde est justiciable devant la CRIEF, l'ordonnance précise cela.

Si une telle mesure peut être faite avant de les juger c'est mieux. Mais, vouloir les juger devant un tribunal de droits communs comme cela a été indiqué par le procureur général devant le tribunal de Dixinn, l'ouverture du procès va se heurter à cette question de compétence du tribunal. Parce que l'ancienne constitution accordait ce privilège juridiction au président, aux membres du gouvernement, aux présidents des institutions. Ils ne pouvaient être justiciables que devant la haute cour de justice pour les crimes et délits commis dans l'exercice de leurs fonctions et cette Cour n'a jamais vu jour.

Maintenant, cette constitution qui prévoyait ces privilèges de juridictions, a été dissoute. Mais tout reste encore à clarifier sur cette question avant toute poursuite judiciaire. D'ailleurs, le mieux était de régler cette question avant d'engager des poursuites contre les anciens dignitaires", suggère notre source. 

A suivre…

 

Oumar Bady Diallo 

Pour Africaguinee.com 

Tél. : (00224) 666 134 023 

Créé le 6 mai 2022 10:54

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