Samba Sow : “On a l’impression que Ousmane Gaoual est sur les traces de Kourouma…”
CONAKRY-La visite ce vendredi 04 février du président du Comité national du rassemblement pour le développement (Cnrd), colonel Mamadi Doumbouya sur le site des zones déguerpies situées sur le plateau de Koloma irrite la colère des victimes. Leur porte-parole, Mamadou Samba Sow, interrogé par Africaguinee.com, a fustigé la démarche de nouvelles autorités dans ce dossier. Entretien.
AFRICAGUINEE.COM : Le colonel Mamadi Doumbouya et son ministre l'Urbanisme et de l'habitat ont visité le site de Kaporo rails. A cette occasion, les autorités ont promis de viabiliser la zone. Comment réagissez-vous ?
MAMADOU SAMBA SOW : Nous avons été surpris par la visite du colonel Mamadi Doumbouya sur le plateau de Koloma accompagné du ministre de l'Urbanisme Ousmane Gaoual Diallo. Ce qui choque le plus les victimes c’est le manque de compassion du président l’égard des victimes de Kaporo Rails. Il n’en a jamais parlé depuis le coup d’État, on s’attendait à ce qu’il fasse cas de cela. Malheureusement, il est allé sur le terrain et n’a dit aucun mot tout comme le ministre qui était le guide comme si ces espaces sont restés vides depuis le début de temps. Ce qui est incompréhensible. Sous Alpha Condé, on a été traité d’étrangers et aujourd’hui on est considéré comme de sous Guinéens. Il n’y pas longtemps, le président du Cnrd a restitué les cases de Bellevue à la famille du président Sékou Touré.
Nous ne sommes pas contre, mais pour notre cas c’est plus de 1200 familles. Il n’y a pas des Guinéens supérieurs à d’autres, on aurait voulu qu’il fasse de notre cas une priorité, malheureusement cela n’a pas été fait. C’est notre premier regret. Le second regret, personne ne parle de l’indemnisation des victimes. Au début, on avait eu des discussions avec le ministre, mais pour l’instant qui ne sont pas très bien avancées.
Est-ce que vous avez cherché à rencontrer le chef de la junte ?
Nous avons adressé 3 demandes d’audiences au colonel Doumbouya plus notre mémo qui sont restés sans suite. Dans les propos du ministre Ousmane Gaoual Diallo, il y a quelque chose de grave qui a été dit. Il dit que l’aménagement concerne les 169 hectares. On a l’impression qu’il est sur les traces de M. Ibrahima Kourouma parce les 169 hectares constituent la zone qui a été libérée lors de la casse de 1998.
Au moment de la casse de 2019 sous Alpha Condé, le ministre de l’Urbanisme d’alors, Ibrahima Kourouma avait dit que la casse ne concernait que les 169 hectares déjà libérés en 1998 et illégalement réoccupés. Cela ne concernait que les garages, les baraques et autres kiosques. Cela veut dire que les 98 hectares où nous habitions ne devrait pas être touchés. Malheureusement, on a été touché par haine.
Si aujourd’hui le ministre Ousmane Gaoual Diallo parle de 169 hectares, donc il fait référence de la casse de 1998. Dans ce cas, nous demandons qu’on nous restitue les 98 hectares qui ne sont pas concernés et ont été injustement cassés en 2019. Soit le ministre est mal informé ou il y a un agenda caché derrière ce qui se passe. Nous réclamons justice dans ce dossier parce qu’on a l’impression que le colonel était déconnecté. On a quand même l’impression qu’on est encore sous Alpha Condé.
Êtes-vous déçus ?
Nous sommes des oubliés de la République dans la mesure où quand on catégorise les victimes dans ce pays, les victimes de Kaporo viennent après les victimes de sang. C’est à dire, après les jeunes que Alpha Condé a aidé à liquider à travers son système sur l'Axe et dans d’autres localités du pays, il n’y a pas une autre tragédie humaine qui dépasse celle de Kaporo Rails.
Aujourd’hui qu’on parle de justice qui sera la boussole, de réconciliation nationale et que le président et son ministre se transportent sur le terrain et qu’il n’y ait aucun mot concernant les 1200 familles victimes de Kaporo qui regroupent 19219 citoyens injustement délogés de leur lieu d’habitation et de travail, c’est inadmissible et incompréhensible. Nous allons nous retrouver pour tirer toutes les conséquences de ce qui s’est passé. Nous allons aussi faire une déclaration pour demander des actions parce qu’on a l’impression que le colonel est très mal entouré.
Pourquoi dites-vous que vous avez le sentiment que le ministre Ousmane Gaoual Diallo est sur les traces de son prédécesseur ?
C’est difficile de savoir réellement ce qui se passe. Le ministre Gaoual dans l’opposition, il avait dénoncé ce qui s’est passé et avait promis que dès qu’un régime démocratique sera installé les citoyens seront totalement rétablis dans leurs droits. Il l’a réitéré lors de sa prise de fonction en tant que ministre de l'habitat. En nous recevant dans son bureau, il nous a réitéré la ferme volonté du président du Cnrd et l’ensemble du gouvernement à œuvrer pour que nous soyons rétablis dans nos droits. Malheureusement, les choses n’avancent pas. On ne sait pas qu’est ce qui se passe derrière.
Vous voulez insinuer que le ministre Gaoual soit sous pression ?
On se demande si lui-même ne subit pas de pression parce que derrière l’aménagement il y a cette société qu’on appelle IMMAG Holding. Les discussions sont en cours, mais ça n’avance pas. On ne sait pas qui tire les ficelles pour que ce dossier soit retardé ou bâclé. Nous invitons et le ministre de l’Urbanisme et le président de la République à faire très attention parce qu’il arrivera un jour où on parlera du colonel Mamadi Doumbouya et de Ousmane Gaoual Diallo au passé. L’histoire voudrait qu’on retienne d’eux des personnes qui ont aidé à rétablir les victimes dans leurs droits. S’ils ne le font pas, ils seront condamnés par l’histoire.
Interview réalisé par Abdoul Malick Diallo
Pour Africaguinee.com
Tel : (00224) 669 91 93 06
Créé le 5 février 2022 17:37Nous vous proposons aussi
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