Dr Sory Condé : « Le variant delta est 60 fois plus contagieux, son taux de mortalité peut atteindre 67%… »
CONAKRY-La Guinée risque une troisième vague de la pandémie de coronavirus. Le fait pays face aux nouveaux variants du virus jugés plus dangereux, alors que la vaccination patine. Près de 800 malades sont hospitalisés dans les différents centres de traitement, tandis que le bilan macabre du virus continue de grimper avec près de 200 morts.
En plus du premier, trois nouveaux variants ont été identifiés en Guinée. Le variant indien Delta en fait partie. De quoi s'agit-il ? Comment éviter d'être contaminés ? Nous avons interrogé Dr Sory Condé chargé d’études au département surveillance de l’Agence nationale de la sécurité sanitaire (Anss). Il donne des précisions sur ces variants et évoque la campagne de vaccination.
AFRICAGUINEE.COM : l’Agence nationale de sécurité sanitaire (ANSS) annonce que des nouveaux variants de la Covid ont été détectés en Guinée. De quel type de variants s’agit-il ?
DR SORY CONDE : Il y a trois nouveaux types de variants qui ont été identifiés en circulation, à part le premier qui a envahi tout le monde depuis décembre 2019. C’est le variant britannique appelé Alpha qui a été identifié en avril 2021. Ce mois de juillet, il y a le variant Eta appelé le nigérian-anglais et le variant Delta communément appelé le variant indien.
Combien de cas ont-ils été identifiés à ce jour en Guinée ?
Dans les échantillons analysés, il y a un de chaque type qui a été isolé. Une personne dont l’échantillon s’est révélé positif au variant Eta, un autre pour le variant Delta.
S’agit-il des cas importés ou en circulation ?
Pour le moment, les enquêtes réalisées ont révélé que ces personnes vivaient ici. Ce sont ces deux cas qui ont été détectés d’après les analyses. Mais c’est un processus qui continue. Avec cette augmentation de nombre de cas, on va là où il y a un grand nombre, on demande au laboratoire de sélectionner certains nombres d’échantillons positifs afin de faire le séquençage. Mais, j’avoue que c’est un processus qui prend du temps. Dans certains pays, chaque trois mois, ils publient les résultats. Les pays qui disposent des moyens et des laboratoires qui ont plus de capacité sont un peu plus rapide, parfois un mois ou un mois et demi. Chez nous, ce n’est pas le cas.
C’est quoi la différence entre les nouveaux variants et celui qui est là depuis décembre 2019 ?
Un nouveau variant ce que le virus change de forme, se transforme en quelque sorte. Ce sont des mutations du virus qu’on appelle variant. Et avec ces mutations, le virus peut devenir plus ou moins virulent, la contagion peut devenir plus rapide. Ça peut aussi jouer sur la capacité du virus, il peut devenir plus mortel. Le variant Delta, la littérature indique qu’il a une facilité de contagion soixante fois plus élevée que les autres, et que le taux de décès lié à ce virus peut atteindre 67%. C’est-à-dire que si 100 personnes ont la Covid-19 dont le variant Delta est à l’origine, le nombre de décès peut aller jusqu’à 67.
Beaucoup de personnes pensent que la coïncidence entre la découverte de ces variants et l’annonce de la reprise éventuelle des manifestations n’est pas fortuite. Qu’en êtes-vous ?
Même sur le front, lorsque des ennemis se battent sur le champ de bataille, le médecin même quand c’est un ennemi, il doit s’en occuper. Nous avons une éthique et une déontologie qui nous empêchent de nous associer à ces calculs politiques. Tout ce qu’on fait c’est technique, notre souci c’est comment mettre notre population à l’abri des problèmes de santé qui peuvent vraiment compliquer notre façon de vivre comme c’est le cas d’aujourd’hui. Donc, cela n’a rien de politique. D’ailleurs, le directeur est catégorique là-dessus, celui qui veut parler de politique c’est en dehors de l’Anss. Il peut y avoir des coïncidences, mais nous, c’est la protection de la santé de nos populations qui nous préoccupe.
Quelles dispositions l’ANSS a-t-elle prises pour freiner ces variants ?
Déjà, nous avons la circulation des variants dans notre pays. Tout ce qu’on peut demander aux gens c’est la prévention. Dans ce domaine, il s’agit d’abord de la prévention individuelle et celle collective. Pour la prévention individuelle, il faut que chacun accepte de porter son masque, le lavage des mains et la distanciation physique, cette mesure doit être acceptée et pratiquée par tout le monde.
Dans le volet prévention collective, il y a la vaccination. Chaque guinéen qui n’a pas commencé ou terminé sa vaccination doit faire l’une ou les deux.
Autres disposition prises, mêmes si elles étaient prises pour ceux qui viennent de l’extérieur afin d’éviter l’importation du virus, maintenant que ça circule dans notre pays, il y a des mesures pour les voyageurs entrant à tous les niveaux de nos frontières dont on a déjà mis à la disposition de la presse. Cela va permettre de limiter l’importation des cas. Maintenant que les variants circulent, ce que nous pouvons conseiller aux gens c’est la prévention : le port de masque, le lavage régulier des mains, la distanciation physique et surtout la vaccination.
Où en est la campagne la vaccination ?
Jusqu’au jeudi 15 juillet 2021, on était à 499 mille 972 personnes vaccinées avec la première dose. Un peu plus 280 000 personnes ont pris leur deuxième dose. Notre plan de vaccination c’est en trois phases. En rapportant aujourd’hui le nombre de personnes vaccinées à la population cible de la phase 1, on peut dire que le taux de vaccination est bon. Mais lorsqu’on rapporte cela au nombre total de personnes que nous voulons vacciner à la fin, on a encore une couverture vaccinale très faible par rapport à l’objectif qui est de vacciner les 80% de la population guinéenne.
Une rupture de vaccins (Première dose) avait été constatée dans certains sites. Une solution a-t-elle été trouvée ?
En début de semaine, on a réceptionné un nouveau lot de 50 milles doses de vaccin de type Spoutnik V. Tous sont de la première dose. Contrairement à Sinovax ou Sinopharm, le Spoutnik V, le flacon destiné à la première dose qu’on appelle la composante, il est indiqué que c’est la première dose et en aucun cas elle ne peut être donnée comme deuxième dose. C’est différent des autres vaccins où c’est vous-mêmes qui scindez pour la première et deuxième dose.
Mais on s’attend un peu plus de 5 millions de doses de vaccin d’ici la fin du mois de septembre. Ils vont venir graduellement. Ce sera du Jonhson and Jonhson, un vaccin à dose unique, (une seule injection), il y aura aussi du Sinopharm et d’autres types vaccins comme Pfizer.
Ailleurs, en Europe, on parle d’une éventuelle prise de troisième dose. Q’en est-il de la Guinée ?
Cette éventualité ne veut pas dire que c’est systématique. Parce que même en dehors de ces nouveaux variants, je rappelle que le vaccin le plus efficace théoriquement, on dit que c’est Pfizer. On estime son efficacité jusqu’à 95%. Cela sous-entend que si 100 personnes se font vacciner par ce type, il y a 95 qui pourront développer l’immunité, alors, ils resteront 5 personnes qui ne pourront pas développer l’immunité. On peut aussi avoir des personnes avec des problèmes sous-jacents qui jouent sur l’efficacité du vaccin. Ça peut être dû à des vices que certaines personnes prennent parce qu’il y a certains vices qu’ils prennent et qui jouent sur l’efficacité du vaccin. Il y a d’autres problèmes de santé qui empêchent une immunité conséquente. Mais pour le moment, on n’a pas pris une décision allant dans le sens de la troisième dose.
Il faut quand-même dire que c’est un peu compliqué pour les pays africains qui ne produisent pas de vaccin et qui se voient obliger d’en acheter. Il y a même qui n’en ont pas suffisamment c’est grâce à la collaboration bi et multilatérale. Certains c'est dans le budget national qu'ils prennent et achètent les vaccins, tandis que d’autres ne comptent que sur l’aide internationale. Et aujourd’hui, le vaccin c’est la chose la plus prisée au monde, mais c’est les géants qui en font la commande. Voyez-vous !
Interview réalisée par Siddy Koundara Diallo
Pour Africaguinee.com
Tel : (00224) 664-72-76-28
Créé le 22 juillet 2021 15:10
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