Reprise des manifestations de rue : les confidences de Bakary Keita de l’UFDG…
CONAKRY-Pourquoi les jeunes de l'UFDG demandent la reprise des manifestations de rue ? Mohamed Bakary Keita, président du Conseil National de l'Union des Forces Démocratiques de Guinée (UFDG) s'est confié à Africaguinee.com. Dans cet entretien, M. Keita souligne que les jeunes accentueront la pression sur la Direction du Parti pour obtenir l'acceptation de leur demande. D'ores et déjà, il précise qu'une date sera dévoilée.
AFRICAGUINEE.COMM : Pourquoi vous demandez auprès de vos dirigeants la reprise des manifestations de rue ?
MOHAMED BAKARY KEITA : C'est parce que d’abord, les lois de la république nous confèrent cela. Elles nous donnent la possibilité de marcher si les situations que nous traversons ne sont pas conformes à la justice, à l’Etat de droit, à la liberté et à la démocratie. Actuellement, c’est ce que nous vivons. Nous avons nos responsables au plus niveau du parti qui sont détenus. En dehors de cela, nous avons au moins quatre cent militants qui sont en prison. Nous avons aussi nos bureaux et nos sièges qui sont fermés illégalement sans qu’aucune notification juridique ne nous soit adressée pour que l’on sache pourquoi cet état de fait.
En dehors de cela, le droit de voyager du président de notre parti, de sa famille et de ses proches collaborateurs est confisqué. Comme les autorités actuelles n’ont aucune flexibilité par rapport à cela, et sachant bien sûr que c’est une situation injuste, nous n’avons aucune alternative que de reprendre les manifestations pour montrer notre mécontentement. Donc, c’est pourquoi la direction de la jeunesse du parti a demandé que les manifestations reprennent.
Est-ce parce qu'au plan judiciaire aussi vos plaintes ne prospèrent devant les tribunaux ?
Exactement ! Vous avez vu qu’au niveau du siège du parti, nous avons entamé une information judiciaire avec nos avocats qui n’a pas abouti. Pour les sorties vers l’étranger du président du parti et des proches collaborateurs, nous n’avons également aucune information là-dessus, encore moins pour nos détenus qui, pour certains croupissent depuis plus de neuf mois en prison, alors que les juges d’instructions ont déjà fini de faire leur travail. Cela veut dire que nous sommes inquiets. Donc, nous pensons que la situation n’est plus à un niveau légal. Il faut donc que nous utilisions toutes les possibilités que les lois de la république nous confèrent pour montrer aux autorités actuelles que nous ne sommes pas contents.
En retour on a entendu M. Cellou Dalein Diallo dire que la requête va être examinée par la haute direction du parti. Est-ce que vous souhaiteriez qu'elle soit faite de manière diligente ?
Oui de manière très diligente. Soyez sûrs que nous allons mettre la pression sur la direction nationale du parti. Notre président, en dehors du fait de dire qu’ils vont examiner, a indiqué qu'il comprend notre position. Cela sous-entend qu’il partage notre position. Nous allons leur proposer une date pour les manifestations. De toutes les façons, ils savent que ce sont les jeunes pour la majorité qui manifestent. Donc si c’est nous qui demandons ça, je ne pense pas qu’on leur laisse le choix. Mais nous leur laissons la latitude de décider puisqu’il est quand même investi du mandat des militants de décider au nom du parti. Quoique, il y aura quand même une pression intelligente, respectueuse, à son endroit.
Est-ce opportun d'aller dans la rue que des tractations sont en cours pour un dialogue inclusif et éventuellement la libération des détenus politiques ?
Vous savez bien que le dialogue tel que défini-là ne concerne pas l’UFDG. Notre parti a fait une déclaration pour dire qu’on n’entamera pas le dialogue tant que nos collègues sont en prison et que nos sièges soient fermés. Nous n’avons pas où nous retrouver. On ne peut pas parler de dialogue quand nos responsables ne peuvent pas se mouvoir. Nous avions cru que la grâce présidentielle devrait tenir compte de la conscience et de celui qui doit le faire. Mais pour Alpha Condé, il le fait pour ceux qui peuvent mendier son pardon. Il le fait pour ceux qui peuvent se rabaisser. C’est à ses derniers qu’il donne sa grâce.
Ce qui reste clair, nous avons nos collègues qui sont détenus là-bas. Nous avons des difficultés d’accès à eux. Pour nous, il est bon, puisque nous savons que désormais, ce n’est plus une question judiciaire mais plutôt une question politique, il faut bien que la situation soit réglée politiquement.
Le Pouvoir en place ne tolère plus les manifestations de rue. Ne craignez pas que votre décision de sortir manifester n’accentue les arrestations dans vos rangs de nouveau ?
Nous nous attendons toujours à des répressions et à des arrestations. Nous avons vu des gens se bomber le torse pour dire que tout va bien dans le pays et que désormais toutes les forces de ce pays sont neutralisées. Puisqu’ils disent qu’ils n’y aura pas de manifestations et nous aussi nous disons qu’il y en aura, c’est ce que nous allons démontrer sur le terrain. Vous avez-vous-même suivi pour la fermeture de notre siège, nous avons suivi la voie légale en déposant plainte au niveau des juridictions du pays, ce qui n’a pas prospéré. Tout ceci nous oblige à descendre dans la rue. Ce n’est pas par gaieté de cœur qu’on le fait. Nous savons toutes les conséquences qui vont en découler quand nous allons décider d’organiser une manifestation. Mais est-ce que nous avons le choix ? On n’a pas le choix, nous assumons notre position. Nous connaissons les conséquences mais nous les assumons. Nous à l’UFDG, nous nous sommes dit que tant qu’il y a un seul cas d’injustice dans ce pays, nous devrions nous abattre afin que cela change. C’est cela défendre la liberté et la démocratie.
Un mot pour conclure ?
Nous disons à l’ensemble de cette couche que ce qui se passe dans ce pays est une obstruction à la liberté et à la démocratie. Cela ne concerne pas seulement ceux qui sont détenus, mais l’ensemble des jeunes de ce pays. C’est pourquoi nous devons nous lever pour montrer notre mécontentement et de prouver que des situations comme ça ne peuvent pas continuer dans ce pays. C’est en cela que nous sommes tous interpellés. Nous devons nous lever pour lutter contre la situation actuelle qui n’honore pas notre Guinée.
Bah Boubacar Loudah
Pour Africaguinee.com
Tel : (00224) 655 311 113
Créé le 28 juin 2021 12:26
Nous vous proposons aussi
TAGS
étiquettes: Interviews, Manifestations, Opposants écroués