Complot, course à la succession, sanctions : les confidences de Cellou Dalein…
CONAKRY-Dans la deuxième partie de l'interview "vérité" que Cellou Dalein Diallo a accordée à votre quotidien en ligne, nous avons abordé plusieurs sujets d'actualité. Des mécanismes de sanctions de l'Union Européenne, à son interdiction de sortie du territoire, en passant des complots dont il se dit victime, l'ancien Premier ministre ouvre son cœur. Entretien exclusif!!!
AFRICAGUINEE.COM : Récemment vous avez dénoncé un "complot" ourdi par le pouvoir visant à vous écarter du jeu politique. Pourriez-vous revenir en détails ? Avez-vous des craintes à ce niveau ?
CELLOU DALEIN DIALLO : Rappelons qu’en 2011, Alpha Condé avait affirmé publiquement : « dans six moins, il n’y aura plus d’opposition en Guinée » montrant ainsi qu’il est allergique à toute contestation. Il n’y a pas eu un, mais plusieurs complots qui ne visaient qu’à éliminer un adversaire indomptable et incorruptible, en l’occurrence l’UFDG.
Ce Parti, dont la capacité d’organisation et de mobilisation, le poids électoral et la résilience du Parti ont été suffisamment mis en évidence lors de la lutte contre le troisième mandat et pendant l’élection présidentielle d’octobre 2020.
Cette force dérange et effraie Alpha Condé et les candidats à sa succession. D’où la volonté d’affaiblir ou de neutraliser l’UFDG en accablant les dirigeants du Parti d’infractions fallacieuses et grotesques telles que la fabrication et la détention d’armes de guerre et l’atteinte à la sûreté intérieure de l’État. Le document intitulé « Rapport sur les violences politiques en Guinée (2019-2020) et les enquêtes judiciaires en cours » élaboré par le MATD et le Ministère de la sécurité qui est le document de référence du Procureur de Dixinn, ne visent qu’à accréditer cette thèse du complot attribué à l’UFDG et au FNDC.
Vous êtes sous le coup d'une interdiction de sortie du territoire prise depuis octobre dernier par le parquet de Mafanco. Aviez-vous été mis au courant de cette mesure ?
Il n’existe aucun acte formel m’ayant été notifié m’interdisant de sortir du territoire national. Vous savez, sous le régime de Alpha Condé, l’arbitraire règne en maître absolu. La Constitution, les lois et règlements sont supplantés par sa seule volonté et la justice est sa chose personnelle.
L’indignation nationale et internationale qu’a suscitée mon interdiction de sortie du territoire était telle qu’il leur fallait trouver un subterfuge pour expliquer cette énième violation de mes droits les plus élémentaires.
Il sied ici de citer Maitre Mohamed Traoré qui affirmait au sujet dudit procureur « qu’il a préféré offrir sa poitrine pour recevoir les « balles » en lieu et place de quelqu’un ». Tout le monde sait que ce « quelqu’un » n’est personne d’autre qu’Alpha Condé qui, informé de ma présence dans l’avion, instruisit immédiatement sa police de me faire débarquer.
Cellou Dalein peut-il être considéré aujourd'hui comme un prisonnier en liberté de "mouvements" ?
S’il est vrai que je suis privé de mon droit d’aller et de venir, les prisonniers sont ceux qui sont arbitrairement détenus à la maison centrale depuis 6 mois et qui sont privés de la chaleur et de l’affection de leurs familles et proches. Ce sont les militants et responsables de l’UFDG, de l’ANAD et du FNDC. Ce sont Chérif Bah, Ousmane Gaoual Diallo, Cellou Baldé, Abdoulaye Bah, Etienne Soropogui, Fonikè Menguè, Madic 100 Frontières, Souleymane Condé pour ne citer que ceux-là, qui sont détenus en raison de leur opposition au troisième mandat, sur la base d’accusations grotesques et fallacieuses de fabrication et détention d’armes de guerre et d’atteinte à la sureté de l’État sans aucune preuve.
Vos avocats ont enclenché plusieurs procédures visant d'abord à récupérer votre passeport ensuite à lever la mesure d'interdiction. Avez-vous espoir que ces recours puissent aboutir ?
Comme vous le savez, la justice dans notre pays est la chose personnelle d’Alpha Condé. Il en dispose à sa guise, dicte sa volonté qui est aussitôt exécutée. Lorsqu’elle ne blanchit pas les bourreaux, elle les place hors d’atteinte et ses décisions sont toujours fonction de l’identité politique des justiciables qu’elle condamne avant toute instruction.
Au plan international vous obtenu le soutien de l'International Libéral dont vous être le vice-président mais aussi de certains eurodéputés. Est-ce réconfortant pour vous ?
C’est toujours réconfortant de bénéficier du soutien et de la solidarité de ceux qui partagent les mêmes valeurs que soi. Nous avons noté avec beaucoup de satisfaction la dénonciation et la condamnation des violations récurrentes des droits humains, des règles et des principes de la démocratie et de l’État de droit en Guinée.
Non seulement par les Organisations de défense des droits de l’homme comme Amnesty International, HRW, la FIDH, mais également par le Haut-Commissariat aux droits de l’homme des Nations Unies, la Commission africaine des droits de l’homme et des peuples, l’UE, l’Internationale Libérale, le Réseau Libéral Africain, le Département d’État américain et plusieurs élus français.
Vous réclamez l'application de l'article 96 de l'accord de Cotonou. Selon vous quel type de sanctions l'UE peut-elle prendre sans que cela n'impacte la vie des populations ?
L’UE, à travers l’Accord de Cotonou, dispose d’instruments contractuels pour interpeller et même sanctionner les États ACP (Afrique Caraïbes pacifique) qui se rendent coupables des violations des droits humains et des principes et règles de la démocratie et de l’État de droit.
Récemment, l’UE s’est dotée d’un nouvel instrument, en l’occurrence la loi Magnitsky, qui permet de sanctionner et de frapper d’interdictions diverses dans l’espace européen (gel des avoirs, interdiction de voyager…), des personnes physiques ou morales, étatiques ou non, qui se seraient rendues coupables ou complices de violations graves des droits de l’homme quel que soit le pays où ces violations auraient été commises.
Nous considérons que cela peut contribuer à défendre les droits humains dans le monde. Ce type de sanctions n’affectera pas la coopération financière et n’aura donc pas d’impact sur les pauvres populations. Malheureusement pour l’Afrique, on constate que ces instruments ne sont pas appliqués.
La Guinée a perdu cette année le MCC, un important programme du gouvernement américain. Cela vous a-t-il surpris ?
On ne peut que déplorer la perte d’un financement important qui aurait pu contribuer à la modernisation de nos infrastructures. Mais il convient de rappeler que le MCC est une prime à la bonne gouvernance octroyée sur la base de critères intimement liés au respect des droits humains et des libertés fondamentales. Ce n’est donc pas une surprise que la Guinée d’Alpha Condé en soit privée.
A suivre…
Diallo Boubacar 1
Pour Africaguinee.com
Tel : (00224) 655 311 112
Créé le 10 mai 2021 15:01Nous vous proposons aussi
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