Maitre Ivan Terel avocat de Chérif Bah et cie:  » Ce que nous attendons de la Cour de la Cédeao… »

Maître Ivan Terel

PARIS-Pourquoi les avocats internationaux de Chérif Bah, Ousmane Gaoual et compagnie  ont-ils porté plainte contre l'Etat guinéen devant la Cour de Justice de la CEDEAO ?  Quelles sont leurs attentes ? Maitre Ivan Terel, un des avocats à l'origine de la plainte, a répondu aux questions d'Africaguinee.com.  Entretien exclusif.


 

AFRICAGUINEE.COM : Vous avez enclenché une procédure contre l’Etat guinéen devant la cour de justice de la CEDEAO. Dites-nous quelle est l’opportunité d’une telle démarche ?

MAITRE IVAN TEREL : Cette démarche intervient parce que nous avons constaté que les poursuites contre nos cinq clients sont entachées d'un grand nombre de violations de leurs droits élémentaires.  Les avocats de la Défense ont soulevé des problèmes. A savoir : la violation du droit de la défense, la violation du droit à la présomption d’innocence, la violation du secret de l’instruction. Ces violations sont tellement graves et tellement nombreuses que nos confrères du collège de la défense avec qui nous travaillons sur place, ont été contraints de suspendre leur mission. C’est un acte sur lequel tout avocat réfléchit et ne le prend qu’en dernier recours. Ce faisant, en saisissant la Cour de justice de la CEDEAO, il est question finalement de soumettre à l’appréciation de la cour, la question du respect par la République de Guinée de ses engagements internationaux et des traités qui ont été signés.

Quelles sont vos principales attentes auprès de cette cour ?

Nous sollicitons qu’elle ordonne à la République de Guinée la libération immédiate de nos cinq clients arbitrairement détenus depuis quatre mois. Nous demandons aussi que la Cour tienne compte de l’urgence de leur situation et qu'elle statue dans les meilleurs délais. Tant du fait de la gravité des violations de leurs droits, que du contexte sanitaire et de leur état de santé, la situation de nos clients, réclame une intervention à très bref délai de la Cour. Deuxièmement, sur le fond, nous sollicitons de la Cour qu’elle constate un certain nombre de violations des instruments internationaux par la Guinée et qu’en conséquence, elle ordonne à la République de Guinée de se mettre en conformité.

Des procédures similaires ont été portées auprès de cette Cour mais elles n’ont pas été examinées de manière diligente. Est-ce que vous n’avez pas de crainte à ce niveau ?

Moi je suis avocat et je m’en remets aux juridictions et organes que je peux saisir. La Cour de justice de la CEDEAO a précédemment été saisie dans le contexte électoral et post-électoral en République de Guinée. C’est une voie qui est offerte avec un mode de recours individuel qui nous permet la saisine. Maintenant, je ne peux pas me substituer à l’appréciation de la Cour. Nous considérons que nous avons suffisamment d’éléments pour que la Cour de justice de la CEDEAO puisse se prononcer et considérer la détention de nos clients comme étant arbitraire. Nous attendons la réponse que devra faire la Guinée à nos arguments dans le cadre d’un processus juridictionnel contradictoire.

Quand avez-vous fait le dépôt de cette requête ?

Elle a été déposée la semaine dernière.

Le président Alpha Condé a dit que vos clients n’étaient pas des détenues politiques. Pour lui ce sont des citoyens qui sont en conflit avec la loi. Qu'en pensez-vous ?

Quand vous avez dans un pays les principales ONGs qui se sont intéressées à la question, qui ont dénombré au moins quatre cent personnes détenues, -soit soutiens, militants, soit cadres et hauts responsables de l’opposition en Guinée-;

Quand vous avez pour les cinq clients que nous représentons, qui sont aux responsabilités au sein des partis d’opposition notamment M. Ibrahima Cherif Bah qui est vice-président de l’UFDG, qui sont tous détenus et que les confrères sur place disent qu’ils ont même des difficultés d’accès et prendre copie du dossier et qu'ils considèrent que ce dossier est vide, nous avons une situation dans laquelle, on a des personnes qui sont tout simplement « embastillées ». Nous même avec mon Confrère Patrick Klugman avons été empêchés de nous rendre en Guinée pour rendre visite à nos clients. Peut-on dans un pays dans lequel autant de personnes soutenant l’opposition, plusieurs centaines, sont toutes détenues de ce seul fait, et ignorer l’évidence à savoir le motif bien sûr politique de ces poursuites et de leur placement en détention. D’autant que s’ajoutent une série d’autres faits concernant l’opposition dans le contexte post-électoral que l’on sait, concernant par exemple le local du parti de l’UFDG et de nombreux autres faits.

Dans ce contexte-là, voir le président de la Guinée ignorer purement et simplement les fonctions politiques de nos clients et affirmer candidement que tout va pour le mieux dans le meilleur des mondes, cela n’est pas possible. D’ailleurs cette prise de position avait été assortie d’une marque de défiance vis-à-vis de certains medias français dont France24 et RFI à qui il reproche un manque de déférence. Je crois que le sort qui est fait à nos clients n’est pas une œuvre de justice, c’est une œuvre d’injustice dont ils sont victimes et, à travers eux, c’est toute la démocratie guinéenne qui est atteinte quand toute l’opposition se voit ainsi « criminalisée » ou menacée de l’être.

Dans un de vos communiqués vous avez déclaré votre intention de saisir d’autres institutions telles l’Union Européenne. Est-ce que cette série a été enclenchée à ce jour ?

La saisine juridictionnelle pour l’instant est celle de la cour de justice de la CEDEAO. Maintenant, évidemment, la plus grande crainte de nos clients toujours en détention est celle d’être oubliés. Donc, nous nous tachons de mobiliser toutes les institutions qui s’intéressent à la situation de nos clients du fait de leur détention arbitraire, du fait des violations des droits évidents dont ils sont les victimes. Notre premier objectif c'est de faire en sorte que nos clients ne soient pas oubliés à leur sort.

Quelles sont les institutions que vous entendez saisir ?

Pour l’instant c’est la cour de justice de la CEDEAO. Maintenant on verra au fur et à mesure. Vous n’êtes pas sans savoir qu’il y a d’autres organismes internationaux qui peuvent s’intéresser à la question et au sort de nos clients notamment des institutions Onusiennes. Tout est possible à partir du moment où on a des enceintes qui peuvent entendre nos revendications et qui peuvent se saisir de nos actions, de nos requêtes et de nos plaintes et rappeler la Guinée à ses obligations.

Un dernier un message ?

J’en appelle à tous les protagonistes, en Guinée et dans le monde, de prendre leurs responsabilités, de ne pas tenter de mettre de côté le problème qui est posé par la détention arbitraire de nos clients, par le tort qui leur est fait, par la gravité de la menace pesant sur leur état de santé, par les mesures de contraintes auxquelles ils sont soumis. Nos clients sont pris en tenaille entre d’un côté, le pouvoir guinéen qui prétend ne rien voir de politique dans cette affaire et de l’autre côté, une procédure excessivement longue et qui ne leur permet pas de se défendre, l’objectif étant, qu’ils soient oubliés à leur sort. De notre côté nous œuvrerons sans relâche que cela ne soit pas le cas et pour rétablir nos clients dans leurs droits. La priorité pour nous aujourd’hui c’est d’obtenir leur libération.

 

Interview réalisée par Diallo Boubacar 1

Pour Africaguinee.com

Tél. : (00224) 655 311 112

Créé le 16 mars 2021 08:41

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