Gaoual et cie désormais sans défense : Leurs avocats « suspendent » leur assistance

CONAKRY- Ça pourrait être l'un des tournants majeurs de la procédure judiciaire déclenchée contre les opposants incarcérés depuis bientôt trois mois à la maison centrale de Conakry. Le collectif des avocats qui défend Ousmane Gaoual Diallo, Chérif Bah, Cellou Baldé, Abdoulaye Bah, Etienne Soropogui et compagnie, a décidé de suspendre sa participation dans la procédure en cours. Ils dénoncent une sorte de "caporalisation" de la justice par l'exécutif. La goutte d'eau qui a fait déborder le vase, concerne les dernières décisions de justice, rendues par les tribunaux de Conakry dans les dossiers concernant des opposants et surtout la lenteur dans le traitement des procédures en cours.
"On constate que la justice est devenue un instrument politique. Elle ne fait que distribuer des peines sans fondement contre des opposants. On ne peut pas continuer à l'accompagner dans cette démarche", s'insurge un avocat. Plusieurs figures de la société civile ou de simples opposants politiques, ont été condamnées à des peines d'emprisonnement ferme ces derniers temps. De Souleymane Condé à Youssouf Dioubaté, en passant par Foniké Mengué ou encore Madic 100 frontières, la justice s'est montrée "impitoyable". Tous ces opposants ont été condamnés à des peines d'emprisonnement fermes. Interrogé sur cette affaire Maître Thierno Souleymane Baldé a donné les raisons de leur décision. Selon cet avocat, son collectif n’accompagnera pas l’Etat dans sa politique de museler l’opposition.
« On comprend que l'objectif c’est de museler tous ceux qui contestent le 3ème mandat en utilisant la justice. Et nous ne sommes pas disposés à s’associer à une telle pratique. Donc, nous allons suspendre notre participation et attendre soit, que les droits des prévenus soient respectés, ou bien on les laisse faire ce qu’ils ont envie de faire. Il y a également les deux poids deux mesures. Il y a des citoyens qui insultent en longueur des journées des leaders de l’opposition, mais ils ne sont jamais inquiétés. Moi qui ai fait l’objet des coups et blessures, ma plainte n’a jamais été examinée. Le directeur national de la police ne vient pas se présenter alors que les autres qui n’ont rien fait sont arrêtés. Ces deux poids deux mesures sont inadmissibles, il y a l’égalité devant la loi », a expliqué l'avocat.
Et de continuer : « Depuis le début de cette procédure, ils disent que les droits des détenus sont respectés alors que c’est totalement faux. A commencer d’abord par leur arrestation, la plus part d’entre eux ont été arrêtés de manière illégale. La loi prévoit qu’on ne doit pas arrêter quelqu’un au-delà de la période entre 6h du matin et 19h à moins qu’il y ait un flagrant délit. C’est-à-dire que la personne est en train de commettre soit un délit ou un crime ou bien qu’il y ait des circonstances exceptionnelles. La plus part des gens sont des pères de famille qui ont un domicile connu, auxquels on aurait pu envoyer tout simplement une convocation afin de leur permettre de venir s’expliquer devant les officiers de police judiciaire. Cela n’a pas été fait. Quand ils ont été arrêtés, à part les détenus politiques d’un certain statut notamment les Gaoual et Cie, ils n’ont pas pu avoir une assistance d’un avocat pendant leurs auditions. Les délais de garde-à-vue n’ont pas été respectés, il y a certains qui ont été détenus pendant plus de trois (3) de semaines d’autres un mois, avant d’être transférés devant le tribunal. Quand ils ont été transférés, ils ont tous été inculpés pour les mêmes infractions, il n’y a pas eu des scellés pour démontrer effectivement qu’ils ont commis ces infractions.
Il y a même un mal voyant avec certains de ses frères qui est détenu. Alors que ce dernier aurait pu être libéré tout simplement parce qu’ils savent pertinemment qu’il ne peut pas commettre de telles infractions. Ensuite, tous ceux qui sont arrêtés il y a certains d’entre eux qui sont malades, quand on fait des demandes d’hospitalisation, c’est systématiquement rejeté. C’est ce qui fait qu’il y a eu plusieurs décès. A ce stade où nous parlons, il y a des gens qui sont très malades, on a demandé à ce qu’ils soient hospitalisés ou au moins qu’ils bénéficient des soins ambulatoires avec une prise en charge de leurs parents, ça aussi ça été refusé. Pendant les auditions, la loi prévoit qu’il faudrait qu’ils mettent à la disposition des avocats les dossiers afin de leur permettre de les examiner et puis d’aider les prévenus avant leurs auditions devant les juges, et ça aussi n’a pas été respecté. Il y a eu des ordonnances de placement en détention qui ont fait l’objet d’appel, mais les dossiers n’ont jamais été transférés au niveau de la Cour d’Appel. Donc cela aussi constitue une violation de leurs droits d’avoir un second degré de juridiction.
Il y a les cas de Oumar Sylla alias Fonikè Menguè, Mamady Condé alias Madic 100 frontières, Souleymane Condé, Youssouf Dioubaté qui ont été condamnés à des peines de prisons lourdes alors que dans le cas par exemple de Youssouf Dioubaté, lui il n’était qu’un simple chauffeur, il n’a absolument commis aucun acte répréhensible. On ne peut condamner quelqu’un à une telle peine sans pour autant que la personne ait pu commettre une quelconque infraction. Et surtout, il n’y a eu aucun élément de preuve », a expliqué l'avocat.
A suivre…
Oumar Bady Diallo
Pour Africaguinee.com
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Créé le 10 février 2021 13:24
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