Kindia : Immersion à Warakhalan, frappé par un tremblement de terre…
KINDIA-Située à environ 75 kilomètres dans le nord-ouest de la commune urbaine de Kindia, la localité de Tènè Warakhalan, a été secouée par un tremblement de terre d'une magnitude 5.0, le mercredi 03 février 2021. La population de cette bourgade de la sous-préfecture de Bangouyah, a une vocation agro-pastorale. De nos jours, ce district est frappé de plein fouet par des calamités naturelles : tremblement de terre, montée des eaux. Ce qui bouleverse leur mode de vie. Une seule envie les anime : Quitter.
Les secousses sismiques commencées il y a environ huit semaines plongent les populations dans la stupeur et le traumatisme. Les habitants n'avaient pas connu, auparavant, pareils phénomènes naturels. Il n'y a pas que les citoyens de Tènè Warakhalan qui ont ressenti les vibrations de la terre. Les districts environnants aussi ont eu la même sensation. Arrivée dans la localité de Téné Warakhalan, on est frappé les murs lézardés des habitations. Le village fait partie des localités impactées par la construction du gigantesque barrage hydroélectrique de Souapiti. D'ailleurs, les habitants de Téné Warakhalan ne sont pas d'illusions. Pour eux, tout leur malheur vient de là. Car avant le début des travaux, ils vivaient dans la tranquillité. Aujourd'hui, à cause de la montée des eaux du barrage, ils n'ont plus de terres arables pour pratiquer l'agriculture. "Nous avons faim", glisse un habitant. Le tremblement de terre survenu la semaine dernière a laissé des traces sur presque toutes les habitations. La quasi-totalité des maisons sont fissurées et certaines même sont à terre. Salif Sylla président dudit district explique :
« Nous sommes aujourd’hui dans une inquiétude qui ne dit pas son nom. Nous avons vécu Ebola (2014). Après le passage de cette maladie, le coronavirus est venu aussi. Maintenant, c'est des tremblements de terre qui viennent nous secouer. On n'avait jamais connu ça avant. C’est inhabituel. Depuis que le phénomène a commencé, ça cause des fissures sur nos concessions. Ça provoque une panique totale chez nous. Certaines maisons se sont effondrées, notre école, toutes les maisons sont presque touchées. Nous avons voulu même quitter ce district pour ne pas que le pire se produise sur nous. Parce que c’est un phénomène inhabituel. Pour une première fois, lorsque le tremblement de terre a eu lieu, il n'y a pas eu de dégâts. Mais cette fois-ci, nous sommes inquiets.
Aujourd’hui, notre préoccupation, c’est comment déplacer les gens pour que nous soyons épargnés de cette catastrophe. Parce que de la tombé de la nuit, jusqu’au matin nous ne parvenons pas à dormir. Nous avons peur. Si ça commence, tout le monde sort de la maison pour être au dehors. Vous-mêmes, vous avez vu comment les maisons sont fissurées. Ce sont ces difficultés que nous sommes confrontés. Si les autorités peuvent nous aider, nous leur tendons la main pour éviter la catastrophe dans cette localité. C’est ce que nous demandons au gouvernement », explique-t-il.
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Selon le président du district de Tènè Wararkhalan, la construction du barrage Souapiti serait à l’origine du malheur qui leur arrive aujourd’hui. « Pour nous, la cause de ce tremblement de terre est due à la construction du barrage hydroélectrique de Souapiti. Parce que nous ne sommes pas habitués à ça. Depuis la création de ce village, aucun événement de ce genre ne s’était produit ici. Donc, c’est la construction de ce barrage qui est à l’origine de ce tremblement de terre qui secoue notre village. Depuis le tremblement de terre survenu à Koumbia dans les années 80, nous n’avions pas vu pareil. Il a fallu qu'on commence la construction du barrage Souapiti pour qu'on vive ce que nous sommes en train de vivre aujourd'hui. Nous demandons aux autorités de Bangouya de nous venir au secours nous sommes très traumatisés.
De Kindia à Conakry, nous demandons à toutes les autorités de nous venir au secours. Tous ceux qui peuvent nous apporter la paix du cœur, ils n’ont qu’à nous aider parce que nous sommes dans l’incertitude de vivre ici. Nous voulons d’ailleurs notre déplacement comme les autres pour avoir la paix du cœur. Tous les jours la terre ne fait que trembler. Le mercredi passé, c’est le pire qui s’est déroulé, causant assez de dégâts. A la tombée de la nuit, on sort dehors pour dormir à la belle étoile. Parmi tous les villages environnants, c’est Téné Warakhalan qui a payé le lourd tribut. C’est inquiétant », indique Salif Sylla.
Citoyen de la localité, Sekou Fantamady Sylla lui aussi fait part de son inquiétude par rapport à l’effondrement répété des maisons.
« Nos maisons se sont effondrées. Nous nous n’avons pas de moyens. Nous comptons sur l’appui de certains d’entre nous. Si une maison s’effondre, il faut beaucoup de moyens pour sa reconstruction. A l’heure actuelle, nous sommes très inquiets parce que l’eau a commencé à envahir notre village. Même chez nos voisins, c’est très inquiétant. Tout ce qu'on veut, c’est de quitter. C’est la seule idée qui anime tous les habitants de notre village. Nous voulons être dédommagés et être déplacés ici comme les autres à Konkouré. Personne ne veut rester dans ce village maintenant (…) Toutes les maisons construites en banco ou en dur ont payé les frais. Quand ça commence, c'est toute ta famille vient s’accrocher sur toi, le seul espoir de survie. C’est inquiétant. Nous demandons au gouvernement de nous venir en aide », plaide cet habitant de Téné Warakhalan.
Pour Ibrahima Sylla, un autre citoyen, beaucoup de villages ont bénéficié la construction du barrage de Souapiti sauf leur localité. Il demande à ce qu’on délocalise leur village avant que le pire n'arrive.
« Pendant la construction de ce barrage, aucun fils de Tènè warakhalan n’a été embauché jusqu’à la fin. Encore, tous les villages environnants ont été dédommagés par l’Etat. Je peux citer : Mbaylan, Doureya, Djombakhinma, Goudeya, Bawossare. Ils ont tous été dédommagés et délocalisés. Ils sont partis à Kinfanya. Ils nous ont dit que Warakhalan centre ne bouge pas. Et si la panique continue, nous ne pouvons pas rester. Ils nous ont dit que c’est 23 maisons qui doivent être dédommagés au centre de Warakhalan. Les autres villages, ceux qui doivent quitter, leurs maisons sont déjà construites. Chez nous ici, on nous demande des choses que nous ne saurions satisfaire, on ne vit que de l’agriculture. S’ils veulent nous déplacer, qu'ils le fassent maintenant. Nous sommes prêts à quitter ici, nous sommes très inquiets », soupire cet habitant de Warakalan.
Depuis le début de ces tremblements de terre, cette population agropastorale tire le diable par la queue. Facinet Soumah explique certaines difficultés auxquelles, ils sont confrontés. « Depuis le début de la construction du barrage Souapiti, l’eau est venue envahir nos bas-fonds. Nous ne disposons plus de terres arables. C'est seulement 30 mètres qui nous séparent de cette eau montante. Nous ne savons que faire. Nos arbres fruitiers, nos champs, l’eau a tout envahi et aucun dédommagement de la part du gouvernement n’a été fait. Nous avons faim. Alors que nous faisions face à toutes ces difficultés, le tremblement de terre aussi est venu s’ajouter. On craint le pire. Notre souhait aujourd’hui, c’est de quitter ici pour aller mener une autre vie ailleurs, sans crainte », a confié M. Soumah.
En attendant l'arrivée de l'aide qu'elles sollicitent auprès des autorités, ces populations vivent la peur dans le ventre et ne savent plus à quel saint se vouer.
A suivre…
De retour de Tènè Warakhalan, Cherif Kéita
Pour Africaguinee.com
Tel : (00224) 657 52 26 02
Créé le 8 février 2021 13:24Nous vous proposons aussi
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