Cellou Dalein : « Même si je perdais la vie dans ce combat… »

Cellou Dalein Diallo, leader de l'UFDG

CONAKRY- Quelles sont les attentes de Cellou Dalein Diallo vis-à-vis de la Communauté internationale ? Après les tueries survenues récemment à Conakry, le Président de l’UFDG (Union des Forces Démocratiques de Guinée) a lancé un appel à la communauté internationale. L’opposant qui s’est confié à notre rédaction, a également adressé un message à ses militants au sujet de la manifestation prévue ce jeudi 7 novembre 2019.


Dans cette interview exclusive, Cellou Dalein Diallo est revenu sur cette autre journée meurtrière du lundi 4 novembre dernier. 

 

La violence politique en Guinée a franchi un nouveau cap cette semaine quand un cortège funèbre a été la cible d’attaque et de tirs. On a enregistré assez de morts. Selon vous, comment pourrait-on mettre fin à ces tueries en Guinée ?

Je pense que ce n’est pas aussi compliqué de mettre un terme à ces crimes commis lors des manifestations. Il suffit qu’il y ait une volonté politique, il suffit de mettre un terme à l’impunité pour que l’Etat assume ses responsabilités. Il suffit que le Gouvernement ouvre des enquêtes sérieuses, identifie les auteurs et qu’ils soient traduits devant les tribunaux, je pense que cela va s’arrêter. Mais tant qu’il y a une impunité totale accordée aux criminels, comme on le dit souvent, l’impunité encourage la récidive.  Si le cas de Zakariou avait été bien traité avec la publicité qui sied pour dissuader toute velléité d’intention de tuer impunément les populations, je pense que les gens ne seraient pas arrivés à ce chiffre fatidique de cent vingt morts depuis qu’Alpha Condé est au pouvoir. Pour mettre donc un terme à ces violences il faut mettre un terme à l’impunité. Malheureusement lorsqu’on écoute Alpha Condé, il dit que c’est eux qui se tuent entre eux et donc ça ne m’intéresse pas. C’est son discours à Koba la fois dernière. Alors que la vie humaine est sacrée et elle est le premier droit de l’Homme (…). Malheureusement il n’accorde aucune importance à la vie de ses opposants. Si vous voyez le sort infligé aux corps de ces citoyens arrachés à l’affection de leurs familles vous comprendrez que le Président n’accorde aucun intérêt aux droits de ces opposants. Comme je l’ai dit onaurait pas pu assister à ce genre de scène s’il y avait une peur des sanctions. 

Les engagements pris par le Gouvernement dans un communiqué publié récemment ne suffisent pas selon vous ? 

A cet égard vous savez que le Gouvernement a perdu toute crédibilité, Alpha Condé a dit partout où on a voulu changé les constitutions il y a eu la violence et des morts mais cela n’a pas empêché que les constitutions soient changées. Vous avez suivi son discours de Boffa où il a dit que c’est eux qui s’entretuent. Donc cela ne l’intéresse pas. Depuis 2010 il y a eu cent vingt morts et aucune enquête n’a été ouverte, jamais un gendarme ou un policier n’a été traduit devant les tribunaux pour crime commis lors des manifestations. A supposer même que ces crimes ne soient pas commis par les gendarmes et les policiers, pourquoi des enquêtes n’ont pas été menées. Tout simplement parce qu’il ne veut pas se mettre à dos les forces de sécurité dont la loyauté est indispensable à son maintien au pouvoir comme il n’a aucune légitimité. Pour la communauté internationale je m’attendais à un communiqué plus ferme (…), une condamnation des violences est une bonne chose. Mais elle aurait dû être plus ferme puisque ces violations récurrentes des droits humains en Guinée requière un peu plus de fermeté vis-à-vis du pouvoir liberticide. 

La Communauté internationale encourage également toutes les parties à privilégier le dialogue. Etes-vous d’accord ? 

Même si on peut aller au dialogue pour le processus électoral, mais on ne peut aller au dialogue que si nos camarades détenus illégalement en prison sont libérés. Nous sommes prêts à le faire pour le processus électoral, mais on n’est pas prêts à parler de changement de la constitution. 

Le Gouvernement reste pour le moment sourd face aux appels de la Communauté internationale qui a demandé notamment la libération des détenus. Que comptez-vous faire ? 

Avec ce Gouvernement on se demande toujours par quel moyen passer pour faire fléchir sa position. Nous essayons d’user des recours légaux que nous avons à notre disposition et surtout les manifestations dans les rues et les places publiques. Malheureusement ces manifestations sont très souvent réprimées dans le sang. Mais pour la libération de nos collègues on est prêt aussi à lancer un appel à la population pour les manifestations dans les rues et places publique pour exiger leur libération. Tout ça parce qu’Alpha Condé n’entend que ce discours. Sinon les lois sont là. L’expression de l’opposition par rapport au 3ème mandat n’est pas un motif valable pour arrêter les gens. Vous savez les promoteurs du 3ème mandat font les manifestations qu’ils veulent même si celles-ci sont interdites, eux ils sont sous la protection des forces de défense et de sécurité avec la bénédiction des préfets et gouverneurs. Mais chaque fois que les adversaires de ce projet veulent manifester ils étaient frappés, kidnappés, jugés et condamnés. 

Etes-vous de ceux là qui pensent aujourd’hui que c’est la communauté peulh qui est visée dans cette répression ?

Les gens s’interrogent, connaissant la ‘’Foula phobie’’ deAlpha Condé. Pourquoi c’est toujours les mêmes ou la même région naturelle ? c’est une question délicate qu’il faut posée à Alpha Condé lui-même. 

Certaines organisations dont la coordinational Haali Poular appellent à l’envoi d’une force d’interposition pour protéger notamment les populations civiles. Qu’en dites-vous ? 

Il serait souhaitable mais ce qu’il faut pour l’instant c’est une volonté politique de ceux qui assument des hautes responsabilités dans le pays. Il n’y a pas en fait deux clans. Certes il y a l’opposition qui est opprimée, dont les militants sont tués, les partisans du FNDC qui sont assassinés (…). Dans le contexte actuel c’est une volonté. Si Alpha Condé, Kassory Fofana, Alpha Ibrahima Keira n’avaient pas cette volonté on n’aurait pas assisté aux scènes qu’on a vécues. Alpha Condé n’a pas d’égard pour ses opposants car pour lui ce ne sont pas des citoyens. On peut en tuer autant qu’on veut on ne sera jamais interpellé. En tout cas c’est ce que l’expérience nous montre aujourd’hui. Donc une force d’interposition ne serait pas utile, il faut faire pression sur Mr Alpha Condé de l’intérieur comme à l’extérieur pour qu’il arrête de faire tuer ses compatriotes tout en garantissant l’impunité à ceux qui exécutent ses instructions.

Au-delà de la lutte contre le 3ème mandat, il y a également la lutte liée au processus pour les législatives. 

Le départ des députés de l’opposition n’a presque rien changé pour le moment du moment où la Commission électorale continue de dérouler son chronogramme. Maintenez-vous toujours votre demande de départ de Salif Kébé à la tête de cette institution ?

La déclaration publiée demandant la révocation de Salif kébé a été faite après un consensus avec les partis de l’opposition même si le document a été signé par Sidya Touré et moi. Parce que Kébé a violé son serment parce qu’il ne s’est pas montré indépendant. Lorsqu’Alpha Condé lui a dit qu’il faut les élections avant la fin de l’année, en tant qu’expert électoral il savait pertinemment que c’est impossible. Mais il a obéi aux ordres d’Alpha Condé sachant que c’est impossible d’aller au scrutin le 28 décembre 2019. Il a obéi à un ordre illégal du président, si demain Alpha lui demande de publier des résultats qui lui sont favorables il va le faire. Il a failli à son serment et violé le code électoral. Toutes ces fautes cumulées méritent qu’on le change. Nous exigeons qu’il soit remplacé par un autre cadre issu du barreau comme lui. 

Le FNDC appelle à une nouvelle manifestation, avez-vous un appel particulier ?

J’appelle tous les citoyens épris de démocratie, de justice et de paix à se mobiliser massivement pour participer à cette marche pacifique qui je rappelle a déjà été autorisée. Les lettres sont reçues au siège du FNDC autorisant la manifestation. Des réunions se tiennent au Gouvernorat pour définir les modalités d’encadrement de la manifestation. J’invite tous les citoyens à venir massivement participer à cette marche qui se déroulera sur l’itinéraire de la Tannerie Kondébounyi, Hamdallaye et stade comme la marche du 24 octobre. 

Votre garde-corps touché a indiqué que c’est votre personne qui était visée. N’avez-vous pas des craintes pour votre sécurité ?

J’ai fait le choix d’être un leader politique pour combattre la dictature. On a tiré sur mon véhicule, on a attaqué mon cortège avec des mambas où mon véhicule a été complètement caillassé. Je sais que je suis exposé ; mais j’ai dit à mes militants et partisans que le combat que nous menons est un combat pour libérer la Guinée de la dictature, pour libérer la Guinée de l’arbitraire, de la peur et de la division. Je suis engagé autour de ces valeurs et si je perdais la vie dedans ils devraient continuer la lutte parce que je ne l’aurais pas perdu pour rien, mais au service de la Guinée que j’aime dans sa diversité et de ce qu’elle est. Je suis prêt à affronter toutes les adversités pour le triomphe de ces valeurs. 

 

Interview réalisée par Boubacar 1 Diallo

Pour Africaguinee.ccom

Tél. : (+224) 655 31 11 12

Créé le 7 novembre 2019 10:42

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