Gambie : une mesure du gouvernement Barrow plonge plus de 1000 guinéens au chômage…

BANJUL-De nombreux ressortissants guinéens vivant en Gambie, petit pays anglophone d’Afrique de l’Ouest sont dans la dèche. Une décision du gouvernement d’Adama Barrow plonge plus de mille guinéens travaillant dans la filière de distribution du pain au chômage.
Le ministère du commerce a suspendu sur l’étendue du territoire national pour un période de 3 mois la distribution du pain. Cette décision impopulaire affecte de nombreux guinéens dont la seule source de revenue venait de la filière pain. La mesure est intervenue après un désaccord entre les patrons des boulangeries et les distributeurs de pain qui sont presque tous des guinéens.
« Ils ont interdit aux distributeurs de pain d’exercer à cause d’un malentendu entre les distributeurs et les propriétaires des boulangeries modernes. Ils étaient partis tous devant l’autorité qui a dit que les distributeurs de pain gagnent mieux que les producteurs de pain alors que toutes les dépenses leur reviennent. Le fait de vouloir diminuer le bénéfice des distributeurs, c’est de là qu’est né le bras de fer. Le ministre du commerce a pris la décision de suspendre les distributeurs pour unepériode de 3 mois. Les difficultés sont là maintenant presque l’ensemble des distributeurs sont des guinéens, ils sont plus d’un millier entre Banjul et Serrekunda. Les boulangeries modernes appartiennent presque toutes à des magrébins. Quelques guinéens nantis disposent de boulangeries mais la situation est actuellement difficile pour les distributeurs. Vous savez les boulangeries produisent, les distributeurs reviennent racheter avec eux pour envoyer dans les boutiques des différents quartiers, à vélo ou à moto », a expliqué Mariama Diallo guinéenne qui habite dans la région de Serrekunda.
Cette situation inquiète les membres de la corporation qui redoutent leur exclusion dans la filière au profit d’autres. Forcé d’être au chômage, ils se demandent comment gagner leur quotidien alors qu’ils sont interdits d’exercer la seule activité qu’ils savent faire.
Souleymane Touré distribue le pain à Banjul. Depuis la tombée de la décision, il reste à la maison sans rien faire. Il témoigne:
« 12 miches de pain se vend à la boulangerie à 62 dallassi, l’équivalent de 11.500 GNF. Les distributeurs revendent à leur tour entre 74 à 75 dallassi (environs 14.000 GNF). C’est la réduction de cette marge bénéficiaire qui a mis le feu aux poudres. L’autorité avait proposé à ce que les distributeurs prennent 75 butute (75 centimes) au lieu d’un dallassi et plus. Ce que les distributeurs refusent parce qu’il y a d’autres dépenses liées à la distribution. Les pains non vendus restent une perte entière pour les distributeurs. Finalement ils ont suspendu les distributeurs pour 3 mois, ce qui n’est pas sans conséquence parce que les véhicules qui distribuent ne vont pas au fond des quartiers, les boutiquiers sont obligés d’aller vers les boulangeries avec beaucoup de retard. Et les riches commerçants guinéens qui sont là ne suivent que leur intérêt ils n’assistent point les pauvres compatriotes. Sinon, il y a des propriétaires de boulangeries parmi ces guinéens riches, mais ils sont très peu à penser à la souffrance de leurs compatriotes pauvres. Finalement tout le monde est mis au chômage, la quasi-totalité de ces distributeurs sont des guinéens. On s’attendait à ce que l’autorité tombe sur les riches boulangers qui bénéficient de quelques avantages à titre de subventions afin qu’ils diminuent un peu le pain, mais on laisse ces gens pour s’acharner contre de simples distributeurs qui n’ont aucune protection parce que c’est informel. Il y a trop de pagailles avec les nouvelles autorités du pays, les gens regrettent le départ de Yaya Jammeh qui avait mis de l’ordre chacun savait ce qu’il devait faire», regrette ce ressortissant guinéen.
Ministre corrompu…
Pour Samba Diallo président des distributeurs de pain en Gambie le problème est ailleurs. Il soupçonne les nouvelles autorités de vouloir mettre leur corporation hors du business. Il accuse le ministre du commerce d’avoir été corrompu par les riches commerçants grossistes.
« Les nouvelles mesures visent à nous écarter du marché de pains, c’est plus de 1000 personnes et leurs familles qui vivent de cette distribution. En fait les patrons des boulangeries ont corrompu le ministre du commerce afin que toutes les actions leur reviennent (production et distribution). D’ailleurs le ministre avait dit qu’il ne négocie pas avec nous. Ils avaient proposé qu’on diminue notre bénéfice à moins d’un Dalassi, 75 bututes(centimes) sachant qu’on ne va pas accepter. Nous carburons nos motos pour distribuer, certains pains se cassent dans les courses c’est une perte pour nous. L’autre problème ici si tu donnes 50 pains à un boutiquier, et qu’ils ne vendent pas tout, les invendus te seront rendus, c’est une autre perte pour toi distributeur, même si sur les 50 il n’a vendu que 10, les 40 te reviennent. Le boutiquier et le boulanger ne prennent aucun risque, le perdant c’est le distributeur. Nous n’avions même pas fini de nous concerter ils nous ont suspendus. Pourtant nous avons payé toutes nos taxes, ici tu n’oses pas exercer sans payer tes taxes. Pour vous dire que c’est de la mauvaise foi, je ne vois pas le lien entre la diminution du bénéfice et l’exigence de disposer d’un véhicule pour tout distributeur. Ils ont exigé maintenant à ce que les distributeurs de pain disposent de véhicules et non des motos ou des vélos. Or, ce n’est pas tout le monde qui peut s’acheter un véhicule, voici une façon de barrer la route.
Leur objectif est de mettre des profanes dans le secteur auxquels ils vont payer une prime dérisoire. La boulangerie qui me fournissait du pain a acheté deux véhicules, ils ont employé des gambiens sans discuter de salaire. Je ne connais un seul patron guinéen qui a acheté 4 véhicules pour les attribuer à des guinéens, il a embauché 4 distributeurs par véhicules afin qu’ils puissent travailler un peu. Aujourd’hui certains font le travail dans la clandestinité à moto mais si la police te voit on te retire carrément ta moto. Nous demandons aux autorités guinéennes d’agir vite pour nous venir au secours sinon, ce n’est pas bon, nous sommes en pleins mois de ramadan, nos familles dépendent de cette activité et les charges sont lourdes, tout le monde est assis sans travail », déplore Samba Diallo.
Le consul de la Guinée à Banjul, Ibrahima Naby Youla reste injoignable pour le moment. Des sources indiquent qu’il serait absent de la Gambie depuis quelques jours. Au-delà de l’appel à l’aide fait à l’endroit de l’Etat guinéen par les compatriotes qui vivent de la distribution du pain en Gambie, ils comptent se mobiliser dans les prochains jours pour rencontrer le personnel de l’ambassade de Guinée en vue de trouver une solution rapide. Pour l’heure, les cadres de la direction nationale des guinéens de l’étranger qui ont été interpelés par nos soins, indiquent qu’ils ne sont pas informés de la situation des guinéens en Gambie.
Alpha Ousmane Bah(AOB)
Pour Africaguinee.com
Tel. (00224) 664 93 45 45
Créé le 14 mai 2019 19:06Nous vous proposons aussi
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