Ousmane Gaoual : « On a un nouveau plan… »
CONAKRY- En Guinée, le bras de fer entre le pouvoir d’Alpha Condé et l’opposition continue. La principale formation politique de l’opposition guinéenne promet de ne point reculer dans ses revendications.
Ousmane Gaoual Diallo, le coordinateur par intérim de la cellule de communication de l’Union des Forces Démocratiques de Guinée revient dans cet entretien sur certaines de leurs nouvelles stratégies face au pouvoir d’Alpha Condé.
AFRICAGUINEE.COM : Les manifestations classiques de l’opposition semblent avoir montré leur limite. Ne pensez-vous pas qu’il faille adopter une nouvelle stratégie ?
OUSMANE GAOUAL DIALLO :Est-ce que l’efficacité d’une manifestation c’est lorsque la masse sort et qu’elle se déplace d’un point A à un point B ? Est-ce que l’efficacité s’évalue sur l’impact que la manifestation peut avoir sur l’Economie, sur la paix sociale, la stabilité, sur d’autres leviers de l’économie de notre pays ? je suis tenté de vous dire que l’efficacité d’une manifestation de l’opposition s’évalue sur l’impact qu’elle peut avoir sur l’économie de notre pays, sur le fonctionnement normal de nos institutions, sur l’image de notre pays à travers d’extérieur. C’est à travers cela qu’on évalue l’efficacité.
Les gilets jaunes en France ce n’est pas parce qu’ils ont paralysé tout le pays, mais ça renvoie une très mauvaise image de la France. Ça impacte les touristes qui viennent en France, ça les effraie. Le Gouvernement français voit ces effets-là et recule. En Guinée on a les même effets, l’économie est à l’arrêt, les investisseurs ont peur, les touristes ne viennent pas. Faites un tour à l’hôtel Sheraton vous verrez que c’est vide. Tout est à l’arrêt. L’impact de nos manifestations ou de nos menaces de manifestation n’est pas à démontrer sur le fonctionnement de notre pays. Donc oui c’est négatif. Mais est-ce que le Gouvernement prend conscience de cela ? C’est là que le bât blesse parce qu’il fait semblant que rien ne se passe alors qu’il n’y a pas d’investissement nouveau, il n’y a pas de touristes, l’économie est à l’arrêt, les importations ont baissé. Nous avons un réel impact sur notre pays même si le Gouvernement par arrogance continue de minimiser cela. Il faut que le Gouvernement prenne conscience, appelle au dialogue, et qu’il respecte les conclusions des dialogues antécédents. C’est ce qu’on attend d’un Gouvernement dans une démocratie.
Les gilets jaunes ont réussi à faire plier Emmanuel Macron en France. Face au ras-le-bol général peut-on s’attendre à un effet de contagion en Guinée ?
Je pense que le Gouvernement guinéen devrait s’inspirer de ça. La France est la troisième ou la quatrième puissance militaire du monde aujourd’hui. Elle a une capacité de contenir les 130.000 manifestants à travers le pays. Si c’était la force, elle a une armée entrainée, aguerrie avec toutes les formes d’armes disponibles, mais l’Etat français est responsable. Au lieu d’aller dans ce bras de fer qui détruirait le vivre commun des français, le Gouvernement a accepté d’entendre la colère du peuple français. C’est ce qu’on attend de notre gouvernement et non dire qu’on va installer des militaires sur l’axe, montrer qu’il est plus fort. Mais nous voulons que vous entendiez notre colère. C’est ce recul qui manque à notre Gouvernement. Nous avons des gens irresponsables, du premier ministre au dernier des membres du Gouvernement. L’orgueil ne gouverne pas une Nation, c’est le discernement, le recul, et la prise de distance avec humilité qui gouvernent. C’est ce qui conduit à la concorde que nous attendons.
Dans vos nouvelles stratégies vous n’excluez pas d’appeler les populations à une désobéissance civile. Ne craignez-vous pas un basculement ?
Ça ne nous dérangerait pas que cela bascule. Basculer vers quoi ? Plus de stabilité ? Nous souhaitons que le Gouvernement nous écoute maintenant, qu’il prenne conscience dans l’urgence que notre pays est au bord de la rupture, qu’il écoute la bonne conscience de la société (…). Le Gouvernement doit acheter la paix en indemnisant les victimes de tous les régimes antérieurs. Les moyens existent. C’est de la responsabilité de l’Etat d’être à l’écoute de toutes les revendications. Si le Gouvernement défie cela, alors qu’il ne soit pas surpris du basculement. Aujourd’hui, on a testé un nouveau plan. Vous avez vu des manifestations spontanées en début de semaine dans les rues. Ça va s’accentuer. On va multiplier les actes de sabotage de l’Etat parce qu’il ne veut pas nous entendre. On va lui montrer qu’on a des capacités. Ces capacités ne se limitent pas seulement à la mobilisation des masses dans une rue. Si vous nous empêcher de nous réunir dans la rue pour marcher et tenir nos meetings, alors nous utiliserons d’autres moyens qui mettront en mal l’Etat. Sauf à nous tuer tous, sauf à tuer la démocratie, les guinéens vont continuer à résister. Ce peuple a résisté à l’esclavage, à la colonisation, nous résisterons à cette dictature et nous la vaincrons. Il n’y a que la démocratie qui survira dans notre pays.
Entretien réalisé par Diallo Boubacar 1
Pour Africaguinee.com
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Créé le 11 décembre 2018 18:37Nous vous proposons aussi
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