Installation des PA à Conakry : Quand la Guinée s’offre en spectacle
Dans un monde désormais fortement concurrentiel, chaque gouvernement fait tout ce qu’il peut pour donner une bonne image de son pays. C’est pourquoi, la décision des autorités guinéennes de mettre en place des PA dans certains carrefours et ronds-points le long de la route le Prince est contreproductive. Si cette mesure est censée ramener la paix et la quiétude dans ces quartiers, elle donne aussi et surtout une très mauvaise image à la Guinée.
Un étranger qui débarque pour la première fois à Conakry aurait l’impression que c’est l’intégrité du territoire qui est menacée. Tant le dispositif est disproportionné par rapport à des manifestants qui sont majoritairement des adolescents. Des agents sont postés partout. Des Pickup, dont la plupart ne sont pas immatriculés, sont stationnés le long de la route de Hamdallaye à Bailobaya.
Mais le spectacle le plus surréaliste est la mise en place d’une grande et vase tente au beau milieu du rond-point de la transversale N° 5, reliant Kissosso à Kobaya. C’est dans les parages que les deux jeunes avaient été tués le 12 novembre dernier. C’est également non loin de là que le militaire a été lynché. Les autorités ont sans doute voulu marquer les esprits à ces niveaux. Pour dire que cet endroit est l’épicentre de la violence. Et qu’il fallait apporter la réponse du berger à la bergère.
Mettre une telle logistique au beau milieu d’un rond-point, aménager juste au milieu de ce rond-point une toilette de fortune, entourée uniquement d’une petite natte, voilà l’image que cet endroit affiche au vu et au su de tous. Ce spectacle ne fait pas honneur aux Guinéens. Lesquels devraient savoir que la planète est devenue un petit village dans lequel les attitudes et comportements de chacun sont observés par les autres. Un pays qui offre un tel spectacle au reste du monde peut s’attendre à tout sauf à des investisseurs qui se bousculent chez lui.
Il y a mille et une méthodes de ramener le calme, la paix et la sécurité. Montrer ses muscles n’est pas toujours la meilleure solution. Dans le cas d’espèce, les origines de la crise sont connues. Ce sont les élections locales de février 2018. Un pays qui organise une élection et qui met 10 mois entre cette élection et l’installation des élus doit remettre sa méthode et sa gestion. Il ne doit pas chercher la cause de ses problèmes ailleurs. Ce problème est donc moins les manifestations que l’organisation chaotique des élections depuis 2010.
A titre de comparaison, peu après l’attaque terroriste perpétrée à Grand-Bassam en Côte d’Ivoire en 2016, une équipe de Guinéens à laquelle je faisais partie s’était rendue dans ce pays. Alors qu’on s’attendait à ce que la capitale ivoirienne soit totalement militarisée, on ne voyait aucun agent dans la rue. Même pas la police ou la gendarmerie encore moins l’armée. A la question de savoir pourquoi il y avait une telle sérénité alors que le pays venait de subir une telle barbarie, la réponse était la suivante : la présence militaire dans la ville était plus préjudiciable que les attaques terroristes.
Même si on dira que comparaison n’est pas raison, ce pays vient d’organiser des élections locales. Comme en Guinée, les résultats ont été contestés dans certaines circonscriptions électorales. A la différence avec la Guinée, au lieu de fouler la loi sous les pieds pour faire des accords, cette loi a été appliquée. Les élections ont été reprises dans les circonscriptions où elles ont été contestées. Et personne n’a rechigné. Quelques semaines plus tôt le même scénario s’est déroulé en Mauritanie.
Habib Yembering Diallo
Téléphone : 664 27 27 47
Créé le 3 décembre 2018 14:06Nous vous proposons aussi
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