Sékou Souapé parle : « Mes relations avec le Président Alpha Condé… » (Interview exclusive)
CONAKRY- Sekou Souape, l’un des membres fondateurs du Rassemblement du Peuple de Guinée, vient de briser le silence ! De ses relations avec le Président Alpha Condé aux années sombres du RPG, Sekou Souape a dit tout. Dans cet entretien exclusif accordé à notre rédaction, Sekou Souapé revient également sur les dernières manifestations de l’opposition et l’épineuse question d’un éventuel troisième mandat pour Alpha Condé. Exclusif !!!
AFRICAGUINEE.COM : Quelles sont vos relations avec le Président Alpha Condé ?
SEKOU SOUAPE : Mes relations sont très bonnes avec lui. Nous avons des relations du patron au subordonné. Depuis 1987 c’est quelqu’un que j’ai rencontré que je pratique. Nos relations ont d’abord été comme père et fils parce qu’au moment où je le rencontrais, j’avais à peu près 20 ans et lui peut-être 50 ans.
Il n’y a pas encore très longtemps vous étiez virulent à son encontre. Qu’est-ce qui a concouru à votre réconciliation ?
Avant de parler de ça, il faut savoir que j’ai été responsable des cellules que nous avons installées dans la clandestinité, que j’ai dirigées. Ce qui a conduit à son arrivée. Après cela c’était la lutte semi-clandestine. J’ai été de façon officielle le premier secrétaire général du parti. Tous les responsables que vous voyez graviter autour du parti, la plus part m’ont trouvé là-bas.
Mais dans une société humaine, il y a souvent des difficultés qui peuvent être dues à une certaine vision différente des choses. Quand les analyses et les pratiques divergent cela peut amener à des difficultés, des incompréhensions dans les rapports. C’est ce qui s’est passé à un certain moment de notre parcours. Je ne le cache pas, il y a eu des difficultés, lui aussi le sait. Mais c’était dû fondamentalement à des points de vu différents sur un certain nombre de questions.
Quoi par exemple ?
La conduite des affaires, la tenue du congrès au sein du parti, etc. Mais je pense que c’est une période qui est derrière nous. Depuis un certain moment, j’ai repris les activités au sein du parti. Tout le monde sait l’apport que chacun de nous fait pour que le parti avance de façon responsable, structurée. Lors que nous étions dans l’opposition, le mot d’ordre était très simple : « battons-nous pour avoir le Pouvoir ». Maintenant qu’on l’a, sa pratique ne peut pas être comme lorsque nous étions dans l’opposition.
Dans une période récente, les gens disaient qu’il y a l’effritement, les gens sont fatigués ainsi de suite, mais ce n’était pas le cas. Les gens ne comprennent ce qui s’est passé. C’est comme l’UFDG actuelle, son objectif ultime est la conquête du Pouvoir. Si elle arrive au pouvoir, elle aura un autre langage parce que si pendant la période de soudure, vous demandez aux gens de serrer la ceinture pour cultiver, une fois que la récolte est faite, si d’autres ont la possibilité d’avoir deux à trois plats par jour tandis que certains ne l’ont pas, pour maintenir la balance, il faut trouver un autre langage.
Est-ce c’était le cas chez vous ? Est-ce que c’est parce que vous vous sentiez écarté de l’exercice du pouvoir que vous avez adopté une posture de frondeur ?
Non les difficultés sont venues avant ça. Ce n’était pas à cause de l’exercice du Pouvoir. Tout le monde sait très bien qu’au moment où on venait pour essayer de bousculer la porte de la dictature, pour que la démocratie s’installe, c’était vraiment très compliqué. C’est ce qui a fait que certains d’entre nous, notamment moi, ont fait la prison. Je ne peux même pas compter combien de fois je suis allé en prison. En 1990 avant le vote de la loi fondamentale pendant que nous organisions les grandes marches, on a été arrêté, moi j’ai fait six mois à la sûreté après on m’a trimballé à l’Université de Sonfonia ici qui était à l’époque une école de police. Cette période était très compliquée.
Parlant des difficultés qui vous ont opposé au Président, vous avez fait cas de la non-tenue du Congrès. Et jusqu’aujourd’hui il tarde à venir…
Les organismes nationaux se sont réunis, des travaux ont été effectués, le parti se met en ordre de bataille. Des missions vont aller à l’intérieur du pays avec les conclusions de ces assises, très prochainement vous entendrez assez de nouvelles en ce qui concerne le RPG-Arc-en-ciel.
Vous vous réclamez d’être le fondateur du RPG. Aujourd’hui la question de succession se pose. Avez-vous l’intention de succéder au Président Alpha Condé ?
Je ne me réclame pas, je suis l’un des fondateurs du parti. Mais je vous dis tout de suite que ce n’est pas dans les objectifs. Le Président est le fondateur du parti, nous avons été ses collaborateurs de première heure à l’extérieur comme à l’intérieur du pays. Jusqu’à preuve de contraire, le parti et la majorité des militants estiment que le Président fait bien son travail. Même s’il y a des avancées économiques, le panier de la ménagère n’en ressent pas. Mais nous estimons que le Pr Alpha est un bon président et au sein du parti, il y a la démocratie. Il y a même des fois où il est contesté sur des sujets donnés. Il y a la majorité qui se dégage contre lui et il se plie. Donc, c’est un démocrate. La question de succession ne se pose pas. Il a été élu en 2015, nous sommes à deux ans d’exercice du second mandat.
Il s’agit de la succession au sein du RPG-arc-en-ciel…
Diriger un parti, ce sont les militants qui décident. Personne ne peut prétendre exercer une fonction que les militants ne lui ont pas confiée.
A cas où un congrès se tenait demain, est-ce que vous seriez candidat pour occuper la tête du parti ?
Je ne suis pas dans cette logique franchement. Nous faisons confiance au Président. S’il me demande d’occuper n’importe quelle fonction je serais là-bas ou je resterais militant à la base. On peut être efficace dans le parti sans être dans aucune structure. En ce qui concerne le congrès ou les questions de succession au sein du parti, ce sont des choses qui ne sont pas d’actualité chez moi.
Depuis un certain temps une partie de l’opinion prête au Président Alpha Condé d’avoir l’intention de briguer un troisième mandat. Si cette éventualité arrivait à se concrétiser le soutiendrez-vous dans cette démarche ?
Si c’est le Président qui décide et s’exprime, je serais le premier à descendre dans l’arène et à défendre ses propositions.
S’il dit demain qu’il veut aller au-delà de 2020 vous le défendrez ?
Absolument ! Mais à mon avis le Président ne s’est pas prononcé directement ou indirectement sur cette question. Donc c’est un sujet qui n’est pas d’actualité. Mais vous me demander en utilisant le conditionnel. Vous avez dit « si ». Ce « si » se situe dans le conditionnel. Si le Président décide alors là je serai derrière cette décision.
Même en violation de la Constitution ?
Très franchement est-ce que proposer une modification ou organiser un référendum pour approuver une nouvelle Constitution en quoi cela violerait-il la Constitution ? Avez-vous vu un pays où il est impossible de modifier la constitution ? Même aux Etats-Unis il y a eu des amendements. En quoi serait-il une violation de la Constitution ? Pouvez-vous m’expliquez ça ?
On pourrait bien modifier la Constitution en laissant certains aspects qui sont intangibles tels que le nombre et la durée du mandat présidentiel…
Si c’est une nouvelle Constitution qu’on propose à l’approbation du peuple, cela n’a rien à voir avec les articles dont vous faites allusion.
Comment observez-vous les séries de manifestation de l’opposition à Conakry ?
L’opposition a ses raisons. Je ne sais pas pourquoi elle manifeste. Parce que quand on s’est mis d’accord sur une situation et qu’il y ait des difficultés qui retarde l’application, tout est régi par un cadre. S’il y a des difficultés, on se réfère à ce cadre pour aller de l’avant. Si l’opposition estime que le cadre ne lui convient pas et que c’est la rue qui la convient c’est une décision propre à elle. Mais le Président avant de partir a promulgué la Loi issue de ces accords, il a demandé par un communiqué officiel à la CENI et aux structures concernées par l’organisation des élections à prendre des mesures pour diligenter le processus pour aboutir à l’organisation de ces élections. A partir du moment où le point crucial qui est l’organisation des élections est sur la voie d’être satisfait, le mot d’ordre devait être suspendu.
Comment alors comprenez-vous leur démarche ?
Pour moi leur démarche obéit beaucoup plus à d’autres raisons que celles apparentes qu’ils ont exprimées. Peut-être qu’il y a des sous-entendus que nous ne savons pas. Mais si ça se situait dans la logique du fait que les élections ne sont pas organisées à temps, les délégations spéciales sont restées plus qu’il n’en faut, il fallait suspendre les manifestations à partir du moment où le Président de la République a pris des engagements et a posé des actes.
Samedi dernier vous disiez je cite : « nous allons apporter des réponses très appropriées à ceux qui provoquent la pagaille dans ce pays ». Que voulez-vous dire concrètement ?
Le peuple est fatigué. Ces manifestations ont l’habitude de causer de très nombreux dégâts matériels et même en vies humaines dans ce pays. En tant que guinéen patriote, on ne peut pas s’assoir regarder ces genres de situation perdurer (…). Je pense que le dialogue doit être le point cardinal qui commande la conduite politique de chaque acteur politique dans ce pays pour éviter de créer des problèmes de gauche à droite.
Comment se porte le RPG arc-en-ciel à la veille des élections communales ?
On est extrêmement confiant. Les élections prochaines si Dieu nous prête la vie, vous verrez que le RPG arc-en-ciel aura plus des 2/3. C’est clair. Ce sont les hommes politiques qui sont ethnos dans notre pays. Les populations ne le sont pas. Il suffit de trouver le langage pour les convaincre. Moi j’ai plus d’amis au Foutah au niveau politique que chez moi-même. L’ex fédéral de l’UFDG en Allemagne Lamine Diallo est un ami personnel à moi, même Bah Oury est un ami de très longue date.
Quand je suis allé en prison en 1990 c’est Bah Oury et Dr Thierno Madjou Sow paix à son âme qui se sont battus pour que je sorte. A l’époque il n’y avait des questions d’ethnie. On avait un objectif qui était l’instauration du multipartisme et la démocratie. Les contingences ethniques ou tribales ne nous intéressaient pas.
Comment en est-on arrivé là ?
Je n’en sais rien.
Votre mot de la fin ?
Je veux dire que le Président n’a jamais dit à quelqu’un qu’il veut un troisième mandat. Pour nous, il a un mandat, il a un programme, le parti et ses collaborateurs s’évertuent à aider à la réalisation de ce programme en se focalisant sur la base sur laquelle il a été élu. Donc, nous ne sommes pas dans l’esprit d’un troisième, quatrième ou cinquième mandat. Nous sommes dans l’esprit de la réalisation du projet du Président de la République.
Interview réalisée par Diallo Boubacar 1
Pour Africaguinee.com
Tél. : (00224) 655 311 112
Créé le 12 août 2017 13:31Nous vous proposons aussi
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