Salifou Kébé : « Le départ de Bakary Fofana à la tête de la CENI n’est pas exclu… » (Interview)
CONAKRY- La crise au sein de la Commission électorale nationale indépendante risque de s’enliser ! Plusieurs commissaires de l’institution chargée d’organiser les référendums et les élections politiques en Guinée n’exclue pas de demander le départ de Bakary Fofana à la tête de la CENI. Que reproche t-on à l’ancien Ministre des Affaires Etrangères ? Que proposent ces commissaires pour un meilleur fonctionnement de l’institution. Maître Salifou Kébé, le Directeur du département juridique et contentieux s’est prêté aux questions de notre rédaction… Exclusif !!!
AFRICAGUINEE.COM : La CENI est minée par une crise latente depuis plusieurs semaines. On apprend qu’une procédure de destitution du Président Bakary Fofoana est en cours. Où en est-on ?
Les discussions sont en cours depuis la semaine passée. Mais tout d’abord une information est allée à votre niveau qui n’est pas complète. Tout ce que la CENI fait est balisé par la Loi. Nous sommes en train de travailler, mais aucune perspective n’est écartée. Nous les commissaires, on s’entend bien sur les démarches à mener. Mais apparemment c’est le Président de la CENI seul qui est retranché dans un camp. Sinon tous les autres commissaires sont unanimes. On ne peut pas bloquer l’institution, nous continuons à travailler pour améliorer la gouvernance interne de l’institution, améliorer la gestion des ressources de l’institution.
Beaucoup de pistes ont été ouvertes, nous étions en train de les étudier quand il (Bkary Fofana) s’est précipité pour aller dire dans la presse qu’un groupe de commissaires veulent le destituer. En réalité l’ensemble des commissaires sont d’accord pour mettre l’ensemble des organes de transparence en place et dans la gouvernance interne et dans la gestion des ressources financières et matérielles de l’institution.
Aujourd’hui, c’est ce travail qui a continué. Il n’a jamais été question de venir le (Bakary Fofana) balayer, mais cela n’est pas exclu dans la mesure où s’il s’oppose à la majorité des commissaires, nous serons obligés, de la même façon que nous l’avions élu, de voter pour le destituer. Cela n’est pas exclu. Mais on n’en est pas là encore.
Est-ce que Monsieur Bakary Fofana prend part aux plénières de la CENI ?
La dernière plénière il a participé, mais aujourd’hui, il n’était pas là.
Le président de la CENI vous que rétorque les organes transparence sont sur place. Que répondez-vous ?
Cela n’a rien à voir. Le DAF (Directeur des Affaires Financières, Ndlr) par exemple n’est pas là pour veiller à la transparence de gestion des ressources de la CENI. Aucun DAF n’a ce rôle. Le DAF est là pour respecter l’orthodoxie financière en matière de gestion des biens publics. On l’a mis à côté de l’ordonnateur pour qu’il puisse suivre en tant que technicien spécialisé tout ce qui doit être observé dans l’utilisation de l’argent public. Mais nous, la loi qui nous a mis à la CENI nous permet de suivre au jour le jour l’utilisation qu’on fait de l’argent public et de l’argent venu de nos partenaires étrangers. Donc, cela n’a rien à voir. Nous ne nous substituons pas à lui dans la gestion des biens, mais nous voulons suivre. Un comité de trésorerie suit l’évolution de la gestion. Puisqu’on dénonçait une gestion opaque, on nous dit « non » qu’on veut ceci ou cela, donc, il (Bakary Fofana, Ndlr) est dans sa logique de refuser que cette gestion soit éclairée. Et cela va se faire. Parce que dans notre règlement intérieur, on nous fait obligation de suivre l’évolution de tout ce que l’Etat et nos partenaires mettent à notre disposition pour le fonctionnement de la CENI.
Pourquoi c’est maintenant que vous exigez la mise en place de ce comité de trésorerie ?
Il y a très longtemps que cette question a été soulevée. Regardez dans vos archives, vous verrez que depuis 2013, chaque année au moins, il y a une tentative de redresser cette situation, mais on nous en empêche. En 2013 à Mariador, on avait soumis le problème, ça n’a pas été fait. En 2014 à Kindia, on avait soumis le même problème. En 2015 avant la Présidentielle à Kindia, le même problème avait été soumis. Mais parfois, nous travaillons dans la discrétion, ça ne peut pas se savoir mais si vous regardez dans vos archives vous verrez dans chacune de nos retraites, ces questions de dysfonctionnement et de mauvaise gestion reviennent.
Nous ne sommes pas les seuls. Nos partenaires étrangers l’ont soulevé. Et ils sont en train de fuir un à un. Les institutions sont en train de partir. Nous allons nous assoir et regardez cela par la volonté d’un seul homme ? Voilà le problème qui nous assaille aujourd’hui. Nous sommes obligés de redresser cette situation même si nous devons partir de la CENI, ceux qui vont venir auront une bonne habitude de gestion pour la CENI. C’est tout ce que nous voulons. Nous n’en voulons pas à Bakary, nous n’en voulons à personne. Nous voulons que la gestion que nous faisons soit saine quoiqu’on en dise.
Aujourd’hui peut-on dire que monsieur Bakary Fofana est en sursis s’il s’obstine dans cette position ?
Carrément ! Parce que je ne vois pas une solution quand il fait la déclaration en disant qu’il ne peut collaborer avec l’ensemble des commissaires. Lui il se considère comme une institution à part, les commissaires une autre à part. C’est malheureux.
Est-ce que ce bras de fer ne risque pas d’influencer négativement l’organisation des élections communales ?
Il n’y a aucun risque parce que nous travaillons pour la Guinée. Si Monsieur Bakary Fofana n’est pas dans les bonnes dispositions de travailler avec nous, nous le mettrons à l’écart et nous continuerons à travailler. Déjà je vous annonce que c’est nous qui faisons le travail technique à la CENI, nous n’en démordrons pas. S’il veut travailler avec nous, nous le ferons avec lui, s’il ne veut pas, il s’en ira et un autre guinéen plus compétent viendra gérer cette situation.
Entretien réalisé par Diallo Boubacar 1
Pour Africaguinee.com
Tél. : (00224) 655 311 112
Créé le 20 juin 2017 10:35Nous vous proposons aussi
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