Lucien Guilao : « ce qui ne va pas avec le Syli de Guinée… »
CONAKRY- Faut-il dissoudre le Syli national de Guinée ? Qu’est-ce qui explique les échecs répétés des poulains de Lappé Bangoura ? Lucien Guilao, cet ancien Ministre des guinéens de l’étranger qui est beaucoup plus connu sur le terrain politique, livre ici sa position sur le football guinéen en général. Ancien joueur du Syli national et de l’Association Sportive des Forces Armées de Guinée, Lucien Guilao nous compte une partie de son histoire qui l’avait conduit au Portugal où il avait signé un contrat professionnel. Exclusif !!!
AFRICAGUINEE.COM : Monsieur Lucien Guilao bonjour. Quelle lecture faites-vous des échecs répétés du Syli national de Guinée ?
LUCIEN GUILAO : A mon avis l’amateurisme et l’incompétence expliquent cet échec. Cette situation d’échec de notre football était prévisible et le déclin ne date pas d’aujourd’hui. Les résultats moyens du Syli national nous rendaient aveugles. C’était l’arbre qui cachait la forêt, c'est-à-dire que tout allait bien lorsque le syli gagnait et tout va mal lorsqu’il perd. Bien qu’étant la vitrine de notre football, on ne doit pas réduire l’état de santé de notre football à une défaite ou une victoire du Syli.
Notre football va mal dans ses fondements même, il est corrompu de telle sorte que plus rien ne peut en être tiré de bien tant qu’il sera géré et dirigé de la sorte. Même si tout le monde sait à peu près ce qui ne va pas, il est urgent que les cadres et tous les acteurs de ce secteur s’asseyent et fassent le diagnostic qu’il faut et mettent en place les plans d’actions qu’il faut. A mon avis il est indispensable de le faire. En Guinée on a la mauvaise habitude de croire que l’on perd du temps en prenant la peine de diagnostiquer. Un diagnostic correct et juste permet de proposer les bons remèdes pour venir à bout du problème. Nous devons absolument prendre le temps qu’il faut pour cet exercice car le temps détruit tout ce qui a été fait sans lui.
Pensez-vous qu’une dissolution de l’actuelle équipe du Syli soit l’unique solution ?
Une mauvaise idée que de penser à dissoudre le Syli national. Comment peut-on même, penser à le faire ? Le syli national est la vitrine de notre football, et à ce titre il est notre patrimoine national. On ne dissout pas un patrimoine national. Il est évident que les choses vont mal, le Syli est malade, et plutôt que de rechercher des solutions pour sauver le malade, on s’en prend à lui et on veut l’euthanasier. Que les choses soient claires, ce n’est pas du procès du syli national qu’il s’agit, mais c’est du système de gestion de notre football qu’il s’agit. Je le dis et le répète, le syli national n’est pas le problème, ce sont les hommes qui gèrent le football qui sont le problème.
Pouvez me dire exactement ce que fait la direction technique nationale de football ? Qui dirige la direction technique nationale ? Comment sont sélectionnés nos joueurs dans les catégories U17, U20 etc ? Qui champion de guinée en U17 ?
Après l’élimination de la Guinée pour la Coupe d’Afrique, les chances du Syli s’amenuisent davantage. Croyez-vous à la capacité du staff technique dirigé par Lappé Bangoura?
Sauf miracle, nous ne pourrons pas rattraper notre retard. Ce que je crains c’est qu’en cas de victoire en Lybie, que l’on vienne me dire que tout va bien.
Quelle appréciation faites-vous de la mise en place du comité technique qui dirige la fédération guinéenne de football ?
Ledit comité a pour mission de gérer les affaires courantes de la FGF, de réviser ses statuts et d’organiser des élections d’ici au 28 février 2017, c’est ce que l’on m’a dit.
Cependant, je suis parmi ceux qui pensent qu’en tant qu’organe de transition, il ne lui appartenait pas de recruter le sélectionneur et par conséquent de signer un contrat qui aille au-delà de son mandat. En le faisant il engage la prochaine fédération qui a plus de légitimité que lui. Je pense qu’il eut fallu mettre en place un staff technique provisoire dont le mandat prenait fin le 28 février 2017 et libre ensuite à la nouvelle fédération élue de le reconduire ou non.
Avec ce qui s’est passé avec Luis Fernandez, des voix se sont élevées pour favoriser l’expertise locale dans le choix du sélectionneur, qu’en pensez-vous ?
Sincèrement je pense que c’est un faux débat, et je constate que comme d’habitude, il s’agit que de pure manipulation de la part de certaines personnes. De quelle expertise locale parlez-vous ? Peut –on parler d’expertise locale dans un pays où depuis 1977, aucun club n’a remporté la coupe des clubs champions ? Peut-on parler d’expertise locale dans un pays où depuis plus de 20 ans aucun club n’a dépassé les préliminaires et /ou les phases de poule des coupes des clubs africains ?
Ceux qui défendent la position de faire appel à une expertise locale, ne nous disent pas que nous avons déjà fait l’expérience et nous avons utilisé une bonne dizaine de locaux avec des résultats plus ou moins mitigé. Maître Naby, Abdoulaye Banks, Titi Camara, Mamady Souaré, Aly Badara Keita, etc……ont tous été sélectionneurs ici.
L’expertise et la compétence n’ont ni couleur ni nationalité, elles sont partout et ceux qui dirigent notre football doivent aller la chercher là où elles se trouvent. Pour l’instant il n’y en a plus en Guinée.
On vous connaît beaucoup plus sur le terrain politique. Parlez-nous un peu de votre carrière footballistique.
J’ai eu une carrière courte, merveilleuse et atypique. Pour moi et ma famille, il n’était pas question de se lancer dans une carrière de football à plein temps. Je me souviens encore de ma mère qui me disait « fini tes études et tu seras libre de faire du football ». Entre 16 et 22 ans j’étais une sorte d’intermittent du football, je ne jouais qu’aux inters – comités pendant les vacances à Conakry et au Maracana sur le campus de l’université. A la fin de mes études universitaires, je signe à l’ASFAG, association des forces armées de Guinée, et trois mois après je suis appelé en sélection espoirs par Chérif Souleymane et 5 mois après par Maître Naby dans le grand Syli National pour affronter la Tunisie en éliminatoire du mondial mexicain. A la sortie de ces deux matches je prenais la direction du Gabon pour une carrière semi-professionnelle. Quelques années plus tard à la suite de la coupe cabral qui se jouait au Mali, je me retrouve en train de signer mon premier contrat professionnel en première division Portugaise. Ce qui fait de moi l’un des tous premiers, si non le premier professionnel guinéen en Europe.
Seriez-vous un jour prêt à diriger l’équipe du Syli ?
Non, je n’en ai pas les compétences. Je n’ai pas les diplômes requis pour le faire
Avez-vous un dernier mot ?
Je tiens à vous remercier pour l’occasion que vous m’offrez de m’exprimer à froid sur ce sujet qui nous intéresse à plus d’un titre.
Entretien réalisé par BAH Boubacar Loudah
Pour Africaguinee.com
Tél. : (+224) 655 31 11 13
Créé le 7 décembre 2016 09:50Nous vous proposons aussi
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