Menace de grève générale en Guinée : Entretien avec le syndicaliste Casimir Diaora…

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CONAKRY- La confrontation semble inévitable entre le Gouvernement du Président Alpha Condé et les syndicalistes. Le vice-président de la commission syndicale engagée dans les négociations avec le Gouvernement vient d’énumérer leurs différents points de revendication. Dans cet entretien exclusif accordé à notre rédaction, Monsieur Casimir Diaora, explique pourquoi le Gouvernement devrait accéder à leurs revendications pour éviter une nouvelle crise sociale pour le pays. Exclusif !!!


AFRICAGUINEE.COM : Monsieur Casimir bonjour !

CASIMIR DIAORA : Bonjour Monsieur Diallo !

Le mouvement syndical guinéen vient de réitérer sa menace de déclencher une grève à partir 15 février prochain. Que réclamez-vous concrètement ?

Nous voulons débattre des treize points inscrits dans la plateforme revendicative pour arriver à une solution qui puisse satisfaire non seulement les travailleurs, mais aussi une solution qui ne dérange pas l’Etat dans ses équilibres macroéconomiques. Nous voulons la satisfaction de toutes les parties.

Nous avons commencé à négocier, on n’a même pas touché les onze autres points. Nous nous sommes retrouvés bloqués sur les deux premiers points surtout le point sur le carburant. Etant donc bloqué, nous avons déposé l’avis de grève. Et ce n’est pas une blague. Nous disons que dans un tel processus l’échec n’est pas bon. Parce qu’il peut avoir des conséquences funestes et pour le Gouvernement et pour le syndicat. Parce que ça peut soulever une grave crise sociale.

Nous espérons que nous allons bientôt nous retrouver pour pouvoir parler. La dernière proposition du Gouvernement a été celle-ci : dans l’immédiat, nous ne pouvons pas baisser le prix du carburant, il faut éviter le dérapage économique. Nous sommes tenus à l’œil par les institutions de Breton Wood, nous devons avoir en fin mars un appui budgétaire. Mais si nous bougeons et qu’il y ait un dérapage sur le budget à l’heure actuelle, nous n’aurons pas cet appui. Quand nous aurons cet appui, nous verrons comment bouger.

Alors, on a dit fin mars c’est loin. Nous avons déjà appris que d’ici le mois de juin, la tendance haussière du prix du baril va se faire sentir davantage. Mais d’ici là, quand il y avait la tendance baissière pourquoi ne pas appliquer le protocole. C’est à ce niveau qu’il nous a été demandé d’attendre fin mars. Nous (de la commission de négociation) nous ne pouvions pas venir dire aux gens d’attendre fin mars.  Nous avons trouvé cela abusif parce que le Gouvernement aurait pu de lui-même baisser le prix du carburant au mois de juin de l’année dernière d’un petit montant, au mois d’octobre, d’un petit montant…On ne serait pas en train de l’acculer aujourd’hui.

Lors votre réunion de ce jeudi, quel a été le mot d’ordre qui a été lancé aux structures à la base ?

Aujourd’hui après explication du motif de la décision d’aller en grève le 15 février, il a été demandé de dépolitiser le mouvement, de rester strictement dans le cadre syndical. La grève c’est l’arrêt temporaire du travail, ce n’est pas une insurrection, ni une confrontation. Il est clair que si les lignes patronales et gouvernementales ne bougent pas, on ne trouve pas un consensus, nos lignes ne pourront pas bouger. Pour que le blocage soit levé, il faudrait que les lignes bougent, qu’elles se rencontrent sur un consensus qui pourrait satisfaire toutes les parties.

Face à vos différentes revendications, le Gouvernement oppose l’argument de la crise économique laissée par Ebola, l’élection présidentielle, la baisse des prix des matières premières dont la Guinée est exportatrice sur le marché mondial. Que répondez-vous ?

Les élections présidentielles nous n’en parlons pas parce que ça c’est politique. Nous n’aimons pas aller sur ce plan. Le cours des prix des matières premières (bauxite, fer, or) a commencé à chuter il y a longtemps. On ne gagne presque rien. On le sait. Mais nous savons qu’en suivant scrupuleusement le budget dans son élaboration et dans exécution, il y a beaucoup de secteurs où l’on peut trouver de l’argent pour compenser le manque à gagner suite à la baisse. Le budget au niveau des impôts, il faudrait voir ce qu’il faut faire. On a augmenté la TVA de 18 à 20%. Mais qu’est-ce qui nous prouve que la TVA va rentrer dans les caisses de l’Etat quand on sait qu’il y a des gens qui sont en train de grignoter tout le temps sur les avoirs de l’Etat. Il s’agit de veiller en amont et en aval sur la bonne exécution des impôts pour l’engrangement des sommes pour pouvoir couvrir les dépenses de l’Etat. On est dans une économie libérale. On ne vit que des taxes et d’impôts.  La Guinée ne produit que très peu.

Alors en bien regardant dans le budget, il est fort possible de dégoter des niches qu’on va retourner à l’utilisation publique, de taxer les opérateurs qui doivent être taxés. Les Licences téléphoniques coutent combien au Sénégal ? Nous, nous les donnons ici à vil prix. L’Etat doit repenser toute sa politique des EPA (établissements publics autonomes). On donne l’argent public à des gens qui le gèrent comme ils le veulent, il n’y a pas de retour à la caisse de l’Etat. Ça fatigue le Gouvernement, ça fatigue les travailleurs. Il faut repenser tout cela. Nous voulons rentrer maintenant dans la dynamique du suivi citoyen. Il y a trois ans, on a parlé d’un détournement de près de 20 milliards suite aux examens à l’éducation. Après ça, c’est resté lettre morte. Il y a tout un tintamarre dans le pays.  Est-ce que des tendances comme ça peuvent encourager les travailleurs ?

Jusqu’où êtes-vous prêts à aller ?

Impossible n’est pas un langage syndical. Le Gouvernement n’a qu’à nous dire : vous avez 5000, nous on en est à tel franc. Les discussions s’engagent. Mais quand on dit : Papa je veux 100francs, il te dit même 1 francs je n’ai pas. Même l’enfant de quatre ans réagit. Parce qu’il s’attend à ce que papa lui donne au moins 10 francs. Nous sommes très convaincus de l’état actuel de l’économie guinéenne. Elle est exsangue, il n’y a pas de production, Ebola est passée, les investisseurs sont partis, on est conscient de cela. Mais dans tout ça, il y a des gens qui sont en train de faire de la mal gouvernance.  Nous n’allons pas prendre le pot cassé par ceux qui gouvernent mal.

Le gouvernement vient d’augmenter la TVA sur les denrées de premières nécessité, la téléphonie mais aussi la connexion internet. Qu’en dites-vous ?

C’est le consommateur qui paie la TVA. Mais quand on la paie, l’Etat doit veiller à ce qu’elle soit orientée vers le social. Mais si les 2% qui ont été augmentés s’en vont dans les poches des gens qui gèrent les impôts et les taxes, il va s’en dire que l’Etat sera grugé, il n’aura rien, l’inflation va augmenter et le pays va sombrer économiquement. Alors il faut prendre toutes les mesures possibles d’engranger l’argent issu de cette augmentation pour qu’il rentre dans les caisses de l’Etat, qu’il soit orienté vers le social pour soulager le peuple.

 

Entretien réalisé par Diallo Boubacar 1

Pour Africaguinee.com

Tel : (00224) 655 31 11 12

 

Créé le 7 février 2016 09:35

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