Scandale autour d’un marché du Ministère de l’intérieur : Que va faire Alpha Condé ?
CONAKRY- Un scandale éclabousse depuis quelques semaines le monde des affaires à Conakry. Depuis le mois d’août dernier, un bras de fer oppose l’Autorité de Régulation des Marchés Publics (ARMP) à la Direction nationale des marchés publics, soutenue par l’Administration Générale et de Contrôle des Grands Projets, a appris Africaguinee.com.
Tout est parti d’un appel d’offres lancé au mois de juillet dernier par le département de la sécurité. Cet appel d’offres qui comprenait deux lots à savoir : La fourniture de tenues et la livraison de denrées alimentaires.
Après le dépôt des dossiers par les différents soumissionnaires, une commission a été mise en place pour leur examen. L’ouverture des différentes offres a donc eu lieu le 28 août 2015. Alors que le code de passation des marchés exige un délai maximal de 15 jours pour statuer sur les différentes offres, la commission chargée de l’étude des dossiers mettra plusieurs mois, à cause du manque de transparence.
Contre toute attente, le marché pour la fourniture des tenues a été attribué à l’entreprise Veox Internationale, une société qui appartiendrait au fils du Directeur nationale du budget. Celui de la fourniture des denrées alimentaires a quant à lui été donné à l’entreprise GICA. Un autre point a attiré les soupçons des autres soumissionnaires à cet appel d’offres. C’est le fait que la société GICA appartienne au fils d'un certain Kaba Baro, le frère de « Thalès », l’Administrateur Général de Contrôle des Grands Projets. Les offres de ces deux sociétés n’étaient pourtant pas les moins disantes.
Après ouverture des différents dossiers, on a constaté par exemple que l’entreprise Veox International avait fait une offre de 5.590.006.000 GNF contre 5.557.369.300 GNF pour l’établissement « Kalilou Baro ». Le marché pour l’acquisition des denrées alimentaires i a également été attribué dans des conditions floues du moment où plusieurs autres soumissionnaires avaient présenté des offres moins disantes. Il s’agit par exemple de la société « ABC » qui avait présenté une offre de 9.381.148.717 GNF contre 12.205.960.000 GNF pour GICA, la société qui a été choisie pour bénéficier du marché.
Du côté de la Direction Nationale des Marchés Publics, une source proche du dossier nous a appris que la commission chargée de l’étude des dossiers a invoqué deux motifs pour recaler certaines entreprises. Le retard dans le dépôt de l’offre a été invoqué pour l’établissement « Kalilou Baro ». Nana Guinée a tout simplement vu son quitus fiscal disparaître de son dossier.
Le 10 septembre 2015, le Directeur Général de l’Autorité de Régulation des Marchés Publics a adressé un courrier à la Directrice Nationale des Marchés Publics qui relève du département de l’économie et des finances. Dans ce courrier, le Directeur Général de l’ARMP, Guillaume Curtis, fait constater à la Directrice nationale des marchés publics qu’il a été saisi par une des entreprises soumissionnaires de cet appel d’offres qui a dénoncé la violation de la procédure de passation du marché d’acquisition de fournitures diverses au compte du ministère de la sécurité. Dans ce même courrier, le numéro un de l’ARMP rappelle que « la saisine de l’ARMP est suspensive de toute procédure conformément à l’article 130 du code des marchés publics, elle est la seule institution habilitée à corriger la violation alléguée ou d’empêcher que d’autres dommages soient causés aux intérêts concernés ou de suspendre ou faire suspendre la décision litigieuse ou la procédure de passation ».
La deuxième invite de M. Curtis à l’endroit de la Directrice nationale des marchés publics a été que « la commission d’ouverture et d’évaluation examine tous les plis ouverts même ceux supposés arrivés en retard du fait des deux courriers contradictoires car après analyse, il s’avère que le courrier qui mentionne 15 heures qui est valide ».
Le 5 novembre dernier, le comité de règlement des différends et des sanctions, organe qui relève de l’Autorité de Régulation des Marchés Publics, s’est réuni pour statuer sur cette affaire qui commence à sentir le roussi. Le comité de règlement des différends statuant en formation litige a pris un certain nombre de décisions :
Il annule le rapport d’évaluation établi sans la prise en compte de tous les plis ouverts au moment de la séance d’ouverture ;
Enjoint sans délai à la Direction Nationale des Marchés Publics, ainsi qu’à toutes les parties prenantes de procéder à l’examen de toutes les offres dont les plis ont été reçus et ouverts lors de la séance d’ouverture ;
Rappelle à l’ACGPMP qu’elle n’émet que des avis, à ce titre, elle n’a aucun pouvoir de décision ni de recommandation ;
Demande à Monsieur le Ministre en charge de l’économie et des finances d’infliger un blâme à la Directrice Nationale des marchés publics pour le non-respect des décisions de l’ARMP et de dysfonctionnement du service public à la Direction Nationale des Marchés Publics (DNMP) ;
Demande à Monsieur le Ministre en chargé de l’économie et des finances de suspendre pour six mois de toute procédure de passation de la commande publique en Guinée les membres de la commission de passation relevant de la Direction nationale des marchés publics qui sont à l’origine de la procédure viciée ;
Le Président Alpha Condé va t-il sanctionner cette fois-ci encore? Les regards sont tournés vers le Palais Sékoutoureya où Alpha Condé devra forcément prendre une décision.
A suivre…
Ahmed Tounkara
Pour Africaguinee.com
Créé le 25 novembre 2015 10:16Nous vous proposons aussi
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